Les consoles de jeux sont mortes. Vive les consoles de jeux !
Depuis plus de deux décennies, la question est récurrente : quand les consoles de jeu, le matériel dédié qui a été au cœur de l’industrie du jeu, pourraient-elles devenir obsolètes et être remplacées par des plateformes à usage général comme les PC et les smartphones ? Le débat a été alimenté par l’essor du cloud computing et des jeux mobiles, ainsi que par la baisse des ventes des dernières générations d’appareils de Microsoft, Sony PlayStation et Nintendo.
Les questions sur la longévité du modèle de console reviennent. Parmi les facteurs qui alimentent la conversation, on trouve la chute des ventes de la Switch de Nintendo, qui a fait ses débuts en 2017, dans un contexte d’attente prolongée pour la révélation de son successeur. Après une nouvelle vague de licenciements dans sa division de jeux, Microsoft prépare le lancement des consoles Xbox Series X et S avec des fonctionnalités réduites et des prix réduits pour les fêtes de fin d’année.
Jusqu’à présent, c’est la PlayStation de Sony qui a le plus progressé dans la dernière guerre des consoles, avec la révélation le 10 septembre de la console PS5 Pro destinée aux joueurs invétérés, qui sera commercialisée le 7 novembre. Mais la nouvelle a été accueillie avec des grognements concernant le prix élevé de 699 dollars pour un appareil sans lecteur de disque ni support. Et la stratégie de l’entreprise a reçu des critiques mitigées après le lancement raté de « Concord » – les analystes du secteur et les fans affirmant que le jeu était voué à l’échec avec une campagne marketing rudimentaire – et les débuts plus favorables d’« Astro Bot ».
Le résultat ? La fin des consoles n’est pas proche, selon Joost van Dreunen, professeur d’industrie du jeu vidéo à la Stern School of Business de l’Université de New York. « Il y a toujours cette menace existentielle imminente autour des consoles, et historiquement, cela ne se produit jamais de cette façon », déclare van Dreunen.
Cela dit, le fait que le secteur des consoles de jeux ne soit pas en train de disparaître ne signifie pas qu’il a encore de beaux jours devant lui. Au cours de la dernière décennie, les fabricants de consoles n’ont pas réussi à accroître leur base d’utilisateurs au-delà de 250 millions de personnes, alors que le reste du secteur a connu une forte croissance, note van Dreunen.
Il faudra de nombreuses années – au moins une décennie – avant que les consoles ne disparaissent, prévient un agent de talents proche des principaux développeurs et éditeurs. Google a tenté de lancer une activité de jeu qui s’affranchissait des consoles avec son service de cloud gaming Stadia, qui a échoué. C’était un « excellent produit, mais trop tôt pour l’époque », explique l’agent.
Pour les développeurs, l’attente des prochaines itérations des grandes plateformes est une source de frustration constante. Les fabricants des consoles dominantes (Xbox, PlayStation et Nintendo) n’apprécient pas plus que les développeurs et les studios les pauses dans les sorties de jeux qui se produisent entre les lancements de consoles. Mais lorsqu’une console fait ses débuts, elle peut donner un coup de pouce significatif aux ventes de titres créés spécifiquement pour la nouvelle console.
Grâce à leurs plateformes propriétaires, les fabricants de consoles ont pu créer une forte fidélité à la marque. Une grande partie de l’identité des joueurs repose sur le système qu’ils préfèrent, ce qui détermine également les jeux qu’ils peuvent acheter et auxquels ils peuvent jouer.
Pour certains régulateurs, cette dynamique ressemble à une stratégie visant à fidéliser les consommateurs. Et Microsoft, dans le cadre de l’approbation de son rachat massif d’Activision Blizzard, a promis de sortir ses propres jeux sur les plateformes de consoles de ses concurrents. Par exemple, Xbox prévoit de lancer le très attendu titre de Bethesda Game Studios « Indiana Jones and the Great Circle » en décembre avant de le déployer sur PS5 au printemps prochain.
D’autres éditeurs ont évité de sortir des jeux spécifiquement destinés aux consoles afin de maximiser leur base d’utilisateurs potentiels. Par exemple, « Harry Potter : Quidditch Champions » de Warner Bros. Games a été lancé le 3 septembre sur plusieurs plateformes.
Si l’industrie se tourne vers la sortie multiplateforme de ses principaux titres, cela risque de nuire aux ventes de consoles et d’accélérer leur disparition. Van Dreunen, de l’Université de New York, prédit un déclin de la part de marché des consoles, mais ajoute : « Il y aura toujours un sous-ensemble de fans inconditionnels qui veulent simplement avoir du matériel de jeu dédié et haute définition. »