LA MAISON DE LA MILICEde John Milas
Le premier roman honnête, triste et dérangeant de John Milas, « The Militia House », pourrait être qualifié de fiction gothique ou d’horreur, mais au fond, c’est l’histoire de la lutte d’un homme pour maintenir son emprise sur la réalité au milieu d’un conflit incessant. Notre narrateur, le caporal Loyette, a rejoint les Marines principalement parce que son frère a été tué par un engin piégé alors qu’il servait en Irak. Il ne parle pas de vengeance, mais a le sentiment qu’il est de son devoir d’aller voir l’éléphant, de se montrer sur un champ de bataille de son temps.
Il est dans la province de Helmand, en Afghanistan, en 2010, et il nous dit très tôt : « Cet endroit ressemble à des temps préhistoriques. … Toute la place est après vous ici, pas seulement les talibans. Si ce n’est pas une sorte de morsure venimeuse qui vous attrape… alors c’est la désolation de la terre elle-même. … Nous n’avons jamais eu à nous soucier de quoi que ce soit de ce genre chez nous.
Il n’y a pas de combat actuellement dans le quartier de Loyette, juste un ennui banal qui incite à la lassitude et à la rêverie. Il y a aussi un profond sentiment de déconnexion morale et émotionnelle. Dans la première scène du roman, les Marines voient un chien – récurrent, il s’avère – avec des piquants de porc-épic noir et blanc coincés dans son visage. « Et nous restons là à le regarder souffrir », écrit Milas, « agissant comme si nous n’étions responsables de rien parce que nous sommes plus loin de chez nous que nous ne l’avons jamais été. »
Pour Loyette et son peloton, les plus grandes batailles se livrent entre les oreilles : Est-ce que je vois ça ? Entendez-vous la voix ? Est-ce que mon esprit fonctionne ? Sur une colline rocheuse à l’extérieur de la base militaire se trouve un bâtiment abandonné qui servait autrefois de caserne soviétique dans les années 1980 ; les Afghans l’appellent la maison de la milice. C’est interdit, mais bien sûr, les Marines doivent l’explorer. Ils ne peuvent pas le voir de si près et n’entrent même jamais dans l’endroit. Le bâtiment attire, assaisonné par divers conflits, et son histoire et son intrigue font partie de l’attraction.
Des soldats russes ont été massacrés au deuxième étage, apprend-on bientôt. L’histoire prend des proportions mythiques dans les jeunes esprits qui regardent un paysage aride, ininterrompu par bien des choses sauf cette ruine. « À première vue, ce n’est qu’une vieille caserne tranquille, une simple boîte en béton avec des divots ébréchés dans les murs », se souvient Loyette. « Mais il y a autre chose. … Les fenêtres sont comme des globes oculaires démoniaques, complètement noires, vous ne pouvez donc pas dire exactement où vous regardez.
A l’intérieur, tout est détraqué : les murs ondulent « comme s’ils étaient faits de liquide », il y a des tas de piquants de porc-épic dans un coin, des portes disparaissent. Il peut y avoir un sous-sol ou non. Le sens de l’orientation disparaît. Des bruits du passé se font à nouveau entendre. Visiter la maison aura de graves conséquences pour les Marines, y compris des camarades disparus, mais d’autres recherches viendront ; plus de détails apparaîtront. Quelque chose comme une réponse pourrait prendre toute une vie à découvrir.
La prose de Milas est laconique et sage, une écriture qui vous la rend droite. Parfois, la voix de Loyette est si franche et révélatrice qu’elle semble presque confessionnelle. À travers elle, nous obtenons les aveux crus d’un esprit meurtri par la guerre et ses secrets terrifiants, encapsulés ici par un dispositif d’horreur classique : la maison hantée. « Je me demande si la raison pour laquelle je me suis retrouvé ici est parce que j’ai tout abandonné, ma vie dans le monde réel, quel que soit mon potentiel », dit Loyette. « Alors que je tombe, je pense à tout le monde à la maison. Je veux qu’ils aient la fermeture, mais j’espère qu’ils n’apprendront jamais ce qui nous est vraiment arrivé. Je ne souhaiterais la vérité à personne.
Daniel Woodrell est l’auteur de 10 romans, dont « Winter’s Bone ».
LA MAISON DE LA MILICE | Par John Milas | 258 pages | Henry Holt & Compagnie | 26,99 $