Le retrait potentiel du Royaume-Uni de la CEDH suscite des inquiétudes concernant une dérive vers l’extrême droite, selon des opposants politiques. En Allemagne, des voix s’élèvent également pour envisager un départ de la CEDH, critiquant son interprétation élargie du droit d’asile. Ce contexte soulève des questions sur le rôle de la cour et sa capacité à maintenir la protection des droits de l’homme sans empiéter sur les prérogatives démocratiques des États.
Lorsque les députés conservateurs envisagent le retrait du Royaume-Uni de la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH), leurs opposants y voient un signe inquiétant d’une dérive vers l’extrême droite.
Nick Thomas-Symonds, Paymaster General dans l’équipe de Keir Starmer, avertit que cela pourrait transformer le Royaume-Uni en un « État paria », incitant ainsi les dictateurs à croire que les droits de l’homme ne sont plus une priorité.
Mais qu’en est-il de cette déclaration d’un haut responsable allemand qui suggère que son pays envisage aussi de quitter la CEDH si celle-ci persiste à bloquer les mesures de contrôle de l’immigration illégale ?
Jens Spahn, ancien ministre dans le gouvernement d’Angela Merkel, déclare que « ce n’est pas un impératif divin que nous devions rester membres ».
Une décision controversée
Bien qu’il se déclare « multilatéraliste convaincu », Spahn soutient que la CEDH a élargi son interprétation du droit d’asile, bien au-delà de l’intention initiale des rédacteurs de la Convention des années 1950.
Il s’avère donc que l’idée de quitter la CEDH n’est pas réservée uniquement à quelques députés conservateurs marginaux.
Spahn n’est pas un extrémiste ; il est membre de l’Union chrétienne-démocrate, un parti de centre-droit qui a dominé la politique allemande pendant la majeure partie des quatre dernières décennies et a toujours soutenu une intégration européenne accrue.
Si même le CDU envisage de se retirer de la CEDH, cela soulève de sérieuses questions sur le fonctionnement de cette cour.
À l’origine, la CEDH, fondée en 1959, représentait une initiative noble, destinée à surveiller les gouvernements cherchant à restreindre les droits des citoyens, afin d’éviter l’émergence d’un autre tyran comme Hitler.
Bien que la CEDH ait été respectée durant ses deux premières décennies, son rôle a progressivement évolué. Grâce à la « doctrine de l’instrument vivant », les juges ont commencé à adapter la convention, ajoutant des protocoles pour l’actualiser.
Ce processus a conduit à l’apparition de juges activistes qui créent de nouveaux droits sans légitimité démocratique. Dans une démocratie saine, les élus établissent la loi, tandis que la CEDH se positionne pour interpréter la loi elle-même.
Il n’est donc pas surprenant que des cas absurdes émergent, comme celui de dealers de drogue albanais qui ne peuvent être expulsés du Royaume-Uni en raison de leur prétendu « droit à une vie de famille ».
Les rédacteurs de la Convention des années 1950 seraient consternés de voir leur œuvre désormais utilisée pour défendre des criminels.
De même, la décision ridicule de la CEDH sur la Suisse, affirmant que le gouvernement avait violé les droits des citoyens âgés pendant une vague de chaleur, montre une dérive inquiétante. Le gouvernement a été blâmé pour ne pas avoir fixé un objectif net zéro approprié.
Ce constat est partagé par des personnalités influentes, comme l’ancien juge de la Cour suprême Jonathan Sumption, qui plaide également pour un retrait de la CEDH, affirmant qu’elle a dévalué le concept de droits de l’homme en l’appliquant à des domaines comme l’urbanisme et le droit du travail, qui relèvent des politiciens, pas des juges.
Une crise de confiance croissante
Ce phénomène ne touche pas seulement l’Allemagne ; d’autres États semblent également perdre foi en la CEDH. D’ailleurs, le Royaume-Uni a été plus conformiste que la plupart des pays, appliquant 96 % des jugements rendus contre lui, contre 92 % pour la France, 89 % pour l’Allemagne et 83 % pour le Danemark.
La CEDH n’a pourtant pas freiné les abus de certains régimes, comme celui de Poutine, qui a été suspendu après l’invasion de l’Ukraine, tout en continuant à réprimer les dissidents.
Des ministres allemands ont déjà évoqué des solutions controversées pour traiter les demandeurs d’asile, comme les installations au Rwanda, financées par les contribuables britanniques, avant que Keir Starmer ne mette fin à ce programme sans alternative viable pour contrôler l’immigration illégale.
Il semble que le parti conservateur britannique ouvre la voie, suivi par son homologue allemand. Quitter la CEDH pour mieux gérer l’immigration illégale et s’attaquer aux criminels protégés par des jugements de la cour apparaît comme une nécessité pressante.