Il y a trop peu de milliardaires au Canada – ou ailleurs, d’ailleurs – pour financer un État-providence expansif
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La lecture du récent article de Michael H. McCain, PDG de Maple Leaf Foods, (14 janvier : « Nous avons besoin d’une nouvelle charte pour le capitalisme, et voici ce qu’elle devrait inclure »), nous a rappelé quelque chose que le regretté chroniqueur du Financial Times Samuel Brittan écrit une fois. Dans son livre de 1973, Capitalism and the Permissive Society, Brittan a observé que « les hommes d’affaires peuvent généralement être invoqués pour défendre les aspects indéfendables de leurs activités tout en cédant à leurs adversaires collectivistes sur l’essentiel ».
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Avec tout le respect que je dois à M. McCain, son article en est une excellente illustration. Sa « nouvelle Charte du capitalisme » proposée serait, entre autres :
- rejeter la primauté des actionnaires au profit des autres « parties prenantes », y compris la « vie naturelle » (les arbres, supposons-nous) ;
- « désavantager le court-termisme » — en faveur de la vision à long terme bien connue des politiciens et de la sagesse clairvoyante des bureaucrates ?;
- une « réglementation gouvernementale bienvenue » contre ce qu’il appelle une « course vers le bas », à laquelle nous supposons que son entreprise ne participe pas, même si elle n’est pas encore suffisamment réglementée ;
- redéfinissent les droits individuels « contre » la persécution et ainsi de suite en faveur des droits « à » presque tout, y compris « un revenu de base sûr », « des soins de santé sûrs » (qui sont déjà gratuits au Canada, mais pas sûrs ?) et « sûrs ». nourriture » (mais pas de vêtements sûrs) ; et
- augmenter les impôts sur les riches tout en « rejetant l’idée qu’il s’agit d’un simple transfert de richesse » (en novlangue courante).
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Alors que de nombreuses personnes se voient garantir des droits sûrs aux biens et aux services, les personnes qui doivent payer pour cela ne sont manifestement plus en sécurité dans leur propre propriété. Et les payeurs ne sont pas tous des milliardaires comme M. McCain : il y a trop peu de milliardaires au Canada — ou ailleurs, d’ailleurs — pour financer un État-providence expansif.
M. McCain, qui semble privilégier tout ce qui est « durable et équitable », s’inquiète que sa génération ne laisse pas une société suffisamment socialiste aux générations futures. Les consulte-t-il régulièrement ? Ne devrait-il pas plutôt s’inquiéter de l’ignorance économique, du vide moral et de la mentalité de jungle politique que sa génération (si l’on peut parler en termes aussi collectivistes) a laissée derrière elle ? Pour ceux qui ne connaissent pas le terme : dans la jungle politique, des groupes politiquement puissants se battent pour obtenir des subventions ou d’autres privilèges et pour exploiter d’autres individus avec des impôts discriminatoires ou en imposant leurs préférences ou leurs valeurs personnelles.
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Ces critiques ne sont pas une attaque contre M. McCain personnellement. Il ne fait que surfer sur un raz-de-marée politiquement correct, sinon réveillé, qui semble s’être emparé de la quasi-totalité des dirigeants d’entreprise de haut niveau. Nous pouvons certainement comprendre pourquoi ils se sentiraient perdus dans le théâtre idéologique actuel. Qu’est-il advenu, doivent-ils se demander, du monde dans lequel les entreprises produisaient simplement les biens ou les services demandés par les consommateurs individuels, dans toutes leurs préférences diversifiées ? Où les chefs d’entreprise n’avaient-ils pas à crier des avis désobligeants, sinon haineux, à 50 %, 25 %, voire à 1 % seulement de leurs clients ?
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Le vent de la panique semble souffler sur les conseils d’administration d’aujourd’hui. C’est comme si cadres et dirigeants venaient de lire pour la première fois la fameuse introduction au Manifeste communiste de 1848 de Karl Marx et Frederich Engels : « Un spectre hante l’Europe, le spectre du communisme ». Cependant, comme les lecteurs d’aujourd’hui ont l’avantage de le savoir, l’œuvre des disciples de Marx n’a pas bien tourné. En termes de liberté et de biens matériels, le capitalisme que M. McCain allait maintenant bouleverser a vaincu le socialisme. Pourtant, d’une manière ou d’une autre, les dirigeants et les propriétaires d’entreprises d’aujourd’hui semblent prêts à abandonner le système social le plus prospère de l’histoire par peur des écologistes, des guerriers de la justice sociale et des militants éveillés, des parties prenantes avides, qui les encerclent désormais. Et, tragiquement, bien que vraisemblablement astucieux dans leurs propres relations commerciales, ils semblent croire que faire des concessions idéologiques et financières apaisera l’extorsion.
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Il va presque sans dire que les enjeux qui sous-tendent le manifeste de M. McCain sont sérieux et complexes. En effet, ils ont occupé certains des esprits les plus fins et des plus grands penseurs de l’histoire de notre espèce. Les philosophes y réfléchissent depuis deux millénaires, les économistes et les politologues depuis quelques siècles.
Mais au lieu de s’engager dans des études aussi silencieuses ou dans la tâche humble et gratifiante de fournir aux consommateurs individuels ce qu’ils veulent, les dirigeants d’entreprise du 21e siècle semblent plus intéressés à poursuivre le mirage de l’ingénierie sociale d’une nouvelle société – quelque chose que beaucoup d’autres ont essayé dans le passé. siècle dernier, généralement avec des résultats désastreux. Notons que le mot « révolution » (ou ses dérivés) apparaît quatre fois dans l’article de M. McCain.
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La beauté d’un système capitaliste, par lequel nous entendons le marché libre, et non le copinage des entreprises/gouvernements, est qu’il sépare le « pouvoir » économique du pouvoir politique. Si les actionnaires et le conseil d’administration sont d’accord, un dirigeant d’entreprise peut s’incliner devant les «parties prenantes» qu’il souhaite et même diriger l’entreprise à leur place. De même, comme MacKenzie Scott d’Amazon, une personne riche peut dépenser une partie ou même la totalité de sa fortune personnelle pour remédier à tout problème social qu’elle perçoit.
Dans une société libre, cependant, personne ne sera obligé de fréquenter son entreprise ou celle de M. McCain, d’obéir aux diktats que ce dernier concocte avec le gouvernement, de le renflouer ou d’être d’accord avec ses réflexions sur la nature du capitalisme.
Pierre Lemieux est chercheur principal à l’Institut économique de Montréal, dont Michel Kelly-Gagnon est président et chef de la direction.
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