Peter Shawn Taylor : Les banques canadiennes ont laissé tomber leurs clients pendant la Loi sur les mesures d’urgence

Les banques sont soudainement devenues la pointe de la lance d’Ottawa dans sa fermeture de la manifestation des camionneurs

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À entendre les grandes banques canadiennes le dire, elles ont tout simplement amour leurs clients et veulent qu’ils se sentent tous en sécurité, heureux et validés. Pensez aux fauteuils verts moelleux de la TD. Ou les publicités de la Banque Royale affirmant « Nous croyons en vous ». Ils veulent que vous vous sentiez très, très à l’aise de leur laisser votre argent.

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Mais attention si le gouvernement fédéral leur dit le contraire. Pendant la Loi sur les mesures d’urgence, les banques sont soudainement devenues la pointe de la lance d’Ottawa dans sa fermeture de la manifestation des camionneurs. Ils ont délibérément causé des difficultés financières extrêmes à certains de leurs clients en gelant les comptes de prétendus manifestants et de leurs partisans. Et ils l’ont fait sans jamais remettre en question publiquement la légitimité de l’ordre du gouvernement ni contester sa constitutionnalité devant les tribunaux. Toutes les industries n’abandonnent pas leur clientèle prétendument bien-aimée si rapidement ou si docilement.

Le 15 février, un jour après l’invocation de la Loi sur les mesures d’urgence, le gouvernement fédéral a émis un décret sur les mesures économiques d’urgence obligeant les banques et autres institutions financières canadiennes à cesser toute transaction avec des personnes « se livrant, directement ou indirectement, à une activité » jugée illégale par le gouvernement.

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Les banques ont essentiellement reçu une liste de noms de la GRC, comme Angelina Mason, vice-présidente de l’Association des banquiers canadiens, expliqué au Comité des finances de la Chambre des communes en mars. Si les noms et les transactions correspondaient à leurs dossiers clients, les comptes étaient immédiatement gelés. Au moins 257 comptes ont ainsi été bloqués. Compte tenu de la manière expansive dont l’ordre a été décrit, cependant, quiconque aurait donné ne serait-ce que 20 $ au mouvement de protestation aurait pu se retrouver dans l’impossibilité d’accéder à son propre argent, si la GRC l’avait inscrit sur sa liste.

L’aspect le plus troublant de cette nouvelle menace financière sans précédent est la confusion quant à savoir qui détient réellement le pouvoir. Dans son témoignage devant le comité, le commissaire adjoint de la GRC, Michel Arcand, a affirmé que l’ordonnance d’urgence « donnait aux institutions financières la capacité de geler les produits financiers des personnes et des entreprises soupçonnées d’être impliquées dans des activités interdites ». Pour entendre les flics le dire, ils ont juste fourni une liste de noms suggérés et les banques l’ont prise à partir de là. Mais lorsqu’on lui a demandé s’il était possible pour une banque de refuser de geler le compte d’une personne dont le nom figurait sur la liste de la GRC, Mme Mason de l’association des banquiers a déclaré que c’était «une obligation légale» de verrouiller chaque nom.

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Les affirmations selon lesquelles les banques ont décidé quels comptes geler visent à perpétuer l’idée que la Charte canadienne des droits et libertés est restée en vigueur tout au long de la Loi sur les mesures d’urgence. Une banque peut verrouiller le compte de n’importe quel client sur la base de sa propre évaluation interne des risques sans affecter les droits de quiconque en vertu de la Charte. Mais si les gouvernements veulent faire cela, ils ont besoin d’une ordonnance du tribunal. C’est ce qu’on appelle une procédure régulière. Le contournement des tribunaux signifie la Charte n’était pas en effet.

Suivre une procédure régulière peut être gênant et prendre du temps pour un gouvernement paniqué par une manifestation bruyante de camionneurs. Mais ce n’est certainement pas impossible. L’Ontario a obtenu une telle ordonnance du tribunal cinq jours avant que le gouvernement fédéral n’opte pour le nucléaire.

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La nature juridiquement glissante des ordonnances de gel se répercute clairement sur le gouvernement Trudeau. Mais il est tout aussi remarquable que les banques aient accepté une telle trahison des meilleurs intérêts de leurs clients sans soulever de chahut d’aucune sorte.

Toutes les industries n’abandonnent pas si volontiers leurs clients sans se battre. En 2014, par exemple, la police de la région de Peel à Toronto a ordonné à Rogers et Telus de remettre un ensemble massif de données provenant de dizaines de tours de téléphonie cellulaire dans le but de résoudre une énigmatique vague de vols. Alors que les deux entreprises disent répondre régulièrement aux ordres de production de routine, l’ordonnance de «décharge de la tour» de la région de Peel était si radicale – impliquant des informations sur l’emplacement de plus de 43 000 citoyens respectueux des lois – qu’elles se sont senties obligées de contester sa légalité au nom de leurs clients.

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Une décision de justice définitive en 2016 a à la fois confirmé la capacité des entreprises à défendre les droits à la vie privée de leurs clients et a réprimandé l’ordonnance initiale comme étant « inconstitutionnelle ». C’était une nette victoire pour les citoyens canadiens. Mais un tel résultat n’a été possible que parce que les entreprises privées ont tenu tête au gouvernement devant les tribunaux. Quoi que vous pensiez de l’industrie canadienne de la téléphonie cellulaire, Telus et Rogers ont consacré leurs propres ressources à la défense raisonnée des droits de leurs clients. Mis dans la même pression, les banques canadiennes se sont embarrassées de leur manque de jugeote et de principes.

« N’importe laquelle des banques aurait pu contester la légalité de l’ordonnance rendue en vertu de la Loi sur les mesures d’urgence et demander une injonction en attendant l’audition de l’affaire », déclare Bruce Pardy, professeur de droit à l’Université Queen’s, dans une entrevue. Cela n’aurait peut-être pas réussi, mais « au moins cela aurait envoyé le signal qu’ils considéraient les intérêts de leurs clients comme sacro-saints et s’opposaient à être armés par le gouvernement ».

Et comment les banques ont-elles été récompensées pour être de si fidèles serviteurs du gouvernement fédéral ? Quelques semaines plus tard, le budget 2022 d’Ottawa a frappé le secteur bancaire avec des milliards de nouvelles taxes, y compris un taux d’imposition spécial et plus élevé pour les sociétés.

Peut-être que maintenant les banques apprécient ce que leurs clients ont ressenti en février.

Peter Shawn Taylor est rédacteur en chef des articles du C2C Journal, où une version plus longue de cette histoire est apparue pour la première fois.

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