Le PDG de Telegram, Pavel Dourov, va comparaître devant un tribunal pour une éventuelle mise en examen après sa sortie de garde à vue, ont annoncé mercredi les autorités françaises. « Un juge d’instruction a mis fin à la garde à vue de Pavel Dourov et va le faire comparaître devant un tribunal pour une première comparution et une éventuelle mise en examen », selon un communiqué du parquet de Paris cité par un article de l’Associated Press.
Dourov a été arrêté samedi à Paris et interrogé par la police pendant plusieurs jours. Le juge d’instruction français va « décider s’il doit être mis en examen à la suite de son arrestation dans le cadre d’une enquête sur le crime organisé sur l’application de messagerie », a écrit Reuters dans un communiqué.
« Le fait d’être mis en examen en France n’implique pas la culpabilité ni ne conduit nécessairement à un procès, mais indique que les juges considèrent que l’affaire est suffisamment solide pour poursuivre l’enquête. Les enquêtes peuvent durer des années avant d’être renvoyées devant un tribunal ou classées », a écrit Reuters. La décision du juge sur l’ouverture d’une enquête officielle est attendue aujourd’hui, selon l’article.
Lundi, la procureure Laure Beccuau a publié un communiqué indiquant que Durov avait été arrêté « dans le cadre d’une enquête judiciaire » sur une « personne non identifiée ». Le libellé laisse ouverte la possibilité que la personne non identifiée soit quelqu’un d’autre, mais le communiqué de la procureure énumère une série d’accusations potentielles qui pourraient indiquer de quoi Durov pourrait être accusé.
La police a été autorisée à détenir Durov pendant 96 heures, conformément à la « procédure applicable aux infractions liées au crime organisé », a précisé le communiqué. Cette période de 96 heures devait expirer aujourd’hui.
Trois chefs d’accusation potentiels sont liés au chiffrement. Ces chefs d’accusation sont les suivants : « fourniture de services de cryptologie visant à assurer la confidentialité sans déclaration certifiée », « fourniture d’un outil de cryptologie n’assurant pas uniquement l’authentification ou le contrôle d’intégrité sans déclaration préalable » et « importation d’un outil de cryptologie assurant l’authentification ou le contrôle d’intégrité sans déclaration préalable ».
En vertu de la loi française, les fournisseurs de cryptologie doivent faire des déclarations auprès de l’ANSSI, l’agence nationale de cybersécurité.
Telegram propose un mélange de fonctionnalités de messagerie privée et de réseau social. Les messages Telegram ne disposent pas de cryptage de bout en bout par défaut, mais la fonction de sécurité peut être activée pour les conversations en tête-à-tête.
Les autorités françaises auraient également émis un mandat d’arrêt contre le frère de Durov et cofondateur de Telegram, Nikolai. Des mandats d’arrêt contre les deux hommes ont été émis en mars, selon Politico.
Focus sur les contenus pédopornographiques
D’autres chefs d’accusation possibles énumérés dans le communiqué du procureur semblent concerner un manque de modération sur Telegram et un refus de coopérer avec les forces de l’ordre. Parmi les chefs d’accusation possibles figurent la complicité de possession et de distribution d’« images pornographiques de mineurs » et la complicité de trafic de drogue.
Le procureur a également évoqué d’éventuelles accusations de complicité de « webmastering d’une plateforme en ligne afin de permettre une transaction illégale en groupe organisé » et de « refus de communiquer, à la demande des autorités compétentes, des informations ou documents nécessaires à la réalisation et à l’exploitation d’interceptions autorisées par la loi ».
En réponse à l’arrestation de Durov, Telegram a déclaré qu’il respectait la loi et les normes de l’industrie en matière de modération et a qualifié d’« absurde de prétendre qu’une plateforme ou son propriétaire sont responsables de l’abus de cette plateforme ».
Plusieurs articles de presse ont fait état cette semaine du refus apparent de Telegram de rejoindre les programmes de protection de l’enfance utilisés par d’autres réseaux sociaux. « L’application n’est membre ni du National Center for Missing and Exploited Children (NCMEC) ni de l’Internet Watch Foundation (IWF), qui collaborent tous deux avec la plupart des plateformes en ligne pour trouver, signaler et supprimer ce type de contenu », a écrit la BBC.
Benjamin Bull, avocat général du NCMEC, a déclaré à NPR que « vous trouverez de la pornographie juvénile, CSAM, sur X, sur TikTok, sur toutes les principales plateformes Internet. Mais Telegram est un monde à part ». Bull a déclaré que « Telegram a refusé de coopérer avec nous. Plus nous les contactons, plus ils refusent de répondre. Ils se sentent au-dessus des lois. Ils ont l’impression de pouvoir faire ce qu’ils veulent ».