La FIFA semble sur le point d’attribuer la Coupe du Monde 2034 à l’Arabie Saoudite, soulevant des préoccupations majeures concernant les droits de l’homme. Lisa Salza d’Amnesty International critique la décision de la DFB, qui, selon elle, valide les violations des droits fondamentaux. Le coût humain pourrait être immense, avec des atteintes aux droits des travailleurs migrants et des discriminations envers les femmes et les supporters. Salza appelle la DFB à exiger des garanties en matière de droits humains avant l’événement.
La Coupe du Monde 2034 et les Droits de l’Homme en Arabie Saoudite
Il est presque certain que la FIFA va attribuer la Coupe du Monde 2034 à l’Arabie Saoudite. Lisa Salza, experte en sport et droits de l’homme chez Amnesty International en Suisse, soulève des inquiétudes quant à cette décision. Dans une interview, elle évoque les dangers liés à cette attribution, la situation alarmante dans le royaume, ainsi que le rôle que devrait jouer la DFB et Joshua Kimmich.
Les Répercussions de la Décision de la DFB
ntv : Madame Salza, la DFB a récemment annoncé qu’elle voterait en faveur de l’attribution de la Coupe du Monde 2034 à l’Arabie Saoudite lors du congrès extraordinaire de la FIFA. Quelle est la réaction d’Amnesty International face à cette décision ?
Lisa Salza : La décision de la DFB est incompréhensible. En soutenant l’Arabie Saoudite sans émettre de réserves ni exiger des garanties crédibles concernant les droits de l’homme, l’association valide des violations graves des droits fondamentaux liées à cet événement. En fait, la DFB participe au sportswashing saoudien, envoyant un message à la FIFA que tout est acceptable, rendant ainsi l’attribution de la Coupe du Monde totalement douteuse. L’initiative a été entachée de manipulations dès le début.
ntv : La DFB affirme que protester n’aurait eu aucun impact.
Je ne partage pas cet avis. Au contraire, une contestation sérieuse de la part des grandes associations pourrait encore freiner le pouvoir de Gianni Infantino, le président de la FIFA. La DFB et d’autres fédérations qui critiquent la situation des droits de l’homme en Arabie Saoudite ont raté l’occasion de s’unir et de s’opposer à une Coupe du Monde qui ne fera qu’aggraver les violations des droits humains.
Quel sera le coût humain de la Coupe du Monde 2034 en Arabie Saoudite ?
Le coût humain sera colossal. La DFB et les autres fédérations acceptent les représailles contre ceux qui critiquent la Coupe du Monde et les journalistes qui la couvrent. Elles cautionnent également l’exploitation systématique des travailleurs migrants, qui représentent 80 % de la main-d’œuvre dans les constructions et services en Arabie Saoudite, souvent sans protection adéquate, sans salaire minimum et sans possibilité de se syndiquer.
En outre, elles acceptent une discrimination envers les supporters à tous les niveaux, allant de la criminalisation de l’amour entre personnes de même sexe à la discrimination à l’égard des femmes. Par exemple, une femme victime d’agression sexuelle en Arabie Saoudite pourrait se retrouver accusée d’adultère au lieu de recevoir protection.
Les fans féminines seront-elles en sécurité durant la Coupe du Monde ?
Absolument. Si une femme subit une agression dans le pays, elle pourrait devenir une victime de lois discriminatoires qui interdisent toute relation sexuelle en dehors du mariage.
La FIFA a-t-elle une part de responsabilité dans les violations des droits de l’homme en Arabie Saoudite ?
Il est indéniable que la FIFA, en attribuant cette Coupe du Monde, accepte sciemment des violations graves des droits de l’homme, y compris des décès évitables. L’analyse du dossier de candidature saoudien révèle des lacunes majeures en matière de droits humains, démontrant que la politique de la FIFA sur les droits de l’homme n’est qu’une façade et que les critères en la matière sont complètement négligés lors de l’attribution de la Coupe du Monde.
La DFB croit-elle vraiment à une amélioration des droits de l’homme en Arabie Saoudite ?
Les intentions du président de la DFB, Bernd Neuendorf, de pousser la FIFA à ‘améliorer la situation des droits de l’homme et de durabilité’ en Arabie Saoudite sont extrêmement naïves. Cette association n’a visiblement rien appris de l’expérience au Qatar. Deux ans après la Coupe du Monde 2022, les travailleurs migrants continuent d’être exploités, le système de Kafala n’est pas complètement réformé et de nombreuses victimes n’ont toujours pas été indemnisées pour les violations subies lors de cet événement. Une Coupe du Monde sans garanties en matière de droits de l’homme ne peut pas servir de levier pour une amélioration de la situation.
Que demandez-vous à la DFB ?
Nous demandons à la DFB, en tant que membre influent du conseil de la FIFA, de s’assurer que la FIFA respecte ses obligations en matière de droits de l’homme et d’exiger des mesures strictes avant l’attribution des tournois de 2030 et 2034. De plus, après l’attribution, la DFB doit plaider pour l’instauration d’un contrôle annuel des normes en matière de droits de l’homme dans la préparation de chaque tournoi. Les fédérations de football doivent reconnaître qu’elles ont également une responsabilité en matière de droits de l’homme, conformément aux directives de l’ONU.
Le plan de Mohammed bin Salman réussit-il à masquer les violations des droits de l’homme par le sport ?
Absolument. Les alertes des organisations de défense des droits de l’homme, des syndicats et des supporters risquent de se perdre dans l’indifférence, comme cela a été le cas lors de la Coupe du Monde au Qatar. Il est certain qu’avec l’accueil de cette Coupe du Monde, les violations des droits de l’homme en Arabie Saoudite continueront d’être ignorées.