lundi, novembre 25, 2024

Les Alpes, source d’énergie renouvelable : l’intérêt croissant des entreprises électriques européennes pour la Suisse

La Suisse maintient une distance vis-à-vis de l’UE, mais les entreprises énergétiques européennes souhaitent une intégration sur le marché de l’électricité. Des négociations entre la Suisse et l’UE, entamées de 2007 à 2018, n’ont pas abouti. Un nouvel accord pourrait faciliter les échanges et optimiser le marché, cependant, la libéralisation du secteur suisse soulève des inquiétudes politiques et un conflit d’intérêts. Les entreprises suisses pourraient bénéficier d’une coopération accrue, notamment grâce à l’hydroélectricité.

La Suisse préfère maintenir une certaine distance vis-à-vis de ses voisins européens. Cependant, dans certains domaines, ces derniers seraient ravis d’accueillir le pays. Cela est particulièrement vrai en ce qui concerne l’électricité.

Les entreprises énergétiques de l’Union européenne sont impatientes que les sociétés d’électricité suisses s’impliquent dans le marché intérieur. Peter Scheerer, un expert en affaires européennes chez Transnet BW, un opérateur de réseau basé en Bade-Wurtemberg, affirme : « Ignorer la Suisse serait une erreur capitale. »

Ce sentiment est partagé par de nombreux responsables au sein de l’UE. « Une plus grande intégration sur le marché de l’électricité renforce la sécurité d’approvisionnement en Europe », souligne Andreas Schwab, député européen de la CDU.

Un long chemin de négociations sans résultats

Ce qui semble à la fois économiquement et techniquement sensé a jusqu’à présent échoué sur le plan politique. Les négociations concernant un accord sur l’électricité entre la Suisse et l’UE, qui ont eu lieu de 2007 à 2018, n’ont jamais abouti. Les discussions ont échoué en partie à cause de problèmes politiques persistants : il n’a pas été décidé si la Suisse devait adopter automatiquement les nouvelles législations de l’UE et comment les différends éventuels devraient être résolus.

Des pourparlers ont repris en mars dernier, avec l’objectif d’inclure un accord sur l’électricité dans un nouvel accord bilatéral entre la Suisse et l’UE.

Un tel accord optimiserait le marché européen de l’électricité et réduirait les coûts de transaction. Bien que la Suisse soit déjà connectée au marché européen de l’électricité par divers moyens, elle n’en fait pas encore pleinement partie.

Cela complique les échanges d’informations et, par conséquent, l’échange d’électricité. Une communication efficace entre les opérateurs de réseau est essentielle pour un marché fonctionnel.

Pour assurer un approvisionnement électrique fiable, les fournisseurs européens doivent, par exemple, coordonner leurs capacités de réseau transfrontalières. Celles-ci peuvent varier en fonction de la maintenance des centrales électriques ou des lignes à haute tension, ainsi que du pourcentage d’énergie renouvelable disponible.

Actuellement, Swissgrid, l’opérateur de réseau suisse, gère les flux d’électricité avec ses partenaires européens par le biais de contrats privés. Il existe un accord avec le groupe de coordination Italy North, qui englobe l’Italie, la France, l’Autriche et la Slovénie, ainsi qu’un nouvel accord avec le groupe de coordination Core, qui regroupe treize pays au nord et à l’est de la Suisse.

Cependant, ces contrats sont temporaires et nécessitent une renégociation régulière. Si un accord sur l’électricité était établi entre la Suisse et l’UE, cela garantirait la participation automatique de la Suisse à ces groupes de coordination, sécurisant ainsi la coopération juridique.

« La Suisse, située au cœur de l’Europe avec des connexions réseau solides avec ses voisins, doit impérativement coordonner ses efforts dans le domaine de l’électricité », déclare Wolfgang Urbantschitsch, directeur de l’autorité de régulation autrichienne E-Control. « Un accord faciliterait considérablement cette coordination, ce qui est souhaitable. »

C’est l’une des raisons pour lesquelles l’industrie électrique européenne, ainsi que l’industrie électrique suisse, plaident en faveur d’un accord.

L’hydroélectricité suisse : une solution de stockage d’énergie

Les entreprises énergétiques européennes ont également un intérêt économique à un tel accord. Plus l’énergie éolienne et solaire est développée en Europe, plus la production d’électricité devient instable. Parfois, le vent est faible, notamment en mer du Nord, entraînant une baisse de la production éolienne, suivie de périodes de surproduction, ce qui fait chuter les prix.

Un gestionnaire d’électricité allemand a observé qu’il n’y a jamais eu autant d’heures avec des prix négatifs sur les marchés européens qu’au cours de cette année. Pour les exploitants d’hydroélectricité suisses, cela représente une opportunité commerciale. Ils peuvent être rémunérés pour le pompage d’eau dans les centrales de stockage. En soirée, ces entreprises peuvent exporter de l’électricité vers l’Allemagne, ce qui fait baisser les prix dans ce pays, profitant ainsi aux ménages et aux entreprises.

Les exigences de l’UE envers la Suisse en matière de libéralisation

En Suisse, un accord sur l’électricité est perçu comme un sujet délicat sur le plan politique. Les entreprises d’électricité auraient libre accès au marché de l’UE, mais en contrepartie, l’UE exige la libéralisation du marché suisse pour établir un « terrain de jeu équitable ». Cela donnerait aux consommateurs suisses la possibilité de choisir leur fournisseur d’électricité.

En Suisse, le secteur de l’électricité est largement public. Les liens entre la politique et cette industrie sont étroits, et les critiques soulignent un chevauchement excessif entre les deux. Cela crée un conflit d’intérêts : alors que la politique doit veiller à ce que les ménages et les entreprises bénéficient de tarifs abordables, elle génère également des revenus grâce à l’électricité. Une libéralisation pourrait rompre ces structures.

Cependant, l’électricité est considérée en Suisse comme un service public, souvent perçu comme un sanctuaire. Beaucoup restent sceptiques quant à la libéralisation, certains estimant que le capital privé n’a pas sa place dans une infrastructure essentielle, tandis que d’autres la trouvent fastidieuse, car elle impliquerait de choisir son propre fournisseur d’électricité.

Cependant, ce que les Européens réussissent, les Suisses devraient également pouvoir le réaliser : établir un contrat avec un fournisseur privé. De plus, comme dans les pays de l’UE, la Suisse continuera d’assurer un approvisionnement de base, permettant aux ménages de se procurer facilement de l’électricité.

Des tarifs d’électricité plus bas pour les Suisses ?

Cependant, la libéralisation du marché de l’électricité peut entraîner des complications pour les consommateurs. Par exemple, en Autriche, la situation est comparable.

- Advertisement -

Latest