Large mer des Sargasses de Jean Rhys


« Je connaissais l’heure de la journée où bien qu’il fasse chaud et bleu et qu’il n’y ait pas de nuages, le ciel peut avoir un aspect très noir. »

Dès les premières pages, cette histoire a un sentiment de malice derrière elle. Il y a un sentiment de malheur imminent qui émane, qui pulse pratiquement du livre. Comme si vous saviez que quelque chose de grave allait arriver.

Ce qu’il fait bien sûr.

C’est l’histoire d’Antoinette Cosway. D’origine créole, elle n’est ni noire ni blanche. Et n’est pas pleinement accepté par l’un ou l’autre. Ce n’est pas un endroit confortable.

« C’est une créole, et elle a le soleil en elle. »

Fille d’un propriétaire d’esclaves, elle se déroule dans les Caraïbes. Le changement est venu avec l’émancipation et la libération des esclaves. Et avec ce changement, l’agitation et la haine.

Partie 1 est raconté par Antoinette. C’est raconté de son point de vue d’un enfant à une jeune femme. À travers ses yeux, nous voyons la beauté de l’île sur laquelle elle vit. Les couleurs et les parfums étonnants. Comme le paysage est brillant et luxuriant. Les montagnes. L’eau. « … la mer était d’un bleu serein, profond et sombre. » On a l’impression qu’Antoinette n’est vraiment en paix et à l’aise que dans la nature, qu’elle se sent en harmonie avec elle, plutôt qu’entre les gens. Elle raconte son enfance troublante et les troubles entre les gens. Du veuvage de sa mère et du remariage ultérieur. Son petit frère malade. Nous voyons une tragédie s’abattre sur sa famille, et c’est vraiment horrible.

Le passage qui montre le sort du perroquet familial « J’ai ouvert les yeux, tout le monde levait les yeux et montrait Coco sur les balustrades du glacis avec ses plumes allumées. Il a fait un effort pour voler vers le bas mais ses ailes coupées l’ont abandonné et il est tombé en hurlant. Il était tout en feu. » est si puissant. Bouleversant. Choquant.

Ces mots resteront gravés dans mon esprit pour toujours. Elles sont trop viscérales pour être supprimées.

Partie 2 est racontée par le mari d’Antoinette. On n’apprend jamais son nom. Au début, j’avais pitié de lui. Il semblait décent, qu’il avait une gentillesse innée. Il a épousé Antoinette moins d’un mois après l’avoir rencontrée et, à ce moment-là, il a été malade au lit pendant trois semaines avec de la fièvre. Ce n’était donc pas une romance enivrante et tourbillonnante. De deux âmes destinées à se rencontrer.

Malheureusement, l’argent – beaucoup d’argent – a changé de mains. Antoinette a été effectivement achetée (ou vendue), quelle que soit la façon dont vous voulez le voir.

« L’or est l’idole qu’ils adorent. »

Il n’est jamais tout à fait à l’aise chez Antoinette, sur son île. Tout le submerge. Tout est trop lumineux. Trop vibrant. Les couleurs, les odeurs. Il n’est pas à l’aise, ni dans les environs ni avec les gens. Il a un sentiment d’inquiétude, de méfiance. Tout ce qu’il veut, c’est qu’ils retournent en Angleterre.

« Trop de bleu, trop de violet, trop de vert. Les fleurs trop rouges, les montagnes trop hautes, les collines trop proches…

Mais cela étant dit, j’avais l’impression qu’il avait des sentiments pour Antoinette, au moins au début. Qu’il tenait à elle. Qu’il y avait une certaine émotion impliquée. Qu’il était un homme gentil. Qu’il aurait pu se transformer en amour. Il était certainement ravi de sa beauté, qui semblait en quelque sorte liée au lieu de sa naissance. Peut-être que cela aurait pu fonctionner entre eux. Mais son esprit s’est empoisonné contre elle, avec l’arrivée d’une lettre… Cela a joué dans son esprit, et il l’a pris à bord. Ensuite, chaque mouvement qu’elle faisait et chaque mot qu’elle prononçait était rempli de suspicion de sa part. Il ne pouvait tout simplement pas dépasser ses doutes et bloquer les mots des autres qui étaient simplement jaloux et remplis de dépit. Ses sentiments s’étaient une fois refroidis et ne pouvaient plus être réchauffés.

Malheureusement, le sort d’Antoinette n’a pas diminué lorsqu’elle a atteint la féminité. Le mariage n’était pas le refuge qu’elle avait peut-être recherché, même si ce n’était pas la voie qu’elle s’était choisie.

« Est-ce que toutes les belles choses ont des destins tristes ? »

Partie 3 Le retour en Angleterre pour le couple malheureux. Pour Antoinette un « monde en carton », toutes les nuances atténuées de brun, rouge et jaune. Les malentendus et la haine ne peuvent être surmontés. C’est la section la plus courte du livre, à peine six pages. C’est dévastateur.

