mardi, novembre 19, 2024

Opinion : Pourquoi les libertaires ne devraient pas voter pour Donald Trump

Il est peut-être plus proche d’eux que Joe Biden dans un certain sens de « politique moyenne », mais il lui manque les convictions morales que le libertarisme exige de la part des dirigeants.

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Par Pierre Lemieux

Un débat fait rage parmi les libertariens américains sur la question de savoir s’ils devraient voter pour Donald Trump en novembre. Une minorité pense qu’ils devraient le faire. Walter Blocun économiste bien connu, ancien économiste principal à l’Institut Fraser, a défendu cette position dans un récent article du Wall Street Journal. article d’opinion. L’argument central est que, sur l’échiquier politique, la distance entre les libertaires et le candidat démocrate Joe Biden est plus grande que leur distance par rapport à M. Trump. Ne gaspillez donc pas vos voix pour le Parti Libertaire, dont le candidat n’a aucune chance de gagner et pourrait simplement retirer des voix à Trump.

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Je pense que c’est une mauvaise stratégie si nous ne voulons pas dénaturer sérieusement ce en quoi croient les libertariens (une foule certes diversifiée). Plus important encore, le critère de « distance » est impossible à opérationnaliser. Enfin, il existe au moins un autre critère défendable et, à mon avis, décisif pour choisir le candidat présidentiel le plus acceptable, s’il en existe un : le caractère moral.

Si le monde social et politique n’avait qu’une seule dimension, c’est-à-dire s’il n’y avait qu’une seule question politique selon une dimension (un axe), et si chaque électeur avait un point privilégié (« point idéal ») sur cet axe, nous pourrions ( peut-être) découvrez où se situent les libertaires par rapport à Trump et Biden, et mesurez qui était le plus proche de « nous ». L’exemple le plus simple d’un tel problème est « le » taux d’imposition. Nous pourrions éventuellement déterminer les taux d’imposition idéaux de Trump et de Biden et mesurer la distance entre « notre » propre point idéal sur l’axe et le leur. Notez cependant que même dans un monde unidimensionnel, de nombreux problèmes sont difficiles à cartographier sur des nombres réels sur l’axe. De plus, l’exercice proposé suppose que tous les libertaires partagent le même point idéal sur l’axe.

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Dans le monde réel, bien sûr, l’espace de choix est défini sur plus d’une dimension : il y a plus d’une question politique, c’est le moins qu’on puisse dire ! Tous les électeurs, même les libertaires, ne sont pas des électeurs qui se concentrent sur une même question étroite. Sur de nombreuses questions, les libertaires auront (au moins dans une certaine mesure) des préférences différentes et feront des compromis différents. Minimiser la distance entre les libertariens et les candidats présidentiels des deux grands partis est donc quasiment une mission impossible.

Et puis il y a le problème de déterminer quelles sont les préférences réelles d’un homme politique par rapport à ses promesses stratégiques, et comment ces dernières seront affectées par l’évolution de ses contraintes politiques, ce qui est pour le moins très difficile. Les surprises post-électorales sont constantes. La difficulté est particulièrement aiguë si l’on imagine un candidat ignorant, incohérent, narcissique, imprévisible et capable de s’entendre uniquement avec des vassaux et des serviteurs.

Par ailleurs, il ne faut pas perdre de vue une réalité simple mais souvent ignorée : la faible probabilité qu’un vote individuel soit décisif – que le résultat des élections serait différent sans lui. Cela ne s’est jamais produit, et cela n’arrivera probablement jamais, dans une course présidentielle dans laquelle plus de 240 millions de personnes ont le droit de voter, et le collège électoral n’y change rien. Un individu rationnel ne votera pas avec l’intention de modifier le résultat de l’élection : la probabilité qu’un seul vote soit décisif est pratiquement nulle.

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Le mieux qu’un électeur rationnel puisse faire est de voter (ou de ne pas voter ou d’annuler son bulletin) afin d’exprimer une opinion morale en faveur du candidat, s’il en existe un, avec lequel il partage d’importantes valeurs morales. Pour un libertaire, ces valeurs seront celles propices au maintien et au renforcement d’une société libre. Un homme politique digne d’être soutenu doit avoir un caractère moral conforme à cet objectif. Ce critère de congruence morale ne semble peut-être pas plus facile à appliquer que la question de la distance, mais au moins il chasse un vrai lapin.

Pour m’inspirer sur le caractère moral d’un homme politique dans une société libre, je suggère de consulter deux sources. L’un d’entre eux est l’économiste et philosophe politique Nobel James Buchanan, qui, dans son petit livre Pourquoi moi aussi, je ne suis pas conservateur, a souligné l’éthique minimale requise pour maintenir une société libre : une forte croyance en l’égalité des libertés, l’honnêteté fondamentale et le libre-échange. (à la fois interne et externe).

Une source complémentaire peut être trouvée dans le livre fondateur d’Anthony de Jasay L’état. De Jasay, un Hongrois qui s’est retrouvé en France, a peut-être été l’économiste et philosophe politique le plus négligé du XXe siècle. Buchanan avait une haute opinion de lui. Dans cet ouvrage, il définit « l’État capitaliste » comme un État minimal idéal dont la seule fonction est d’empêcher un État dangereux de prendre le dessus. Des incitations sont bien sûr nécessaires, et les dirigeants de l’État minimal pourraient être motivés par des avantages périphériques (avantages et honneurs, place dans les futurs livres d’histoire, etc.). Mais dans un État capitaliste, les politiciens libertaires ne seraient pas intéressés par gouvernantce qui ne signifie rien d’autre que favoriser certains citoyens au détriment des autres, prendre parti parmi eux, en un mot se livrer aux affaires publiques. discrimination via des subventions, un traitement fiscal préférentiel, des interdictions sélectives, etc.

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Dans cette perspective, s’il existe un personnage présidentiel américain doté d’un caractère moral libertaire acceptable, ce n’est clairement pas Donald Trump.

Pierre Lemieux, économiste affilié au Département des sciences de gestion de l’Université du Québec en Outaouais, est chercheur principal affilié au Centre Mercatus de l’Université George Mason.

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