La vie des femmes noires, à la maison et à l’étranger

LA MAGIE DE PERSONNE
Par Destiny O. Birdsong
355 pages. Grand Central. 28 $.

« Nobody’s Magic » est présenté comme un roman, mais il s’agit en réalité de trois nouvelles, chacune sur une femme noire différente atteinte d’albinisme à Shreveport, en Louisiane. Ce sont toutes des histoires de passage à l’âge adulte, d’une sorte : la vieille Suzette se libère de son père autoritaire; Maple est aux prises avec la perte soudaine et violente de sa mère; et Agnès, une universitaire en difficulté, essaie désespérément de trouver un moyen de vivre selon ses propres conditions, au lieu d’un marché du travail brutal ou d’un homme. Plutôt que de se chevaucher, les romans résonnent les uns avec les autres, permettant à Birdsong, un poète, d’afficher une gamme impressionnante de perspectives. Le livre éclaire également les coins habités d’une ville aux multiples facettes, où les gros titres comme la gentrification, la précarité économique et la criminalité prennent une dimension humaine.

Une source frappante de résonance est la description que fait Birdsong de la sexualité de ses personnages : franche, sans gêne et souvent ravissante. Bien que Suzette soit vierge, ses conversations avec sa meilleure amie sur la masturbation et le sexe sont décontractées et conscientes – le but de son propre plaisir étant donné. Dans une scène époustouflante, Maple regarde le film pornographique que sa mère a réalisé l’année précédant sa mort. En la voyant accomplir un certain nombre d’actes sexuels, Maple est émue par la joie évidente de sa mère. « Elle avait l’air d’avoir retrouvé la douceur de vivre », pense Maple, « quelque chose que je savais, dès le moment où je l’ai vue à l’écran, que je n’avais jamais goûté. » Ces passages contrastent de manière déchirante avec ceux d’Agnès ; elle consent à des relations sexuelles qu’elle trouve dégradantes ou qu’elle ne désire pas, en partie parce qu’elle dépend financièrement de ses partenaires et parce qu’elle ne pense pas qu’elle mérite mieux. Agnès va plus loin dans son histoire que les jeunes femmes, à la fois littéralement et métaphoriquement, pour arriver à un sentiment ténu de liberté.

Birdsong risque de ne pas aimer ses personnages, leur permettant l’égoïsme, la rage, la violence, l’impuissance et les erreurs, petites et grandes. En conséquence, ils se sentent aussi idiosyncratiques, imprévisibles et réels que les gens de la vie, parlant avec des voix mélodiques et tout à fait spécifiques. La magie ici n’est pas du genre surnaturel, mais plutôt une attention à la grâce de l’ordinaire. C’est la magie de voir ces femmes entrer en leur pouvoir.

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