« Les noms comptent, comme quand il ne m’appelait pas Antoinette, et j’ai vu Antoinette dériver par la fenêtre avec ses parfums, ses jolis vêtements et son miroir. »

« Maintenant, ils ont tout emporté. Qu’est-ce que je fais ici et qui suis-je ? »

« J’écoute mais je ne comprends pas ce qu’ils disent. Il y a donc toujours le son de chuchotement que j’ai entendu toute ma vie, mais ce sont des voix différentes. »

Une robe rouge accrochée dans la presse rappelle à Antoinette sa maison. Celui vers qui elle ne reviendra jamais. C’est son dernier lien.

« L’odeur qui émanait de la robe était d’abord très faible, puis elle s’est renforcée. L’odeur du vétiver et du frangipanier, de la cannelle et de la poussière et des tilleuls en floraison. L’odeur du soleil et l’odeur de la pluie.

Pourquoi les gens sont-ils si pauvres pour dire ce qui est vraiment dans leur cœur, ce qu’ils ressentent vraiment ? Pourquoi permettons-nous au silence et aux malentendus de parler pour nous ? De quoi avons-nous si peur ?

En lisant ce livre, cela m’a attristé de penser que les êtres humains n’ont pas tellement changé au fil des ans. Nous aimons toujours mettre des étiquettes sur les gens. Pour les mettre dans de jolies petites boîtes qui nous font nous sentir mieux dans notre peau. Dénigrer une enfant en la traitant de « cafard blanc » et de « nègre blanc » était une confrontation et me mettait très mal à l’aise. C’était laid et inutilement cruel. Après tout, où nous sommes nés et à qui tout est à un coup de dés, n’est-ce pas. Tout cela fait partie du hasard de la vie.

Et traiter les femmes – traiter n’importe qui – comme sans valeur, comme rien de plus qu’un tremplin ou une marchandise… Je n’ai pas de mots.

La culpabilité génétique – être la fille d’un propriétaire d’esclaves – est la loterie de la vie. Encore une fois, je n’ai pas de mots.

L’écriture est morose et atmosphérique. Il a ce style gothique corsé, sensuel et si descriptif. Il y a eu de nombreuses fois où cela m’a tellement rappelé celui d’Anne Rice Entretien avec un vampire. C’est comme si vous pouviez atteindre les pages et sentir la chaleur et goûter les parfums dans l’air.

C’est beau.

« J’ai respiré la douceur de l’air. Je pouvais sentir des clous de girofle et de la cannelle, des roses et de la fleur d’oranger.

Un autre aspect que j’ai adoré est la relation entre Antoinette et Christophine, son infirmière d’enfance, qui a essayé de soutenir Antoinette quand elle a réalisé que son mari se détournait d’elle.

Accusé de pratiquer obeah (vaudou), Christophine est une Jamaïcaine audacieuse et loyale. L’acte d’émancipation n’a pas changé ses sentiments envers Antoinette. Ni envers les autres. Les personnes pourries peuvent être de n’importe quelle couleur sous l’arc-en-ciel. Elle connaît la nature humaine.

Quelques joyaux de sagesse artisanale sont sortis des lèvres de Christophine. Elle pourrait encore les prononcer aujourd’hui, elle est délicieusement impertinente.

« Quand l’homme ne t’aime pas, plus tu essaies, plus il te déteste, mec comme ça. »

« Un homme ne te traite pas bien, prends ta jupe et sors. »

« Tu penses que tu me trompes ? Tu veux son argent mais tu ne veux pas d’elle. »

N’oubliez pas que cette histoire se déroule dans les années 1830, Christophine est donc une femme en avance sur son temps.

Avec environ 140 pages, cette nouvelle contient une quantité incroyable d’inquiétude et de troubles émotionnels. C’est intense.

C’est un aperçu très intéressant de la nature humaine, ce qui nous anime. Nos peurs et jalousies. Et comment le destin ne peut pas être dépassé.

Sur une note plus légère, je ne sais pas pourquoi, mais avant de lire ceci, je pensais que le titre était Sauvage mer des Sargasses. C’est ce que j’avais en tête pendant des années. Quel que soit le titre, j’ai adoré ce livre et l’écriture de Jean Rhys. J’ai hâte de continuer à jouer au rattrapage et à lire ses autres travaux. Il y a quelque chose dans son écriture… Je sais que j’ai un exemplaire de Bonjour, minuit que j’ai depuis plus d’années que je veux bien l’admettre. Sur la base de celui-ci, je pense qu’il est temps de rester coincé et de se perdre dans ses livres.

Ce livre a eu un impact incroyable sur moi. Je ne m’attendais pas à ça.


« Mais qu’en est-il du bonheur, pensai-je d’abord, n’y a-t-il pas de bonheur ? Il doit y avoir. Oh bonheur bien sûr, bonheur, eh bien.



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