David Chartrand : Taxe de luxe ou tueur d’emplois ?

Ne vous laissez pas berner par son nom, la taxe de luxe ne fait que servir du bout des lèvres une fiscalité équitable

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Tenant une promesse de campagne libérale de s’attaquer aux inégalités de richesse au Canada, le récent budget fédéral affine les propositions de 2021 visant à imposer une «taxe de luxe» sur les voitures et les avions coûtant plus de 100 000 $. La taxe doit être de 20 % de la valeur supérieure à 100 000 $ ou de 10 % de la valeur totale, selon la valeur la moins élevée. À première vue, il est logique de taxer ceux qui peuvent s’offrir des articles de luxe pour les loisirs et il est difficile de s’opposer aux initiatives qui visent une fiscalité équitable. Mais ne vous laissez pas berner par son nom, la taxe de luxe ne fait que servir du bout des lèvres une fiscalité équitable. Cela a encore moins à voir avec la redistribution des revenus, qui est un moyen plus sûr de lutter contre les inégalités de revenus.

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Les petits caractères révèlent que la taxe cible en réalité les fabricants qui produisent les voitures et les avions, et non ceux qui les achètent. Il a été conçu sans la participation ou la consultation de nombreux intervenants pertinents, et aucune analyse n’a été produite pour déterminer s’il atteindrait les objectifs visés. En août dernier, Finances Canada a lancé des consultations sur la proposition. Mais les révisions mineures qu’il a proposées depuis ne reflètent pas bon nombre des préoccupations exprimées par les participants, y compris la possibilité d’une large exemption lorsque les petits avions sont utilisés à des fins commerciales.

Au cours de la pandémie, il y a eu une forte augmentation des ventes d’avions d’occasion et loués – elles ont augmenté de 5,2% depuis 2019-2020, ce qui représente environ 136 avions – tandis que les ventes de jets privés neufs ont diminué de 20 % sur la même période. Pourtant, la taxe ne s’applique qu’aux véhicules neufs et aux aéronefs.

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Cela aurait son plus grand effet sur un nombre limité de constructeurs dont les activités dépendent fortement de la production d’avions. Parmi les entreprises touchées et le lieu de leurs opérations figurent Bell Textron Canada (Mirabel), Airbus Helicopters Canada (Fort Erie), Viking Air/De Havilland (Victoria et Calgary), Diamond Aircraft (Londres) et Pratt & Whitney (Longeuil, Québec ).

Non seulement ces entreprises seraient tenues de payer la taxe, mais si la taxe les rendait moins compétitives, les consommateurs de ce type de biens se tourneraient vers leurs concurrents, dont la plupart des gouvernements nationaux n’imposent pas de taxe de luxe de ce type. En conséquence, ils perdraient des affaires. La production d’aéronefs est une force pour le Canada, fournissant une base solide pour l’emploi et la croissance. Il ne devrait pas être puni dans un effort mal orienté qui ciblera principalement les fabricants et les travailleurs.

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Plutôt que de se précipiter pour mettre en place cette taxe, le gouvernement devrait mener une étude approfondie, ainsi que des études de cas de taxes similaires dans d’autres pays. Un cas célèbre concerne une taxe introduite aux États-Unis sur les yachts de luxe dans les années 1990. Il a décimé l’industrie de la construction de bateaux, entraînant la perte d’emplois bien rémunérés dans les communautés de plusieurs États qui comptaient sur ce travail. Au cours de sa première année, la taxe de luxe a en fait coûté plus cher à administrer au gouvernement que ce qui a été récupéré par les impôts. Parmi ceux qui en ont subi injustement les conséquences imprévues figurent les travailleurs, leurs familles et leurs communautés. Les inégalités de richesse n’ont pas été affectées, et les comptes bancaires des Américains les plus riches n’ont pas été réduits.

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Le secteur aérospatial canadien a été durement touché par la pandémie en raison de l’effondrement du transport aérien. Sa reprise sera lente et le gouvernement a fourni un certain soutien pour stimuler l’industrie. Mais ce qu’il donne d’une main, il le reprend de l’autre. La taxe de luxe telle qu’elle existe actuellement découragerait les entreprises d’exercer leurs activités au Canada. Environ 30 000 emplois ont déjà été perdus dans l’aérospatiale ; la taxe de luxe détruirait des emplois plus stables et bien rémunérés.

Mon syndicat, l’Association internationale des machinistes et des travailleurs de l’aérospatiale, représente un grand nombre de travailleurs de l’aérospatiale à travers le Canada. Il est important pour ces travailleurs et pour le pays que l’aérospatiale demeure une industrie viable au Canada. Nos membres et leurs communautés dépendent de ces emplois.

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L’un des piliers du syndicalisme est la justice économique par la réduction des inégalités de revenus et, à cette fin, l’AIMTA soutient pleinement les politiques fiscales équitables qui visent à redistribuer les revenus. Mais cette politique est erronée, sous-développée et ne semble viser qu’une fiscalité équitable. Au pire, cela ne fera qu’alourdir une industrie déjà en difficulté, une industrie qui revêt une importance nationale pour le Canada.

L’AIMTA demande donc au gouvernement de mener une étude appropriée des impacts probables de sa proposition de taxe. Nous l’exhortons également à consulter les parties prenantes concernées pour élaborer des politiques mesurées et réfléchies d’imposition de la richesse. Cette taxe de luxe ne fait pas cela.

David Chartrand est vice-président général canadien de l’Association internationale des machinistes et des travailleurs de l’aérospatiale (AIMTA).

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