Demain, un long métrage documentaire que Cyril Dion a coréalisé avec Mélanie Laurent en 2015, a conscientisé le monde à la crise des changements climatiques et aux solutions qui s’offrent à l’humanité. Animal expose maintenant la grande crise écologique découlant de l’extinction d’espèces animales pour non seulement comprendre le phénomène, mais aussi pour trouver des solutions. Le cinéaste nous a accordé un entretien en visioconférence.
Publié à 6h00
Au cœur de votre documentaire se trouvent deux jeunes militants âgés de 16 ans : Bella Lack, étudiante à Londres qui milite pour les droits des animaux, et Vipulan Puvaneswaran, qui s’est engagé dans des grèves pour le climat. Comment Animal est-il né ?
L’idée m’a d’abord été soumise par Walter Bouvais, qui cosigne le scénario avec moi. J’ai accepté de réaliser ce film à la condition qu’en tentant de comprendre le phénomène de la disparition des espèces, nous puissions aussi offrir des pistes de solution. Au même moment, j’ai participé à plusieurs manifestations pour le climat un peu partout sur la planète, et je me suis alors rendu compte à quel point les jeunes ont vraiment une vision apocalyptique de l’avenir, à travers laquelle ils n’entrevoient aucun futur pour eux. Voir la vie de façon aussi sombre à 16 ans, vous vous rendez compte ? J’ai donc eu envie de raconter une histoire où des adolescents d’aujourd’hui entreprennent eux-mêmes une réflexion en explorant le sujet d’un peu plus près. Mon pari était de leur faire vivre un voyage à la fois géographique et initiatique, et voir comment leur regard sur le monde a pu évoluer.
Cette génération ne semble pas encore avoir l’écoute réelle de la classe politique ni des générations qui l’ont précédée. Est-il possible que cette fracture générationnelle se résorbe ?
C’est comme ça depuis que le monde est monde. On n’a qu’à regarder ce qui s’est passé au cours des années 1960 et 1970. La vision des jeunes de l’époque était en rupture avec celle de leurs parents. C’est tout naturel. J’ai rencontré Vipulan pour la première fois lors d’une visite de Greta Thunberg à Paris, place de la République. Il y avait tellement de journalistes et de photographes qu’on se serait cru au Festival de Cannes ! La jeunesse a beaucoup pris la parole à ce moment-là, ce qui est une très bonne chose. Le problème est que leur parole n’est pas considérée ensuite pour mettre en œuvre des mesures sur le plan politique. Mais cet écueil n’est pas seulement vécu par la jeunesse ; il est commun aux militants de tous les âges.
Un projet de long métrage documentaire comme Animal n’est-il pas destiné seulement à ceux qui partagent déjà les convictions des mouvements écologistes ?
C’est un risque. Mais grâce à Demain, nous avons dépassé le cercle militant pour atteindre un très vaste auditoire. Le film a beaucoup été vu, a été présenté dans une trentaine de pays et a suscité une vraie discussion. À cause de la COVID-19, Animal n’a pas eu une carrière en salle similaire en France, mais la couverture médiatique a été si grande que même des gens n’ayant pas vu le film connaissent son existence et savent de quoi il s’agit. Il y a là une première victoire, car le message se rend d’une façon ou d’une autre.
En Amérique du Nord, tant aux États-Unis qu’au Canada, il existe un courant politique où l’on nie pratiquement l’existence des changements climatiques et des bouleversements écologiques. Ce courant climatosceptique est-il aussi important en France ?
Heureusement, pas vraiment. En tout cas, pas autant qu’en Amérique du Nord. Un politicien, même d’extrême droite, qui nierait la réalité des changements climatiques serait très mal vu. Nous devons plutôt mettre nos efforts à combattre le greenwashing, c’est-à-dire un phénomène à travers lequel de faux sympathisants écologistes font semblant de l’être par pur intérêt. Ils sont souvent incarnés par des politiciens dont les actions ne correspondent pas du tout à leur discours. On essaie de dénoncer ce double jeu, qui existe aussi chez vous. Un moment donné, il faut quand même choisir son camp !
Depuis quelques années, la forme du long métrage documentaire a connu un essor populaire considérable, particulièrement sur les plateformes numériques. Comment l’expliquez-vous ?
Je crois que les gens ont soif de réel. On observe aussi ce phénomène dans la fiction, grâce à des longs métrages basés sur des faits réels – par exemple Grâce à Dieu, de François Ozon –, reconstruits de façon très méticuleuse. Cet appétit bénéficie au documentaire. Les films qui traitent d’écologie obtiennent même un si beau succès qu’une section particulière leur a été consacrée l’an dernier au Festival de Cannes [où Animal a été lancé]. That said, I think the genre is going through a bit of a rundown right now because people feel like they’ve seen it all already. In this regard, the phenomenon Don’t Look Up completely fascinates me.
Why does this feature film by Adam McKay, with Leonardo DiCaprio and Jennifer Lawrence, offered on Netflix, fascinate you so much?
I think Adam McKay has found a form that reinvents the scary movie genre in a remarkable way using satire, humor, and a star cast. This is a furrow that I would like to dig. This caused me to think. The radiation of Don’t Look Up is so big that everyone is watching this new shape out of the corner of their eye. It proves that, even with a very committed speech, it is possible to reach a very large audience. This is a very effective strategy.
Animal hits theaters April 15.