Le nouveau mandat pourrait bien éroder l’indépendance de la banque et saper sa crédibilité en tant que combattant de l’inflation
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Cette semaine, Carolyn Rogers, première sous-gouverneure de la Banque du Canada, a donné un discours sur la façon dont « l’indépendance et la responsabilité de la banque contribuent à renforcer la confiance du public ». Le taux d’inflation au Canada ayant atteint 6,7 %, la confiance du public dans la banque est sur le point d’être mise à l’épreuve. La pression monte pour qu’elle réduise le taux d’inflation sans déclencher de récession, ce qui ne serait pas une mince affaire.
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En avril, la banque a fait un premier pas important dans cette voie en augmentant son taux d’intérêt directeur d’un demi-point de pourcentage. Elle a également cessé d’acheter des obligations d’État nouvellement émises. Plus son engagement à lutter contre l’inflation semble crédible aux participants de l’économie nationale et du marché du dollar canadien, plus grande est la probabilité que les attentes inflationnistes chutent, ce qui permet à la banque de réaliser plus facilement un « atterrissage en douceur » avec une inflation fortement réduite. .
D’autre part, parce que l’inflation n’avait pas été un problème depuis trois décennies, la Banque du Canada n’a plus de réservoir de crédibilité en tant que combattant de l’inflation. Et les gouvernements canadiens lourdement endettés sont de grands bénéficiaires potentiels de l’inflation, qui érode la valeur réelle de l’encours de la dette. Les taux d’intérêt réels plus élevés, qui sont la principale arme de la banque contre l’inflation, constitueront un lourd fardeau fiscal pour les gouvernements endettés et une contrainte potentielle sur les programmes de dépenses publiques – en supposant que la banque ne cille pas. Au fond, l’engagement de la Banque du Canada à rétablir la stabilité des prix est incompatible avec la volonté du gouvernement Trudeau d’augmenter les dépenses en programmes sociaux.
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Malgré sa importancela dynamique de cette relation entre Ottawa et la Banque du Canada demeure obscure pour la plupart des Canadiens.
La relation de jure a été établie par la Loi sur la Banque du Canada de 1967, qui permet au gouvernement d’ordonner au gouverneur de la banque de suivre des directives précises concernant la politique monétaire. Les directives doivent être rendues publiques et transmises au Parlement. Si le gouverneur ne veut pas les suivre, le gouverneur est obligé de démissionner. À ce jour, cette disposition n’a pas été mise en œuvre, bien que le gouvernement ait tenté de forcer la démission du gouverneur de la Banque du Canada, James Coyne, en 1960, mais pour des raisons qui ne sont pas directement liées à la politique monétaire. Bien que l’attaque du gouvernement Diefenbaker contre Coyne n’ait pas été directement couronnée de succès, Coyne a finalement démissionné.
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Bref, le statut juridique entourant l’indépendance de la Banque du Canada en matière d’établissement de la politique monétaire demeure au mieux ambigu. L’indépendance de facto de la banque vis-à-vis des directives gouvernementales dépend sans doute du fait que la banque est perçue par le Parlement comme faisant du «bon travail» – ce qui soulève la question évidente de savoir s’il existe une mesure claire et réalisable pour évaluer la performance de la banque.
De 1990 jusqu’à récemment, le seul objectif de performance de la Banque du Canada était de maintenir un taux d’inflation annuel de 2 % dans une fourchette de 1 à 3 %. Cependant, un 2021 accord entre le ministère des Finances et la banque a introduit un nouvel élément dans le mandat, à savoir que la politique monétaire devrait soutenir « un emploi durable maximal » tout en reconnaissant la responsabilité conjointe du gouvernement et de la banque pour atteindre les deux objectifs.
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« L’emploi durable maximal » est à la fois mal défini et, sans doute, largement déterminé par des forces qui échappent au contrôle de la banque centrale. L’ajouter au mandat de la Banque du Canada complique davantage toute tentative de déterminer la responsabilité de la banque et d’évaluer sa performance. Le nouveau mandat est particulièrement inopportun au vu de l’inflation actuelle : il pourrait bien éroder l’indépendance de la banque et saper sa crédibilité en tant que combattant de l’inflation. Et, étant donné l’importance cruciale de la crédibilité dans tout cela, un combattant de l’inflation moins crédible sera un combattant de l’inflation moins efficace.
Steven Globerman est professeur émérite à la Western Washington University et chercheur principal au Fraser Institute.