J’ai d’abord lu ce poème sur Twitter, et même s’il s’agit d’un simple poème sur le deuil, il m’est resté. Je suis fasciné par la façon dont il révèle tant de choses dans son titre, montrant comment un titre peut éliminer des informations importantes afin que le poème puisse respirer par lui-même. Pourtant, le lecteur ne sait pas quelle est la « tâche » jusqu’à la troisième strophe. Ce poème est un exemple de la façon dont des émotions abondantes peuvent être transmises en dépouillant le langage jusqu’à l’os. Sélectionné par Victoria Chang
Ma sœur, décédée jeune, prend la relève
Par Jon Pineda
Un panier de pommes brunes dans notre cuisine,
leur parfum chaud est le parfum de la maturation,
et ma soeur, entrant tranquillement dans la chambre,
prend place à table, se met à la tâche
de peler lentement les peaux tachées,
même ceux à moitié pourris sont récupérés avec soin.
Elle s’assure de tailler la chair farineuse.
Pour cela, je suis reconnaissant. J’explique, cette élégie
aimerait tout sauver. Elle me sourit,
et bientôt, le bol vide qu’elle utilise se remplit,
dôme avec de fines tranches qu’elle brosse dans
l’embouchure d’une marmite fumante sur la cuisinière.
Que puis-je faire? je demande enfin. Rien,
elle dit, laisse-moi finir cette chose tout seul.
Victoria Chang est un ancien boursier de Guggenheim dont le cinquième livre de poèmes, «Obit» (Copper Canyon Press, 2020), a été nommé New York Times Notable Book et Time Must-Read. Il a reçu le Los Angeles Times Book Prize et le Anisfield-Wolf Book Award for Poetry. Son livre de non-fiction, « Dear Memory: Letters on Writing, Silence and Grief », a été publié par Milkweed Editions en 2021. Elle enseigne dans le programme MFA de l’Université d’Antioche. Jsur Pineda est un poète et prosateur américain dont l’œuvre comprend le recueil de poésie « The Translator’s Diary » (New Issues Press, 2008), dont est tiré ce poème.