mardi, novembre 5, 2024

William McNally : Les inconvénients et les dangers du désinvestissement pétrolier et gazier

Le désinvestissement n’arrêtera pas la production de combustibles fossiles car il ne fait rien pour réduire la demande énergétique réelle

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Les appels des militants écologistes pour que les gestionnaires de fonds d’investissement vendent des actifs dans le secteur pétrolier et gazier – ce qu’on appelle le désinvestissement – ​​se font de plus en plus entendre. À la fin de l’année dernière, par exemple, certains membres du University Pension Plan, un important fonds de pension multi-universitaire canadien, ont exigé que les gestionnaires du régime « excluent les combustibles fossiles » de leur portefeuille. L’objectif est d’affamer les sociétés pétrolières et gazières de capitaux et ainsi mettre fin à la production mondiale de ces ressources. Est-ce que ça marchera? Et est-ce une bonne idée ?

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De nombreuses grandes entreprises, dont Exxon et Shell, se sont consciencieusement engagées à réduire leur extraction de combustibles fossiles alors que ce type de pression militante s’intensifie. Cependant, alors que l’Occident se désinvestit, Vladimir Poutine et d’autres ont été plus qu’heureux de prendre le relais. La production mondiale n’a pas baissé. Au lieu de cela, le désinvestissement occidental a contribué à enrichir et à enhardir les acteurs non occidentaux. Et rappelez-vous, les bénéfices pétroliers et gaziers russes sont ce qui finance l’aventure coloniale de Poutine en Ukraine.

Outre le fait que le désinvestissement apporte du secours à un fou, voici cinq autres problèmes majeurs avec l’argument en sa faveur.

Premièrement, cela nuit aux travailleurs. Un fonds de pension bien géré créera un portefeuille qui cherche à maximiser les rendements en fonction d’un niveau de risque présélectionné. Tout changement significatif dans les avoirs du portefeuille – élimination de sociétés politiquement impopulaires, par exemple – n’entraînera pas une meilleure performance du portefeuille. Cela ne peut que diminuer les rendements et/ou augmenter le risque. Et cela mine les finances de retraite de tous les membres. Les militants sont invités à réduire les rendements de leurs propres économies s’ils le souhaitent, mais ils doivent laisser les économies des autres tranquilles.

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Deuxièmement, si l’objectif est de priver les entreprises de capitaux, les militants doivent cibler l’accès des entreprises aux marchés primaires, où les fonds sont levés par l’émission initiale d’actions et d’obligations. Mais le désinvestissement se produit sur le marché secondaire. Un gestionnaire de fonds qui vend Shell en bourse pour acheter Tesla n’affecte pas directement l’accès de Shell au capital.

En fait, de nombreuses entreprises pétrolières et gazières ont moins besoin du marché primaire ces jours-ci, car leur capacité à s’autofinancer s’est améliorée. Et si les raffineries et les pipelines sont encore très capitalistiques, ces besoins sont ponctuels et ne représentent qu’une faible part du marché primaire. De plus, nous ne devons pas oublier que les grandes sociétés de ressources naturelles occidentales ne représentent qu’environ un tiers du top 20 international. Le reste comprend de nombreux mastodontes soutenus par l’État tels que Saudi Aramco, PetroChina et Gazprom qui sont généralement moins vulnérables à la pression des militants. En fait, si le prix est correct, on s’attendrait à ce que ces sociétés soient des acheteurs volontaires des actifs cédés.

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Troisièmement, affamer le secteur des combustibles fossiles du capital n’a de sens que si d’autres formes d’énergie sont prêtes à prendre le relais. Mais si une « transition énergétique » est déjà en cours, elle est très lente : la demande de pétrole et de gaz restera élevée pendant des décennies. Les combustibles fossiles constituent actuellement 74 % du bouquet énergétique canadien et 79 % du bouquet énergétique américain, et la proportion est encore plus élevée en Chine, à 86 %. Pas étonnant que l’Agence internationale de l’énergie affirme que les combustibles fossiles « continueront à apporter une contribution majeure au mix énergétique mondial jusqu’en 2050 ». Pas seulement une contribution mais une contribution « majeure ».

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Une accélération de la transition loin des combustibles fossiles nécessitera des alternatives énergétiques économiquement, techniquement et écologiquement viables. Pour mon argent, les réacteurs nucléaires de prochaine génération semblent être les plus option énergétique sans carbone prometteuse. Mais, en général, toute personne préoccupée par le changement climatique devrait cesser d’essayer d’imposer la fin des combustibles fossiles et se concentrer plutôt sur la manière de les rendre inutiles.

Quatrièmement, personne ne s’engage à être plus pauvre. Le désinvestissement est une stratégie fondée sur le sacrifice, car elle suggère que les retraités et les autres investisseurs sont prêts à accepter des rendements inférieurs et un risque accru pour produire un avenir plus vert. Mais les preuves suggèrent que ce n’est pas le cas. Un sondage de CBC News en 2019 a révélé que même si près des deux tiers des Canadiens ont déclaré que la lutte contre les changements climatiques était l’une de leurs principales priorités, la moitié ne voulaient pas payer plus de 100 $ par année pour le faire.

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Enfin, les militants doivent améliorer leur connaissance de l’économie de base. L’objectif du désinvestissement est de limiter la production et l’exploration en réduisant l’accès des entreprises au capital. Mais si la demande de combustibles fossiles reste inchangée, toute réduction temporaire de l’offre se traduira simplement par une hausse des prix. Et cela motive à son tour les investisseurs à remplacer tout ce qui a été perdu par la pression militante initiale.

Considérez les récentes statistiques de forage dans l’Ouest canadien. Lorsque les prix ont atteint un creux au printemps 2020, l’activité de forage a chuté avec eux. Depuis lors, cependant, les prix ont rebondi. Et le forage aussi. Le nombre de nouveaux puits a augmenté de 40% l’an dernier et les analystes s’attendent à une autre forte augmentation en 2022. L’expérience suggère donc que le désinvestissement peut être en partie contre-productif.

Le désinvestissement n’arrêtera pas la production de combustibles fossiles car il ne fait rien pour réduire la demande énergétique réelle. Pour les investisseurs individuels, la seule chose que le désinvestissement fera est de réduire le rendement de leurs investissements et de mettre en péril leur retraite.

William McNally est professeur de finance à la Lazaridis School of Business and Economics de l’Université Wilfrid Laurier. Une version plus longue de cette histoire a été publiée sur C2CJournal.ca.

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