Gaïa VinceLe nouveau livre de devrait être lu non seulement par chaque politicien, mais par chaque personne sur la planète, car il expose, beaucoup plus clairement que toute évaluation scientifique existante, le monde que nous créons grâce au réchauffement climatique.
Siècle nomade est la suite tant attendue du livre primé de Vince, Aventures dans l’Anthropocène, qui a expliqué comment les impacts humains sur Terre ont créé une nouvelle époque géologique. Dans ce nouveau travail, l’auteur fait l’hypothèse pessimiste, mais tout à fait plausible, que d’ici la fin de ce siècle, la Terre sera 4C plus chaude que pendant la période précédant l’industrialisation. Et bien que cela puisse ressembler à des cauchemars, elle offre également une vision optimiste de la façon dont les humains pourraient faire face après avoir rendu de vastes pans du globe inhabitables – par une migration massive vers les pôles.
Les premiers chapitres décrivent un avenir dystopique, basé sur des projections scientifiques d’un monde qui sera bientôt plus chaud qu’à tout moment pendant des dizaines de millions d’années. C’est, dit-elle, ce qui nous attend si nous continuons à ne pas réduire drastiquement nos émissions de dioxyde de carbone et d’autres gaz à effet de serre : les côtes seront transformées par l’élévation du niveau de la mer et des tempêtes tropicales plus fortes, les forêts rasées par les incendies de forêt, les champs frappés par la sécheresse seront stériles et les déserts s’étendront pour engloutir villages et villes. D’autres communautés seront anéanties par de terribles inondations, ou abandonnées à cause du manque de précipitations.
Dans une zone de croissance autour de l’équateur, la température et l’humidité seront si élevées que les gens ne pourront pas s’empêcher de surchauffer par la transpiration, ce qui rend dangereuse toute activité intense à l’extérieur. Face à un environnement aussi inhospitalier, soutient Vince, les humains feront ce que nous avons fait tout au long de notre histoire évolutive : nous bougerons. Mais cette fois, ce sera par milliards, à une échelle jamais vue auparavant.
La plupart de ces migrants tenteront de se déplacer vers le nord depuis les tropiques, cherchant à s’installer éventuellement dans des pays comme le Canada et la Russie, où le climat aura changé mais qui sera toujours habitable. Ce flux d’humanité a déjà commencé et ne fera qu’augmenter au cours des prochaines décennies. Certains partiront parce que leurs moyens de subsistance ont été détruits par le changement climatique, d’autres seront des réfugiés qui ont perdu leur maison à cause d’événements météorologiques extrêmes qui sont devenus plus fréquents et plus intenses.
Vince fournit une brève histoire de la migration humaine, expliquant qu’elle a été la clé du succès de notre espèce à s’installer à travers le monde. Sans la migration, les humains modernes ne se seraient jamais aventurés au-delà de leur origine en Afrique. L’auteur passe ensuite à une présentation passionnée et puissante des avantages de la migration. Elle souligne la richesse des preuves montrant qu’elle enrichit à la fois les migrants et leurs destinations et attaque la rhétorique des politiciens et des médias britanniques qui cherchent à diaboliser les demandeurs d’asile qui arrivent sur nos côtes.
Elle souligne que la création de frontières politiques pour empêcher les gens de se déplacer sans contrôle dans le monde est un développement relativement nouveau dans l’histoire humaine. C’est, à bien des égards, une restriction contre nature de nos libertés fondamentales. Elle illustre également le désespoir de nombreux migrants actuels en décrivant sa visite au camp de réfugiés de Kutupalong au Bangladesh, où des centaines de milliers de Rohingyas ont cherché refuge contre la persécution au Myanmar. Elle note que le camp est en fait une ville mal planifiée dans laquelle le potentiel humain est gaspillé, ce qui engendre un sentiment de désespoir.
Mais il n’est pas nécessaire qu’il en soit ainsi, soutient Vince. La migration à venir de milliards de personnes des tropiques peut être planifiée, avec de nouvelles villes construites pour accueillir les migrants climatiques et leur donner la possibilité de construire de nouvelles vies. Partout dans le monde, il y a déjà eu un exode massif des campagnes vers les villes, mais le développement urbain non planifié a conduit à une prolifération de taudis et de bidonvilles. Cependant, la Chine a géré avec plus de succès le flux d’environ 400 millions de personnes dans ses villes au cours des trois dernières décennies grâce à d’énormes programmes de construction et d’infrastructure.
Il existe de nombreux exemples dans lesquels d’importantes populations de migrants ont été intégrées avec succès dans leurs nouvelles communautés grâce à l’élaboration de politiques éclairées. Le quartier Neukölln de Berlin, par exemple, a accueilli des dizaines de milliers de réfugiés de la brutale guerre civile syrienne, créant de nouveaux emplois et opportunités économiques.
Vince précise que l’hostilité politique envers les migrants est souvent fondée sur des préjugés plutôt que sur des faits. Des millions de réfugiés ukrainiens ont été acceptés par des pays européens qui prétendent simultanément qu’ils ne peuvent pas faire face à l’afflux d’un plus petit nombre à travers la Méditerranée. Une façon d’assurer un traitement plus juste des migrants climatiques, suggère-t-elle, est que les Nations Unies créent une nouvelle organisation pour les migrations mondiales et offrent la citoyenneté mondiale à tous en plus de leurs citoyennetés nationales.
La vision profondément humaine de Vince sur la migration de masse facilitée peut sembler irréaliste dans le contexte actuel d’hystérie à propos des demandeurs d’asile dans de nombreuses régions d’Europe et des États-Unis. Mais nous devons maintenant envisager un avenir extraordinaire dans lequel l’impact du réchauffement climatique rend inévitable la migration de milliards de personnes. Malheureusement, les mêmes politiciens qui ne gèrent pas correctement la migration sont les mêmes sur lesquels nous comptons pour éviter une dégradation dangereuse du climat.
Vince est optimiste quant à nos chances de gérer avec succès la dislocation massive causée par le réchauffement du 4C, et ne s’attarde pas sur l’alternative : un monde qui ne fait pas face au déplacement de milliards de personnes. Le résultat serait un conflit généralisé et perpétuel à travers le monde, et un nouveau chapitre tragique de souffrance dans l’histoire humaine.
Bob Ward est directeur des politiques et des communications au Grantham Research Institute on Climate Change and the Environment de la London School of Economics and Political Science
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Nomad Century : comment survivre au bouleversement climatique par Gaia Vince est publié par Allen Lane (£20). Pour soutenir la Gardien et Observateur commandez votre exemplaire sur guardianbookshop.com. Des frais de livraison peuvent s’appliquer