Opinion : Faciliter une véritable réconciliation par le biais des institutions financières autochtones

Les communautés autochtones ont besoin de meilleures entités de financement. En voici deux qui pourraient aider et qui pourraient éventuellement être autonomes

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Par Harold Calla et Lawrence Schembri

L’un des principaux obstacles à l’établissement de la prospérité économique dans les communautés autochtones du Canada est le manque d’accès au financement nécessaire pour investir dans les infrastructures publiques, le logement et le développement économique. Services aux Autochtones Canada et l’Assemblée des Premières Nations estiment que le déficit en infrastructures est de l’ordre de 350 milliards de dollars. Mais l’accès des Autochtones au financement de marché représente environ un dixième de ce qui est disponible dans le reste du Canada, par habitant.

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Malgré les efforts récents des banques, des coopératives de crédit et des caisses populaires, l’accès reste limité, surtout par rapport aux besoins. L’un des principaux problèmes réside dans la perception selon laquelle les prêts aux personnes, entreprises et organisations autochtones comportent un risque plus élevé. À notre avis, il s’agit d’une perception erronée : les institutions financières autochtones ont accordé des milliards de dollars de prêts à des emprunteurs autochtones avec peu ou pas de défauts de paiement.

Ces institutions financières détenues ou dirigées par des Autochtones ont développé des liens étroits avec les communautés autochtones et ont innové pour surmonter ces obstacles. Deux ensembles d’institutions autochtones se démarquent : les quatre qui ont été créées en vertu de la Loi sur la gestion financière des premières nations (LGFPN) et les 58 qui sont membres de l’Association nationale des sociétés autochtones de financement (ANSAC).

Les institutions de la FNFMA ont travaillé ensemble pour augmenter les revenus autonomes des Premières Nations et améliorer leur gestion et leurs rapports financiers. Jusqu’à présent, la FNFMA a levé 2 milliards de dollars en émettant des débentures sur les marchés financiers pour financer des projets d’infrastructures publiques dans les Premières Nations. Puisqu’il n’y a eu aucun défaut de paiement sur ces prêts, ces débentures sont très bien notées, ce qui signifie que les emprunteurs des Premières Nations paient en fait des taux d’intérêt sur leurs obligations inférieurs à ceux de la municipalité canadienne moyenne. Ces obligations sont protégées, d’une part, par un fonds de réserve pour la dette fourni par les emprunteurs autochtones eux-mêmes, et, d’autre part, par une garantie du gouvernement fédéral, même si aucun de ces mécanismes n’a été utilisé.

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Pour sa part, au cours des 30 dernières années, le réseau NACCA, composé de 58 membres, a accordé 3 milliards de dollars en prêts à 50 000 petites et moyennes entreprises autochtones partout au Canada. En plus du financement, les institutions membres offrent un soutien commercial aux entrepreneurs autochtones, surtout dans les premières étapes. Cette relation de travail étroite permet aux institutions financières d’évaluer à la fois le risque associé au prêt et la solvabilité de l’emprunteur. Par conséquent, les pertes sur prêts ont été d’environ 2 %, ce qui est comparable à celui des entreprises non autochtones.

Un facteur important du succès de ces deux ensembles d’institutions est qu’elles appartiennent et sont dirigées par des Autochtones. Toutefois, malgré leur succès, d’importants déficits de financement subsistent, notamment pour le logement, les prêts de développement économique plus importants et la participation au capital des grands projets. Les écarts reflètent également l’écart croissant en matière d’« intermédiation autochtone » : même si la richesse des communautés autochtones a augmenté rapidement, en partie à cause d’importants règlements de revendications avec les gouvernements fédéral et provincial, très peu de cette richesse est recyclée dans les communautés autochtones, où le besoin d’investissement est grand. Au lieu de cela, environ 20 milliards de dollars sont détenus dans des fiducies et des dépôts dans de grandes institutions financières et investis dans le monde entier à un coût élevé et avec un faible rendement en raison du manque d’échelle.

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Pour contribuer à combler ces écarts restants en matière d’accès au financement, le Conseil de gestion financière des Premières Nations et le Conseil national de développement économique autochtone ont proposé deux nouvelles institutions financières innovantes détenues et dirigées par des autochtones : la Banque autochtone de développement (BID) et la Commission autochtone d’investissement (IIC).

La BID collecterait des fonds sur les marchés financiers mondiaux pour financer les investissements des communautés autochtones dans le développement économique, y compris des investissements en actions dans de grands projets de ressources naturelles et d’énergie, aidant ainsi à éliminer les obstacles aux projets qui sont importants pour tous les Canadiens.

La SII attirerait et investirait la richesse financière autochtone, dont une partie favoriserait le développement économique autochtone, jouant un rôle similaire à celui de la Caisse de dépôt et placement (CDPQ) du Québec, qui investit environ 20 pour cent de ses actifs dans des entreprises québécoises. La SII serait également détenue et dirigée par des Autochtones, et indépendante de toute influence politique, lui permettant ainsi de prendre des décisions d’investissement dans le meilleur intérêt des communautés autochtones. La SII pourrait également attirer des investissements de tiers pour promouvoir le développement économique de ces communautés.

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Ces deux institutions représenteraient la prochaine génération de finance autochtone. Ils viseraient à atteindre l’échelle nécessaire pour réduire les coûts de financement des investissements à moyenne et grande échelle, augmenter les rendements, réduire les risques et augmenter considérablement les investissements dans les communautés autochtones. Ils renforceraient la confiance et les capacités, réduiraient les coûts de transaction et, à terme, favoriseraient la prospérité.

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Ces institutions amélioreraient le bien-être des Autochtones en créant des emplois, en augmentant les revenus et en réduisant les conflits sociaux. Mais le reste du Canada en bénéficierait également. Il y aurait des retombées économiques positives importantes si les communautés autochtones réalisaient leur potentiel. Et même si ces institutions auraient besoin d’un financement initial pour couvrir les coûts de mise en place, elles finiraient par devenir autonomes, réduisant ainsi considérablement la dépendance des communautés autochtones à l’égard du financement gouvernemental.

Rien ne favoriserait mieux la réconciliation avec les peuples autochtones du Canada que la prospérité et l’autodétermination économique.

Harold Calla est président exécutif du Conseil de gestion financière des Premières Nations. Lawrence Schembri est un ancien gouverneur adjoint de la Banque du Canada.

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