Opinion : le ratio dette/PIB est un point d’ancrage et non un guide

Chyrstia Freeland court un risque budgétaire en ajoutant davantage de mesures de relance

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Dans son discours à Toronto le mois dernier, la ministre des Finances, Chrystia Freeland, a officiellement adopté le ratio de la dette au PIB du gouvernement fédéral comme son « point d’ancrage budgétaire ». Cela a-t-il du mérite ?

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Eh bien, lorsqu’il est question de politique budgétaire, et en particulier de l’utilisation de l’emprunt pour financer les déficits publics, le ratio dette/PIB est utile pour aider à évaluer les limites de l’emprunt public. Lorsque le ratio dette/PIB devient « trop élevé » – plus facilement défini comme un niveau qui invite à un jugement négatif de la part des marchés financiers – alors emprunter peut être très risqué. La réponse des marchés pourrait être des taux d’intérêt nettement plus élevés et/ou un refus pur et simple de la plupart des acteurs du marché d’accepter davantage d’effets publics. Lorsque les marchés réagissent de cette manière, ce n’est presque jamais graduel ou doux, c’est pourquoi le phénomène est parfois appelé «frapper le mur de la dette».

Qu’est-ce qu’un ratio « trop ​​élevé » ? Où est exactement le mur ? Nous ne savons pas. Certains gouvernements ont découvert que les marchés sont assez à l’aise avec un chiffre considérablement plus élevé que les 47 % actuels du PIB du Canada. Mais si l’expérience des années 1990 est une indication – une époque où le FMI lançait des avertissements au Canada – nous sommes actuellement à portée de main des ennuis.

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Donc, oui, la ministre Freeland a de bonnes raisons d’insister sur le fait que le ratio de la dette au PIB doit être réduit au fil du temps. Mais alors, pourquoi pense-t-elle qu’il est responsable d’ajouter encore plus de mesures de relance budgétaire, comme elle l’a fait dans son budget d’avril, un choix politique qui invitera certainement une réponse plus forte de la Banque du Canada, risquant à la fois la récession et une nouvelle augmentation de la dette à… PIB puisque le gouvernement emprunte encore plus en cas de ralentissement et, en cas de véritable récession, le PIB diminue.

(Un point technique : dans son discours de Toronto, la ministre Freeland a laissé entendre que son plan budgétaire visant à maintenir le ratio dette/PIB à la baisse signifiait qu’elle n’ajoutait pas de stimulus à l’économie. Mais c’est absurde. Il est vrai que les mesures de relance qui augmentent la dette de moins que le la croissance du PIB entraînera une baisse du ratio, mais décrire un tel phénomène comme le retrait des mesures de relance est tout simplement bizarre.)

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L’un des aspects les plus curieux de l’utilisation par le gouvernement du ratio de la dette au PIB est qu’il sert de ligne directrice pour ses politiques fiscales et de dépenses. L’hypothèse semble être que si l’économie progresse à un rythme raisonnable et que le rapport dette/PIB n’est pas particulièrement inquiétant pour les marchés financiers, alors le budget n’aura plus jamais besoin d’être équilibré. La dette peut croître au même rythme que le PIB sans souci. Le gouvernement peut dépenser autant qu’il le souhaite tant que le taux de croissance de la dette ne dépasse pas le taux de croissance de l’économie, maintenant ainsi le ratio dette/PIB en baisse ou constant.

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Cela ne signifie pas que la dette ne devra jamais être payée, mais seulement que nous transférons le fardeau de la dette aux générations futures – et transférons également les risques financiers aux générations futures. Bien sûr, plus longtemps nous poursuivrons cela dans le futur, plus grandes seront les difficultés financières supportées par la génération qui connaîtra la récession et/ou des taux d’intérêt significativement plus élevés. Il est compréhensible que le gouvernement veuille emprunter massivement lorsque les taux d’intérêt sont au plus bas : lorsque les taux sont proches de zéro, les coûts annuels du service de la dette qui entrent en compte dans les calculs du déficit sont minuscules par rapport au programme financé. Mais lorsque les taux d’intérêt reviennent à des niveaux plus normaux ou plus élevés, c’est à ce moment-là que les poulets rentrent à la maison pour se percher. Comment peut-on qualifier cela de politique budgétaire responsable ?

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L’utilisation du ratio dette/PIB comme ligne directrice de la politique budgétaire est totalement sans fondement. Les nouvelles initiatives, qu’il s’agisse de dépenses ou d’impôts, doivent être jugées à l’aune du dur travail de calcul de leurs coûts et avantages respectifs. L’impact sur le ratio de la dette au PIB est une considération importante lorsque le ratio est à ou près de niveaux inquiétants, mais autrement ne devrait jamais être un facteur décisif de mérite.

Ce gouvernement a traversé la pandémie avec de quoi être fier. L’économie se portait bien, une catastrophe économique avait été évitée et les Canadiens étaient assis sur des tas d’économies (quoique produites en partie par des initiatives trop généreuses de tous les paliers de gouvernement). La dernière chose dont nous avions besoin était de nouvelles mesures de relance pour encourager davantage une Banque du Canada déjà nerveuse.

Nous avons vu des gouvernements passés qui n’avaient pas atteint leurs objectifs de ratio dette/PIB pardonner leurs erreurs et promettre solennellement de faire mieux à l’avenir, pour que cela se reproduise. Il y a une forte probabilité que Freeland soit sur la même voie, un développement plus inquiétant cette fois car le rapport dette/PIB est si élevé. Une approche plus responsable, qui remplacerait les nouvelles mesures budgétaires par des actions de réduction de la dette, pourrait fortement réduire le risque budgétaire qu’elle court.

Poste financier

Lloyd Atkinson est l’ancien économiste en chef de la Banque de Montréal.

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