Oliver Heer, le premier représentant suisse alémanique à participer à la Vendée Globe, navigue vers le Cap de Bonne Espérance après avoir terminé 35e lors de sa première course. Son rêve était incertain jusqu’à ce qu’il trouve un sponsor familial suisse. La compétition est dominée par des équipes bien financées, tandis que de nombreux marins, comme Bernard Stamm et Alan Roura, doivent faire face à des défis financiers importants. Les récompenses restent modestes, le vainqueur recevant 200 000 euros.
Oliver Heer est tout sourire. Il a franchi l’équateur et met le cap sur le Cap de Bonne Espérance. Lors de sa précédente participation à la Vendée Globe, il avait terminé en 35e position sur 40 skippers. Ce classement est typique pour un néophyte, surtout pour le premier représentant suisse alémanique à prendre le départ de cette course autour du monde en solitaire.
La participation de Heer à cette régate a longtemps été incertaine. Pendant plusieurs mois, il a cherché un sponsor principal qui pourrait rendre son rêve réalisable. Ce n’est qu’à l’été dernier qu’il a trouvé une entreprise familiale suisse dans le secteur de la santé, originaire de sa ville natale, prête à investir un montant à six chiffres pour soutenir sa campagne.
Heer a longtemps renoncé à son salaire et a investi ses propres économies pour réaliser son rêve de faire le tour du monde en compétition. De nombreux concurrents se retrouvent dans une situation similaire. Le financement d’un tel projet peut souvent prendre des années.
Des équipes de course bien financées dominent la compétition
Au cours des dernières décennies, la compétition internationale de course au large a gagné en professionnalisme, avec la Vendée Globe, qui se déroule tous les quatre ans, comme événement phare. Des équipes de course bien financées, soutenues par des sponsors solides, s’imposent sur la scène. Actuellement, treize nouveaux yachts de classe Open-60, chacun coûtant environ sept millions d’euros, prennent le départ.
Ce sont généralement les navigateurs financièrement stables qui se retrouvent en tête et qui luttent pour la victoire. Même les bateaux de deuxième génération représentent un investissement considérable : l’Open 60 de la Genevoise Justine Mettraux a coûté plus de quatre millions d’euros. De plus, des nouveaux foils, soutenus par un mécène, peuvent coûter jusqu’à un million d’euros.
Pour ceux qui naviguent avec un budget limité, la réalité est souvent difficile. Tout comme de nombreux artistes, ces marins doivent constamment trouver des financements pour réaliser leurs ambitions. Les dettes s’accumulent, les salaires sont rares, et beaucoup dépendent de l’aide d’amis pour effectuer des travaux à bord – chaque centime compte. Un exemple marquant est celui de Bernard Stamm, un Vaudois encore en proie à des dettes dues à ses aventures maritimes, qui avait construit son premier Open 60 avec le soutien des habitants de Lesconil à la fin des années 1990.
Ce même bateau a été acquis par Alan Roura il y a neuf ans pour sa première Vendée Globe. Roura incarne parfaitement la détermination des navigateurs en mer. Avec sa compagne de l’époque, Aurélia, il a vécu pendant des mois dans un van. Plus tard, à Lorient, il a dû vendre sa moto pour payer son premier mois de frais de port pour son Open 60. Il a même vécu dans un conteneur de vingt mètres carrés, se contentant d’un simple matelas gonflable.
Malgré ces défis, Roura a réussi à obtenir un sponsor local et un budget de 300 000 euros, ce qui lui a permis de se présenter comme le plus jeune navigateur de la Vendée Globe à l’époque.
De nombreux navigateurs prennent des risques financiers importants pour réaliser leur rêve de tour du monde. Par exemple, Tanguy Le Turquais a investi 10 000 euros de ses économies et a contracté un prêt de 400 000 euros pour acquérir un Imoca d’occasion performant d’une valeur d’un million d’euros. Un groupe d’investisseurs a couvert le reste des coûts.
Cependant, acheter un bateau n’est que le début des dépenses : les coûts d’exploitation sur plusieurs années peuvent atteindre jusqu’à dix millions d’euros pour les équipes les plus riches. À cela s’ajoutent les frais d’inscription à la Vendée Globe, qui dépassent 60 000 euros, et l’assurance du bateau, représentant généralement huit à dix pour cent de sa valeur. Les régates de qualification ajoutent également à ces coûts.
Les salaires des navigateurs varient considérablement. Environ deux douzaines des meilleurs marins perçoivent des salaires annuels à six chiffres, tandis que d’autres, comme Justine Mettraux, ne gagnent que 5 000 euros nets par mois, selon un magazine spécialisé français.
Le prix du vainqueur de la Vendée Globe : 200 000 euros
Antoine Mermod, le responsable de la classe Imoca, souligne que « le métier de skipper est précaire et complexe. » Certains prennent des « risques financiers considérables ». Une enquête menée par le quotidien français « Ouest-France » auprès des participants à la Vendée Globe a révélé que parmi les 40 skippers, 24 ont répondu. Selon cette enquête, près de 46 % d’entre eux gagnent plus de 45 000 euros par an, mais la majorité touche moins. Certains gagnent moins de 15 000 euros par an.
Ces chiffres montrent clairement que les marins ne s’engagent pas dans la voile pour amasser des richesses. Les récompenses financières sont relativement modestes par rapport à d’autres sports comme le football ou le tennis : le vainqueur de la Vendée Globe remporte 200 000 euros, tandis que le deuxième reçoit 140 000 euros. En tout, 800 000 euros sont en jeu.
De même, même les navigateurs ayant connu de bons résultats au cours de leur carrière doivent souvent attendre longtemps avant de réaliser leur rêve de participer à la Vendée Globe. Le Français Nicolas Lunven, soutenu par le groupe suisse Holcim et qui a récemment terminé cinquième, a échoué à deux reprises auparavant. Il a déclaré : « La chose la plus difficile a été de réaliser ce projet. »