Un groupe qui promeut la vie nocturne est contrarié par la suppression de sa subvention de 3 millions de dollars. Les Montréalais ne devraient pas en perdre le sommeil
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« Toronto avec le français » — voilà ce que Montréal deviendra sans sa vie nocturne, dit le chef de Montréal 24/24, une organisation à but non lucratif dédiée à l’étude et à la promotion de la vie nocturne. Et sans la subvention annuelle de 3 millions de dollars de la Ville à Montréal 24 heures sur 24, il n’y aurait plus de vie nocturne montréalaise. C’est du moins l’implication des manifestations que Mathieu Grondin organise pour tenter de récupérer sa subvention après que la Ville a refusé de la renouveler. Mardi soir, devant l’hôtel de ville, 20 personnes se sont présentées pour une soirée dansante – plus que suffisant pour attirer couverture des médias locaux.
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Surtout depuis les années 1960, lorsque Toronto nous surpassait en population et en PIB, Montréal s’est fortement appuyée sur son image louche de lieu d’heures tardives et de joie de vivre par rapport à son ennuyeux rival anglo-saxon, peuplé de drones et de corvées, qui on ferme tôt et on ne peut pas prendre un verre sans commander un repas, ni le dimanche.
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Ces dernières années, remarquez, nous nous sommes également présentés comme un paradis de haute technologie, peuplé de jeunes génies du numérique qui sont le moteur de la nouvelle économie du 21e siècle, en particulier dans les domaines qui reposent sur l’animation. Elon Musk habitué nous nous débrouillons avec trois heures de sommeil par nuit – et cela se voit parfois – mais nous, les humains ordinaires, avons besoin de notre sommeil. Toutes les agitations des noctambules empêcheront les moteurs économiques de dormir leur productivité, n’est-ce pas ?
Mais il vaut mieux ne pas critiquer, sinon la police d’identité viendra vous chercher. Les discussions sur Montréal 24/24 ont impliqué des références aux « gens de la nuit » et à leurs droits. Les gens ont toujours discuté pour savoir s’ils étaient « une personne de la nuit » ou une « personne du matin », une identification qui change souvent une fois que les enfants entrent en scène. Mais il semble désormais que les gens de la nuit soient devenus une nouvelle colonne dans la matrice de l’intersectionnalité. Et comme toutes les autres colonnes, ils revendiquent leur droit humain à la dignité, à la reconnaissance et aux subventions.
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En fait, la vie nocturne de Montréal est antérieure à Montréal 24/24, qui existe depuis seulement trois ans, un secteur de subventions. Il ne fait aucun doute que la vie nocturne montréalaise pourrait toujours être améliorée. Mais les nombreuses entreprises qui gagneraient si davantage de gens passaient plus de temps au centre-ville la nuit ont tout intérêt à continuer à améliorer leur situation. Et la ville dispose d’un budget annuel de 7 milliards de dollars et admet employer plus de 28 000 personnes. Si le maintien de la vie nocturne nécessite des ressources publiques – pour entretenir les lampadaires, par exemple – la ville n’est pas vraiment à court de ressources.
Terence Corcoran a écrit mercredi dans FP Comment à propos de la « tyrannie du statu quo » et de la raison pour laquelle il est si difficile de changer les choses, surtout si le changement implique une réduction des effectifs du gouvernement. La bataille pour une bureaucratie de la vie nocturne illustre pourquoi.
Un premier problème réside dans la mentalité moderne selon laquelle tout ce qui est bon mérite d’être subventionné. Oui, c’est génial qu’il y ait une vie nocturne à Montréal. Mais nous pouvons exprimer notre solidarité avec les divertissements nocturnes, non pas en créant un bureau municipal de la vie nocturne ou en attribuant une ligne budgétaire à la vie nocturne, mais en veillant nous-mêmes tard et en y participant. Et si pas assez de gens veulent le faire, qu’il en soit ainsi : le monde ne sera vraiment pas si bouleversé – Toronto pourrait même être content – si Montréal ferme ses portes plus tôt. Nous, les Montréalais, n’avons aucune obligation civique de veiller tard si nous ne le souhaitons pas.
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Un problème plus grave est que les subventions génèrent un lobby en faveur des subventions. Le patron de Montréal 24/24 se plaint qu’il y a trois ans, lui et ses collègues ont quitté de bons emplois pour se joindre à nous et travailler à une meilleure vie nocturne pour les Montréalais et que maintenant leur budget leur est retiré. Oh, quelle injustice ! L’équipe de direction de l’organisme, composée de quatre personnes, comprend à la fois un directeur des communications et un consultant en communications. Il y a une vieille vantardise dans le secteur de la presse selon laquelle il vaut mieux ne pas se battre avec les gens qui achètent de l’encre au baril. L’analogie de ce siècle serait peut-être qu’il est préférable de ne pas réduire le budget d’une organisation dont la moitié est consacrée aux communications.
Le budget 2024 de la Ville de Montréal a été dévoilé cette semaine. Le plan consiste à augmenter les impôts fonciers de 4,9 pour cent en moyenne, ce dont les contribuables ne sont manifestement pas satisfaits. Au lieu de simplement augmenter les impôts, il serait bon que les gouvernements examinent occasionnellement leurs programmes et décident si les activités qu’ils financent créent réellement de la valeur. La principale valeur créée par Montréal 24/24 a été un « sommet » annuel réunissant des défenseurs et des analystes de la vie nocturne du monde entier pour déterminer de nouvelles choses que Montréal pourrait faire pour améliorer sa vie nocturne. Une bonne cause, peut-être, mais nous avons désormais ce qu’on appelle Internet. Embauchez un stagiaire et demandez-lui de passer une semaine à chercher et deux semaines à rédiger ses résultats et vous saurez ce qui se passe ailleurs.
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Le problème est que, comme l’a enseigné l’économiste et politologue Mancur Olson (1932-98), les contribuables sont dispersés et difficiles à organiser tandis que les victimes des coupes budgétaires sont concentrées, ce qui ne constitue donc pas un combat politique équitable. Olson a conclu que la seule façon pour les sociétés de se débarrasser des intérêts concentrés et rigidifiants était de subir une crise sociale grave – par exemple perdre une guerre, de préférence face aux États-Unis, comme l’Allemagne et le Japon l’ont fait au siècle dernier.
C’est la seule solution à la tyrannie du statu quo et cela devrait nous empêcher tous de dormir la nuit.
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