Ron Wallace : Les Russes sont-ils en train de gagner la guerre de l’énergie ?

Le pari russe sur la sécurité énergétique et les exportations de combustibles fossiles a jusqu’à présent porté ses fruits pour Poutine

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La Russie n’a pas si bien réussi dans la première phase de sa guerre contre l’Ukraine. Mais gagne-t-il ce qui s’est transformé en une guerre mondiale de l’énergie ? Les prix élevés du pétrole et du gaz ont provoqué des revirements vertigineux dans les politiques énergétiques occidentales, les « transitions » vers des sources d’énergie alternatives semblant tout sauf ordonnées. Alors que les sociétés occidentales font face à des dépréciations massives alors qu’elles tentent de quitter la Russie, avec des estimations de coûts dépassant 120 milliards de dollars américains, de nombreux producteurs de pétrole en dehors de l’Amérique du Nord sont récompensés par d’énormes aubaines. Ce bouleversement des économies occidentales et des marchés de capitaux internationaux est le résultat direct du fait que les pays occidentaux ont perdu de vue la contribution vitale que l’énergie apporte à la résilience économique et à la sécurité régionale. Des transitions trop agressives vers des sources d’énergie alternatives et renouvelables mettent en danger la sécurité mondiale et provoquent des instabilités de marché.

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Il y a eu une divergence remarquable dans les stratégies énergétiques occidentales et russes au cours de la dernière décennie. Alors que l’Occident, sensible au climat, s’est engagé à réduire ses émissions à « Net Zero », la Russie a doublé de manière significative, en utilisant les investissements en capital et les technologies occidentales pour développer la production de pétrole et de gaz dans l’Arctique et les pipelines d’exportation. Alors, quel pari sur l’énergie a porté ses fruits ?

Avant l’invasion de l’Ukraine, l’UE et le Royaume-Uni ont fait d’énormes paris sur les énergies renouvelables complétées par des importations de gaz russe pour combler les déficits. L’effet a été d’augmenter sensiblement les prix à la consommation. L’Allemagne, pour sa part, est maintenant confrontée à des choix très difficiles. Dans un revirement soudain des décisions passées de diminuer la production thermique et nucléaire, le chancelier allemand Scholz s’est engagé à mettre fin à la dépendance de son pays vis-à-vis des approvisionnements russes « le plus rapidement possible » – un pivot soudain qui risque de frapper durement les économies allemande et européenne. Même la Commission européenne a été forcée d’accepter la nouvelle réalité et de reconnaître que davantage de pétrole et de charbon seront nécessaires pour compenser les importations de gaz russe, mettant ainsi en péril les engagements de fermer toute la production d’électricité thermique au charbon de l’UE d’ici 2030.

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Bien que le « pivot Scholz » ait créé un changement de politique énergétique sismique, il devient clair que l’Allemagne ne peut pas rapidement ou facilement mettre fin à sa dépendance au gaz russe. Le ministre allemand de l’économie et du changement climatique, Robert Habeck, a mentionné son pays ne pourrait pas se permettre la « perte de centaines de milliers d’emplois » qui résulterait d’un embargo total sur l’énergie russe. Pendant ce temps, d’autres membres de l’UE se précipitent pour trouver des fournisseurs alternatifs à des prix raisonnables.

En réponse aux sanctions occidentales, le russe Gazprom a choisi cette semaine d’arrêter les expéditions de gaz naturel vers la Pologne et la Bulgarie parce qu’ils ont refusé de répondre aux demandes russes de paiement en roubles. La sécurité énergétique pour l’UE est désormais devenue une considération politique et économique primordiale, car les prix gonflés du gaz balayent leurs économies et le rationnement se profile comme une possibilité réelle.

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La Russie est également confrontée à une profonde récession face aux sanctions occidentales. Mais la poursuite des exportations de pétrole et de gaz, qui représentent environ 40 % du budget annuel russe, a permis au rouble de se remettre des fortes baisses antérieures, alors que les revenus à court terme des exportations d’énergie continuent d’augmenter. En effet, alors que l’horrible conflit ukrainien se poursuit, les sanctions occidentales contre la Russie sont effectivement compensées par des achats d’énergie. Les rapports indiquent que les recettes d’exportation d’énergie de la Russie en 2022 pourraient en fait dépasser celles de 2021. Avec des prix élevés du pétrole et du gaz, la Russie et ses partenaires de l’OPEP+1 peuvent anticiper des recettes d’exportation exceptionnelles tandis que les importations de gaz naturel de l’Allemagne et de l’UE ajoutent quotidiennement des millions au Trésor russe.

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Les politiques énergétiques occidentales peu judicieuses garantissent que l’UE sera confrontée à des choix difficiles pendant des années. Bien qu’il arrive assez tard dans le jeu, cette semaine admission par la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, selon laquelle « il n’est pas surprenant que le Kremlin utilise des combustibles fossiles pour essayer de nous faire chanter » peut amener certains à conclure que les énergies renouvelables fourniront à elles seules une panacée rapide ou durable pour sauver l’UE de les conséquences de ses politiques énergétiques passées. L’UE est tombée dans ce fiasco en raison de sa détermination à atteindre les objectifs climatiques sans tenir compte des implications stratégiques de ces politiques énergétiques. Pour Poutine, le pari russe sur la sécurité et les exportations d’énergie fossile a jusqu’à présent porté ses fruits. Pire encore, la volonté rapide de l’UE d’atteindre Net Zero finance désormais efficacement la machine de guerre russe.

Ron Wallace est membre exécutif de l’Institut canadien des affaires mondiales et de la Canada West Foundation. Il a pris sa retraite en tant que membre permanent de l’Office national de l’énergie en 2016.

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