Le mouvement populiste de droite en Europe est en plein essor, avec des leaders comme Matteo Salvini et Marine Le Pen adoptant un ton mesuré suite à la réélection de Trump. Le Pen, tout en félicitant Trump, se distancie des comportements extrêmes pour préserver l’image du Rassemblement National. Cette prudence est également influencée par l’opinion publique française, majoritairement négative envers Trump, ce qui soulève des interrogations sur la stratégie du RN face à sa base électorale.
Le mouvement populiste de droite en Europe connaît une ascension remarquable. Un vent de changement souffle, avec des électeurs qui ont infligé une défaite tant attendue à l’establishment de gauche. Le retour de Donald Trump sur la scène politique a suscité une vague d’enthousiasme parmi des figures comme Viktor Orban, Geert Wilders et Herbert Kickl, qui n’ont pas tardé à le féliciter pour sa réélection.
Matteo Salvini, le vice-premier ministre italien, a même partagé un montage de portraits avec le slogan « Rendre à l’ouest sa grandeur », se positionnant aux côtés de Trump et d’Elon Musk. Ce collage met en avant d’autres leaders populistes de droite, mais une seule femme émerge de ce tableau : Marine Le Pen, présidente du Rassemblement National (RN) français, qui a réagi d’une manière plus mesurée à la victoire de Trump.
Un changement de ton notable
Marine Le Pen a exprimé une position nuancée, notant que la démocratie américaine a clairement désigné son président. Dans ses félicitations sur X, elle a évité le ton polémique, optant plutôt pour des phrases diplomatiques. Elle a évoqué l’espoir d’une nouvelle ère politique, axée sur le renforcement des relations bilatérales et d’une coopération constructive sur la scène internationale.
Ses déclarations, tout comme celles de Jordan Bardella, président du RN, sont marquées par la retenue, contrastant fortement avec les réactions de leurs homologues populistes en Europe. Ce changement de ton est d’autant plus frappant par rapport à son propre passé : en 2016, elle avait chaleureusement salué l’élection de Trump avant qu’elle ne soit confirmée, et en 2020, elle avait reconnu sa défaite électorale seulement après les événements tragiques survenus au Capitole.
Les enjeux d’image et l’opinion publique
Le politologue Jean-Yves Camus souligne plusieurs raisons derrière cette retenue de Le Pen. D’une part, elle cherche à éloigner le RN de l’image d’un parti associé à des comportements misogynes et extrêmes, en pleine campagne électorale. De plus, le RN est conscient que les politiques économiques de Trump pourraient nuire à la France, car des droits de douane sur les produits européens pourraient avoir des répercussions sur l’emploi français. Le Pen et ses collègues insistent donc sur la nécessité de défendre les intérêts français et européens.
Enfin, la relation potentielle entre Trump et Poutine constitue un sujet sensible pour Le Pen, qui souhaite éviter d’être perçue comme une alliée d’un parti pro-russe, surtout après l’invasion de l’Ukraine. Elle s’est efforcée de se distancier du Kremlin ces derniers temps.
Une perception négative de Trump en France
Un autre facteur pourrait expliquer cette prudence : le scepticisme général à l’égard de l’Amérique et l’opposition à Trump dans l’opinion publique française. Selon un sondage d’Elabe réalisé le 6 novembre, 80 % des Français ont une image négative de Trump, y compris la moitié des électeurs du RN. Cela soulève la question de savoir si la réaction de Le Pen est influencée par l’humeur de sa base électorale.
Jean-Yves Camus souligne qu’il est difficile de trancher sur ce point en l’absence de sondages récents, mais il existe une possibilité de divergence entre la stratégie du RN et les opinions des électeurs. Malgré cela, les partisans du RN pourraient trouver des raisons de célébrer la réélection de Trump, qui symbolise une victoire du peuple sur les élites et un retour aux intérêts nationaux face à la mondialisation.