Opinion : Les hésitations de l’Agence du revenu du Canada entraînent une perte d’un million de dollars

Si la date limite pour soumettre les documents est un jour férié, la loi vous accorde un jour de grâce. Mais ce n’est pas le cas de l’ARC, disent les tribunaux

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Par Allan Lanthier

Tromperie. Évasion fiscale. Vœux de mariage abandonnés puis renouvelés. Tous font partie d’un décision du tribunal fiscal publié le mois dernier, dans lequel l’Agence du revenu du Canada n’a pas perçu un sou sur le million de dollars qu’elle réclamait. Pourquoi? En grande partie à cause de ses propres hésitations.

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Voici le contexte : veuillez attacher vos ceintures de sécurité.

Charles Csak (M. C) a quitté la Hongrie pour s’établir au Canada alors qu’il avait la cinquantaine. Sa situation financière était florissante, mais ses intérêts romantiques moins. Au tribunal des impôts, son épouse Maria Csak (Mme C) a expliqué qu’elle avait prévu d’épouser son mari en 1988 ou 1989 mais, à son insu, il en a épousé une autre ! Ce mariage fut de courte durée : la mariée rougissante a décidé de démissionner deux jours plus tard et a déménagé en Europe. Un divorce s’ensuit.

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L’amour est aveugle, et M. et Mme C se sont réconciliés. Elle craignait cependant d’être à nouveau trahie. Et si la première épouse revenait et réclamait la maison de M. C à Mississauga ? Elle a informé M. C qu’elle ne se marierait pas à moins qu’il ne lui donne la maison. Ils se sont mariés en octobre 1992 et, peu de temps après, M. C lui a cédé la propriété.

Pendant que se jouait ce triangle amoureux, Monsieur C s’était retrouvé dans le pétrin fiscal. En 1988, il a participé à un stratagème d’évitement fiscal agressif et a réclamé d’importantes pertes fiscales, principalement pour les années d’imposition 1988 et 1989. Cette affaire a été portée devant les tribunaux et, dans une décision de 2006, les pertes fiscales ont été refusées.

À ce moment-là, M. C était décédé. Même si sa succession devait à l’ARC près de 5 millions de dollars à la suite de la décision du tribunal, les collectionneurs de l’ARC disposaient de peu d’actifs à récupérer. Mais la loi fiscale contient une règle pour de telles situations. Si une personne (dans ce cas, M. C) transfère un bien à une personne liée à un prix inférieur à la juste valeur, le cessionnaire (Mme C) devra payer tous les impôts dus par le cédant ou sa succession jusqu’à concurrence de la valeur de le bien reçu. La valeur estimée de la maison à Mississauga était de 950 000 $ lorsque Mme C l’a reçue, et l’ARC a déclaré qu’elle devait ce montant.

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Mais Mme C a soutenu que son mari et sa succession n’avaient aucune dette fiscale du tout, parce que l’ARC avait attendu trop longtemps pour réévaluer son mari. L’ARC dispose généralement de trois ans à compter de la date de la première cotisation pour une année d’imposition pour émettre d’autres nouvelles cotisations ou obtenir une renonciation du contribuable prolongeant la limite de trois ans. Pour faire face à la limite, l’ARC avait demandé des dérogations pour 1988 et 1989.

Mais lorsque l’ARC a reçu la renonciation de 1988 de M. C, elle n’y a pas apposé la date de réception. Le tribunal a décidé qu’il n’y avait pas suffisamment de preuves pour déterminer quand exactement la renonciation avait été reçue : en conséquence, 1988 était devenue « prescrite » et la cotisation subséquente de l’ARC pour cette année était nulle et non avenue.

Le formulaire de renonciation de 1989 avait été estampillé. Mais l’ARC l’a reçu un lundi, exactement un jour après la date limite. Ou était-ce? La Loi d’interprétation du Canada stipule que lorsque le délai pour faire quelque chose expire un dimanche ou un jour férié, cela peut être fait le lendemain.

À la surprise de l’ARC et de nombreux membres de la communauté fiscale, le tribunal a décidé que la renonciation n’était pas valide. Le but du délai de grâce d’un jour, selon la décision, est d’accorder un allègement à une personne confrontée à un délai pour faire quelque chose, comme déposer une objection fiscale ou faire appel. Dans ce cas toutefois, la renonciation aurait accordé un allègement uniquement à l’ARC sous la forme d’une période plus longue pour imposer l’impôt. La partie qui « a fait quelque chose » (M. C) ne cherchait pas à obtenir réparation et le délai de grâce n’était donc pas pertinent.

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Bref, l’ARC n’a pas respecté les délais pour 1988 et 1989, et sa réclamation de 950 000 $ contre Mme C a été refusée. Il a fallu de nombreuses années à Mme C pour enfin pouvoir comparaître devant le tribunal – en partie parce que M. C était décédé, laissant une situation désordonnée – mais elle a eu gain de cause.

Nous voyons trop souvent ce type d’hésitation de l’ARC. L’agence se demande si elle doit agir ou non ; les problèmes sont renvoyés entre le bureau local de l’ARC et Ottawa; et il attend le plus longtemps possible pour mettre les points sur les i et les croix sur les t. Il est temps pour un changement.

Allan Lanthier, associé retraité d’un cabinet comptable international, a été conseiller auprès du ministère des Finances et de l’Agence du revenu du Canada.

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