mercredi, mars 12, 2025

L’Inde projette un grand port de transbordement aux Nicobar pour dynamiser le commerce maritime.

La baie de Galathea, menacée par un projet de port à conteneurs, pourrait voir son paysage idyllique transformé. Prévu pour avril, le port ambitionne de devenir un hub maritime crucial, mais suscite des inquiétudes écologiques et sociales. La construction nécessitera le défrichement de 130 km² de forêt tropicale, affectant des espèces menacées et la communauté indigène des Shompen. Les critiques soulignent également la compétitivité du port face à des infrastructures déjà établies à Singapour et Colombo.

La baie de Galathea demeure presque intacte, offrant une plage de sable blanc bordée par une jungle luxuriante. Cependant, d’ici quelques années, ce lieu idyllique pourrait se transformer en un des plus grands ports à conteneurs d’Inde, localisé à la pointe sud des Nicobar. Le gouvernement indien a prévu la construction de trois quais capables d’accueillir simultanément sept navires porte-conteneurs, avec le début des travaux programmé pour avril. À terme, ce port devrait jouer un rôle clé dans le commerce maritime de l’océan Indien.

Une localisation stratégique pour le développement maritime

La baie de Galathea bénéficie d’une position géographique privilégiée. Située au sud de l’île Grande Nicobar, elle présente une profondeur naturelle de vingt mètres, idéale pour l’accès des grands porte-conteneurs. À seulement 40 milles marins de la route majeure empruntée par les navires dans le détroit de Malacca, qui représente un tiers du commerce maritime mondial, ce port pourrait offrir une alternative compétitive aux ports de transbordement de Colombo, Singapour et Kuala Lumpur.

Les défenseurs du projet soulignent que les ports de transbordement actuels se trouvent déjà à pleine capacité. Si la tendance de croissance du commerce dans l’océan Indien se poursuit, des retards et des engorgements se profilent à l’horizon. La création d’un port de transbordement supplémentaire est donc perçue comme une nécessité économique. De plus, l’Inde pourrait économiser des devises en transférant les marchandises localement plutôt qu’à l’étranger.

Une indépendance maritime mise à l’épreuve

Les ports de transbordement jouent un rôle crucial le long des routes maritimes internationales, facilitant le transfert de marchandises d’un navire à un autre. Actuellement, 75 % du commerce maritime indien transite par des ports étrangers, dont 45 % par Colombo et 40 % par Singapour et Port Klang. Le développement du port dans la baie de Galathea pourrait permettre à l’Inde d’économiser jusqu’à 220 millions de dollars par an.

Cependant, des préoccupations subsistent concernant la compétitivité du futur port face à des installations moins coûteuses à Singapour et Colombo. Le temps que les navires passent à charger et décharger est un facteur déterminant pour l’attractivité d’un port. À titre de comparaison, le temps de transbordement à Colombo est de 24 heures et seulement 12 heures à Singapour, tandis que les ports indiens affichent un temps moyen de 48 heures.

En outre, la baie de Galathea est située à plus de 1600 kilomètres du continent indien. Contrairement à Colombo ou Singapour, le port de Grande Nicobar ne disposera pas d’un hinterland accessible par route ou rail, avec une île presque entièrement couverte de jungle et une population de moins de 9000 habitants. La seule agglomération significative se trouve à la baie de Campbell, au nord de Galathea, où se situe déjà le seul port de l’île.

Impact écologique et préoccupations sociales

La construction du port soulève également des inquiétudes écologiques. Selon le think tank indien Niti Aayog, les coûts de construction pourraient atteindre 5 milliards de dollars. Lors de sa première phase, le port sera capable de traiter 4 millions de conteneurs par an, avec un objectif de 16 millions à son achèvement en 2058.

Au-delà du port à conteneurs, le projet prévoit également la création de chantiers navals, d’un terminal de croisière, d’une centrale électrique et d’un aéroport, nécessitant le défrichement de 130 kilomètres carrés de forêt tropicale. Cette zone est un habitat vital pour la tortue luth, l’une des plus grandes espèces de tortues au monde. Les écologistes expriment leur colère face à cette destruction potentielle, arguant que la protection de l’environnement devrait primer sur les ambitions économiques.

Les Shompen, un groupe ethnique local, se retrouvent également menacés par ce projet. Avec environ 250 membres, cette communauté de chasseurs et de cueilleurs est jugée en danger. Les séquelles du tsunami de 2004 ont déjà dévasté leur habitat. Les préoccupations se multiplient concernant la survie des Shompen et d’autres groupes autochtones si leur environnement est détruit. Bien que le parti d’opposition demande une réévaluation des impacts sociaux et environnementaux, le gouvernement persiste dans son projet, qui a déjà suscité l’intérêt d’entreprises indiennes, dont celle de Gautam Adani, un milliardaire influent en Inde.

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