Opinion : Laissez les régimes d’assurance médicaments choisir à qui ils veulent acheter

Si un régime d’assurance médicaments souhaite changer de fournisseur, comme Manuvie a tenté de le faire plus tôt cette année, cela dépend du Bureau fédéral de la concurrence.

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Par Laurent Schwartz

En janvier, Manuvie a annoncé qu’elle se retirait du « réseau de fournisseurs privilégiés » de Bayshore Specialty Rx et qu’elle créait son propre réseau exclusif avec Loblaw et Shoppers Drug Mart. En effet, elle déplaçait certains médicaments achetés par ses membres de son régime d’assurance maladie d’une pharmacie à une autre. Cette annonce a suscité une explosion de critiques. Certains membres du régime d’assurance maladie de Manuvie se sont plaints de ne plus être remboursés pour leurs ordonnances de certains « médicaments spécialisés » délivrés par leur pharmacie locale préférée et ont exigé le rétablissement de ce « droit ». Certains commentateurs ont avancé que le nouvel arrangement était un exemple de grandes entreprises « exerçant un pouvoir de marché et évinçant de plus petits concurrents ». Le ministre fédéral de l’Industrie, François-Philippe Champagne annoncé sombrement : « Ils ne comprennent pas le message : nous voulons plus de concurrence dans ce pays » et a déclaré que le gouvernement allait revoir l’accord.

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Manuvie a apparemment compris le message. En février, ça s’est inversé sa décision de conclure un accord exclusif avec Loblaw. Les membres de son régime d’assurance maladie pourraient continuer de soumettre leurs ordonnances de médicaments de spécialité aux pharmacies de leur choix et se faire rembourser le coût de leurs médicaments comme le prévoit son régime d’assurance maladie.

Puis, en mai, le Régime d’assurance des enseignantes et des enseignants de l’Ontario (RAEO) a annoncé MemberRx, sa propre pharmacie interne, dont le siège social est à Mississauga. Encore une fois, l’indignation morale était prévisible.

Mais qu’a fait l’une ou l’autre organisation qui soit anticoncurrentielle ? À première vue, Manuvie n’a fait qu’abandonner un réseau de fournisseurs privilégiés (Bayshore) pour établir son propre accord avec Loblaw/Shoppers Drugs. Il n’y a là rien d’anticoncurrentiel en soi. Il en va de même pour la décision du RAEO de créer sa propre pharmacie.

Le fait que les participants se soient plaints démontre-t-il que ces mesures nuisent à la concurrence ? Le fait que certains clients puissent être gênés ne démontre pas en soi une diminution de la concurrence. Pratiquement tous les changements dans la conduite des affaires ont un impact négatif sur certains clients, mais cela ne signifie pas qu’ils sont nécessairement anticoncurrentiels. Les problèmes de confidentialité peuvent être un problème, mais nous avons des lois autres que la Loi sur la concurrence pour y répondre.

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Certains commentateurs ont exprimé des inquiétudes quant au « pouvoir de marché » dans le secteur des médicaments de spécialité sur ordonnance. Le pouvoir de marché fait généralement référence à la capacité d’un vendeur à fixer et à maintenir des prix supérieurs à ceux de la concurrence. Pourtant, personne n’a identifié les prix qui pourraient être manipulés. Oui, en vertu des nouvelles dispositions, certaines pharmacies non affiliées perdraient les activités de prescription de médicaments spécialisés des membres des régimes d’assurance-médicaments au profit des nouveaux réseaux et des pharmacies internes. Mais de nombreux secteurs ont des entreprises de tailles et de services différents – qu’il s’agisse de salons de coiffure, de restaurants ou de pharmacies locales – et elles sont toutes en concurrence pour attirer les clients. Que certains prennent des affaires aux autres n’est qu’une concurrence normale. La Loi sur la concurrence protège la concurrence. Il ne protège pas les entreprises, qu’elles soient petites ou grandes, depuis concours.

Le souci du caractère exclusif des réseaux et des officines internes est qu’ils remplacent les relations marchandes classiques par une forme d’organisation interne. Pendant une grande partie du XXe siècle, les économistes considéraient l’exclusivité comme dépourvue de tout objectif positif et donc intrinsèquement anticoncurrentielle. Toutefois, à partir des années 1970, les organismes chargés de l’application de la concurrence ont commencé à se demander si de tels arrangements ne pouvaient pas avoir des justifications commerciales légitimes (c’est-à-dire favorables à la concurrence). Peser la balance a commencé à supplanter la condamnation pure et simple.

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Dans ce pays, tout équilibre doit tenir compte du fait qu’après les hôpitaux, dépenses en médicaments représentent le coût le plus important du système de santé, dépassant désormais la rémunération des médecins. De plus, les prix des médicaments au Canada se classent au troisième rang parmi les pays de l’OCDE, ce qui affecte presque certainement à la fois l’accès des Canadiens à d’importants médicaments d’ordonnance et la viabilité du système de santé. En conséquence, les gouvernements ont cherché des moyens de contrôler la croissance des coûts des médicaments.

Mais il en va de même pour les régimes d’assurance médicaments, qu’ils soient privés ou gérés par les gouvernements provinciaux. En achetant des médicaments de spécialité auprès des fabricants de médicaments et de leurs grossistes, ils ont tout intérêt à négocier les prix les plus bas possibles. Les fournisseurs offrent des réductions de prix en fonction du volume, de sorte que les régimes sont incités à soumettre des commandes plus importantes pour les médicaments qu’ils couvrent. S’ils réussissent, leurs coûts d’acquisition et leurs primes de membre se stabilisent. En cas d’échec, leur couverture pourrait devenir moins favorable ou leurs primes augmenter – ou les deux.

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Manuvie, le RAEO et les assureurs de soins de santé du monde entier se font ainsi concurrence pour obtenir les rabais disponibles sur les grosses commandes de médicaments spécialisés. Tant que l’octroi de rabais de volume n’est pas en soi anticoncurrentiel, cette concurrence profite à la fois aux participants au régime et au système de santé. Tout effet négatif de l’exclusion sur les membres doit être mis en balance avec les effets bénéfiques de la baisse des prix. La condamnation instinctive de tout ce que font les grands projets exclut un équilibre raisonnable.

Lawrence Schwartz, ancien membre du Tribunal fédéral de la concurrence, est un économiste-conseil spécialisé dans les questions de concurrence et de réglementation.

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