vendredi, novembre 22, 2024

Kelly McParland : La clause Canada dont le Québec raffole

La province est déterminée à suivre ses propres penchants, peu importe ce que pense le reste du pays, et la clause nonobstant permet que

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Si jamais vous vous trouvez dans une situation où vous devez prouver votre bonne foi au Canada et que vous n’avez pas la moindre documentation pour le faire, commencez simplement à parler de la clause nonobstant. Personne d’autre qu’un Canadien ne penserait à une telle chose. Ou dépenserait tant d’efforts à se battre à ce sujet.

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Je suis membre de la fraternité des Canadiens assez anciens pour rappeler le pays avant l’avènement de la Constitution et de sa Charte en 1982. C’était un endroit paisible, tolérant et prospère qui embrassait l’immigration et la modération, et était rempli de gens qui essayaient généralement s’entendre les uns avec les autres.

Mais Pierre Trudeau avait une vision et était déterminé que le pays serait un endroit meilleur, plus avancé et plus civilisé si les droits et libertés que nous tenions pour acquis étaient écrits sur papier afin que les tribunaux puissent régulièrement proposer des interprétations mises à jour et décider si ces les interprétations étaient ou n’étaient pas observées. Un certain nombre de grandes décisions ont été rendues puisque puis, sur les droits légaux, la liberté religieuse, l’accès à l’avortement, les discours de haine, la discrimination fondée sur le sexe et le genre et autres. Il est impossible de savoir si le Canada aurait été moins ouvert d’esprit sur ces questions si les juges des tribunaux n’avaient pas été là pour rendre des jugements. Serions-nous tous heureux de discriminer les mariages homosexuels ou de rejeter les libertés religieuses si la Charte n’avait pas été rédigée?

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Commencez simplement à parler de la clause nonobstant

En tout cas, il est là et est actuellement sous la contrainte parce que ses auteurs ont inclus une clause permettant aux premiers ministres provinciaux de l’ignorer. La clause nonobstant fait plisser le nez des experts en charte de mécontentement. Ils y voient une carte de « sortie de prison sans frais », une excuse pour autoriser exactement le genre d’abus contre lequel un document sur les droits est censé protéger. Notre premier ministre dit que son père n’a pas aimé ça et lui non plus. C’est « fondamentalement une échappatoire qui permet à une majorité d’outrepasser les droits fondamentaux d’une minorité », dit-il.

Cependant, il ne déteste pas assez le fait de prendre des mesures plus agressives sur le problème qui cause les frictions actuelles. Sans surprise, il s’agit du Québec et de sa détermination à suivre ses propres penchants quoi qu’en pense le reste du pays. Le Québec n’a jamais signé la Constitution et il est l’utilisateur le plus fréquent de la clause nonobstant. Et pourquoi ne le serait-il pas ? S’il était là dans un but, pourquoi ne pas l’utiliser ?

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Le dégoût pour l’invocation de la clause provient, nous dit-on, du fait qu’elle a été incluse en supposant qu’elle serait rarement utilisée. Je ne sais pas qui est à l’origine de cette hypothèse, ou si elle a déjà été valable dans d’autres esprits que ceux qui la professent. Selon pour l’Encyclopédie canadienne, la clause était un ajout de dernière minute concocté alors qu’il semblait que les pourparlers pourraient échouer, ce qui a convaincu certains premiers ministres réticents à signer mais a exaspéré le Québec même à l’époque. L’idée que les premiers ministres aient hésité à poursuivre des projets législatifs si leur réalisation nécessitait d’invoquer la clause n’est pas tout à fait évidente. En plus du Québec, il a également été utilisé en Saskatchewan, en Alberta, en Ontario et au Yukon.

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Le sort de Fatemeh Anvari, l’enseignante de 3e année à qui on a dit que son hijab enfreignait le projet de loi 21 du Québec, qui interdit aux travailleurs de certains postes du secteur public de porter des symboles religieux visibles, a bouleversé Ottawa. La chef conservatrice Erin O’Toole, qui ne semble pas pouvoir passer une semaine sans avoir à affronter son propre caucus, a dit aux membres conservateurs de dénoncer la controverse pendant que le parti conduit une consultation interne et prend position — plus de deux ans après l’entrée en vigueur de la loi. Le Premier ministre Justin Trudeau a déclaré qu’il n’avait pas exclu d’intervenir dans l’affaire, bien qu’il le dise depuis l’adoption du projet de loi et qu’il n’a encore rien fait de substantiel pour le soutenir. La raison de leurs réticences est partagée : ils ont peur de bouleverser le Québec, ce qui n’est le cas d’aucune autre province ou territoire.

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Trudeau ne serait pas premier ministre sans les votes du Québec et n’a qu’un gouvernement minoritaire. O’Toole comprend qu’il est peu probable qu’il décroche le poste de Trudeau sans le soutien de la province. Il a déjà fait un certain nombre de concessions aux sensibilités québécoises qui ne tiennent pas particulièrement bien dans certains coins de son caucus. Les libéraux font preuve d’une plus grande discipline en avalant leurs principes que les conservateurs rétifs, même si c’est une bonne chose ou non est à débattre.

L’espoir de Trudeau est que les tribunaux québécois décideront finalement que la loi est discriminatoire et lui éviteront les ennuis qui découleraient d’une intervention. Il a de bonnes raisons de présumer qu’une décision fédérale compliquerait les choses : les experts québécois prétendent déjà que toute intrusion extérieure du Canada anglais serait juste ce qu’il faut pour susciter une renaissance de la ferveur séparatiste. C’est peut-être vrai ou pas, mais il est à peu près certain qu’un opérateur qualifié comme le premier ministre François Legault saurait utiliser un conflit pour obtenir plus de concessions d’Ottawa et maximiser davantage le traitement spécial de sa province, surtout lorsque les dirigeants fédéraux d’aujourd’hui sont si disposés à accorder dans la pression.

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En fin de compte, le premier ministre peut obtenir son souhait, bien que le voyage juridique puisse prendre des années et aboutir devant la même Cour suprême, la clause est un moyen de se soustraire. Il est possible que ni Trudeau ni O’Toole ne soient toujours dans leur emploi d’ici là, tandis que, dans l’intervalle, les minorités au Québec seront toujours interdites de certains emplois au nom de leur religion. De toute façon, le résultat n’est pas de nature à changer la réalité durable du Canada, que le Québec a constamment vu ses pouvoirs et prérogatives renforcés par des compromis et des concessions réguliers d’Ottawa, qui ne veut pas défendre ses principes proclamés avec la même férocité que Les Québécois défendent les leurs.

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