Ce poème (en traduction) de Wang Yin, un poète chinois basé à Shanghai, capture avec justesse la glissance du temps, de la mémoire et des rêves. Cela me rappelle qu’une des choses que j’aime dans la poésie est sa capacité à opérer en dehors du temps, voire à le subvertir. Les sauts de ligne peuvent également élargir le sens (même en traduction) : le mot « core », l’expression « core revolution » et le nom « revolution » sont tous des possibilités en raison d’une simple pause après le mot « core ». Il y a une métaphore méfiante dans les dernières lignes de ce poème qui fait un commentaire sur notre époque instable, et même les étoiles ne sont pas unifiées dans leurs croyances. Sélectionné par Victoria Chang
Il y a enfin hier
Par Wang Yin, traduit par Andrea Lingenfelter
il y a enfin hier
enfin il y a de la fureur
les rêves ont maintenant un noyau
la révolution ressemble enfin à quelque chose comme la vie normale
ce jour et cette nuit sont enterrés ensemble enlacés enfin
jeunesse disparue de ce monde
l’idée même de la jeunesse disparue de ce monde
la corne de la tempête ressemble à une coupe inclinée
le miroir du soir ne me dessine plus en fantôme
un monde lavé m’est inutile
pierres silencieuses, mes professeurs
ces doux talents
qui se soumettent au sort qui leur est réservé
s’inclinant devant cette prophétie en colère
se lancer dans un voyage qu’ils n’achèveront jamais
Je, nous, cette ère mutable qui est la nôtre
chaque étoile suit son propre dieu
alors qu’il tourne la tête
Victoria Chang est un ancien boursier du Guggenheim dont le cinquième livre de poèmes, « Obit » (Copper Canyon Press, 2020), a été nommé New York Times Notable Book et Time Must-Read. Il a reçu le Los Angeles Times Book Prize et le Anisfield-Wolf Book Award for Poetry. Son livre de non-fiction, « Dear Memory: Letters on Writing, Silence and Grief », a été publié par Milkweed Editions en 2021. Elle vit à Los Angeles et enseigne dans le cadre du programme MFA de l’Université d’Antioch. Wang Yin est un poète, journaliste et photographe chinois dont le travail comprend « Ghosts City Sea » (publié par Seaweed Salad Editions en accord avec Yilin Press, 2021), dont ce poème est tiré, et le prochain « A Summer Day in the Company of Ghosts » (New York Review Books, 2022).