Massive protests erupt in Serbia, with thousands gathering in Belgrade on March 15 to express outrage over corruption, supported by a student-led movement. The demonstrations, one of the largest in decades, follow a tragic accident highlighting institutional corruption. As tensions rise, the government accuses protesters of foreign influence, while calls for peaceful assembly are echoed by international bodies. Analysts suggest this could signal significant change in the political landscape, with many citizens believing it may lead to the regime’s decline.
La mobilisation en Serbie pourrait marquer un tournant historique. Ce samedi 15 mars, des milliers de manifestants envahissent Belgrade pour exprimer leur mécontentement face à la corruption, soutenant un mouvement de protestation mené par des étudiants depuis plusieurs mois. Le rassemblement, organisé devant le Parlement, semble être l’un des plus importants que le pays des Balkans ait connus depuis des décennies.
Depuis midi, des dizaines de milliers de manifestants se sont rassemblés au cœur de la capitale, brandissant des drapeaux et sifflant. Beaucoup portent également un badge représentant une main ensanglantée, emblème du mouvement qui a adopté le slogan ‘la corruption tue’. La mobilisation est telle que des groupes de motards, de vétérans et de services de sécurité étudiants se sont organisés pour prévenir tout débordement.
Des agriculteurs, conduisant leurs tracteurs, ont également rejoint les étudiants qui ont appelé à une manifestation ‘calme et responsable’. Dès vendredi soir, des dizaines de milliers de personnes (31 000 selon le ministère de l’Intérieur) ont accueilli les manifestants venus à pied, à vélo ou en tracteur de toute la Serbie, dans une atmosphère festive. En quelques mois, le mouvement a réussi à rassembler le pays autour d’une colère commune.
Un mouvement massif à l’échelle nationale
Cette colère a éclaté le 1er novembre dernier, suite à un tragique accident à la gare de Novi Sad, dans le nord du pays, qui a coûté la vie à 15 personnes. L’auvent en béton du bâtiment récemment rénové s’est effondré. Cela illustre la corruption qui entache les institutions et les travaux publics, selon les manifestants, qui exigent une plus grande transparence de la part du gouvernement.
Au fil des semaines, le mouvement est devenu l’un des plus significatifs de l’histoire récente de la Serbie, avec des manifestations quotidiennes. Des rassemblements massifs et des marches de plusieurs dizaines de kilomètres à travers les villages ont également été organisés. De plus, des étudiants bloquent la plupart des facultés publiques du pays depuis fin novembre, où les cours sont à l’arrêt. Un grand nombre d’écoles primaires et secondaires sont également fermées.
En plein cœur de cette mobilisation, l’ONG Transparency International a rétrogradé la Serbie en début février à son niveau le plus bas dans le classement mondial de la corruption depuis 2012, signalant une ‘augmentation de l’exposition des institutions’. Le pays a obtenu 35 points sur une échelle allant de 0, le score le plus bas, à 100, le meilleur, se classant ainsi 105e sur 180 pays.
Le gouvernement intensifie les tensions
Le mouvement de protestation massif est resté pacifique pendant des semaines. Cependant, les tensions ont récemment augmenté lorsque le gouvernement a accusé les manifestants d’être payés par des agences étrangères, préparant des actions violentes, voire une révolution et un coup d’État, notamment lors de la mobilisation de ce samedi. Des échauffourées ont déjà eu lieu lundi entre la police et les manifestants devant le siège de la télévision publique. Même le Parlement a pris feu, littéralement, lorsque plusieurs députés d’opposition ont allumé des fumigènes dans l’hémicycle début mars.
Cela a suscité des inquiétudes au sein de l’ONU, qui a appelé les autorités serbes à ne pas ‘interférer de manière indue’ dans la manifestation de ce samedi et à ‘respecter pleinement l’exercice des droits de réunion pacifique et de liberté d’expression’. La délégation de l’Union européenne en Serbie a également rappelé que ‘la liberté de réunion est un droit fondamental qui doit être protégé’.
‘Nous sommes un pays extrêmement démocratique’, a répondu vendredi le président serbe Aleksandar Vucic. Il a assuré que le gouvernement ferait tout ‘pour sécuriser le rassemblement’, mais qu’il ‘ne laisserait pas la rue dicter les règles’. Le régime a également appelé ses partisans à se manifester : des dizaines de tentes ont été installées devant la présidence. Ceux qui campent là se présentent comme des étudiants souhaitant reprendre les cours, mais des activistes ultranationalistes connus ont été aperçus.
‘Le début de la fin’ pour le régime ?
‘Nous avons déjà constaté depuis quelques jours que le régime tente d’intensifier les tensions’, analyse Srdjan Cvijic du Centre de politique de sécurité de Belgrade, qui se demande ‘si le gouvernement va essayer de créer des situations de violence pour ensuite avoir une excuse pour déclarer l’état d’urgence’. De son côté, la vague de protestation est jusqu’à présent restée non-violente, et les étudiants expriment leur volonté de maintenir cette ligne ce samedi, rejetant toute ‘intrusion dans les institutions’.
Pour Maja Kovacevic, présidente de la Faculté des sciences politiques à Belgrade, le 15 mars restera ‘une date importante’, mais pas nécessairement ‘un tournant dans le mouvement’. Selon elle, cela ne devrait pas conduire à la chute du régime, comme cela s’est produit le 6 octobre 2000, lorsque des manifestations ont précipité la chute de l’ancien président Slobodan Milosevic. Cependant, ‘on peut imaginer une situation où cela marquerait le début de la fin’ pour le pouvoir actuel, suggère-t-elle.
Cette analyse est partagée par certains manifestants. ‘Toute la Serbie s’est levée, ce n’est pas quelque chose que nous vivons tous les jours. Je crois que c’est la fin’, a déclaré Slobodan Horvat, un résident de Belgrade âgé de 60 ans, à l’AFP. ‘La Serbie s’est réveillée, et nous ne la laisserons pas s’endormir à nouveau’, a averti l’un des groupes organisateurs du mouvement dans un post sur Instagram.