vendredi, novembre 15, 2024

Jack Mintz : La frustration accumulée est à l’origine de la loi sur la souveraineté de l’Alberta

La question est de savoir pourquoi nous en sommes à ce stade et que devraient faire les gouvernements à ce sujet

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Avec l’introduction par le gouvernement de la première ministre Danielle Smith de la loi sur la « souveraineté de l’Alberta au sein d’un Canada uni », une nouvelle phase des relations fédérales-provinciales a été franchie. La question de l’heure est de savoir pourquoi nous en sommes à ce stade et ce que les gouvernements devraient faire à ce sujet.

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La Loi sur la souveraineté vise les lois ou les politiques fédérales qui sont inconstitutionnelles ou préjudiciables à la population ou à la prospérité de la province, et donc incompatibles avec la répartition des pouvoirs de la Constitution canadienne entre le gouvernement fédéral et le gouvernement provincial. Une fois que la législature aura adopté une motion conforme à la loi, les entités provinciales seront tenues de ne pas appliquer une loi fédérale spécifique. Par exemple, la province pourrait ordonner à la police de ne pas appliquer les nouvelles lois fédérales sur le contrôle des armes à feu.

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On écrira beaucoup sur la légalité de l’acte ou sur le degré de soutien des électeurs – mais pas par moi ! Même si la loi respecte les décisions des tribunaux et les droits constitutionnels autochtones et n’exige pas la conformité du secteur privé, il semble que certains conflits fédéraux-provinciaux surgiront et mèneront à des décisions judiciaires. Par exemple, considérons les plafonds fédéraux sur les émissions de GES provenant de l’agriculture et des sables bitumineux. La province est propriétaire des ressources naturelles et contrôle ainsi leur réglementation. D’autre part, le gouvernement fédéral partage la compétence avec la province en matière d’environnement. Même si l’Alberta adopte une motion pour bloquer l’application de tout plafond, les tribunaux devront régler les aspects juridiques entourant ces pouvoirs constitutionnels contradictoires.

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Dans une certaine mesure, le projet de loi de l’Alberta reflète une tendance dans les pays fédéraux à l’augmentation des conflits entre les gouvernements centraux et infranationaux. Aux États-Unis, par exemple, les gouvernements des États et les villes sanctuaires refusent d’appliquer les lois fédérales sur l’expulsion des immigrants illégaux. Le Texas, la Floride et l’Arizona ont ordonné à leurs propres officiers de justice d’arrêter le flux d’immigrants en provenance du Mexique ou de transporter des immigrants illégaux vers New York, Washington et même Martha’s Vineyard.

Une manifestation du ressentiment occidental croissant contre les décisions fédérales unilatérales qui nuisent à leurs économies

La législation albertaine et la Saskatchewan First Act, qui confirme les pouvoirs exclusifs de la Saskatchewan sur les ressources naturelles, sont une manifestation du ressentiment croissant de l’Occident contre les décisions fédérales unilatérales qui nuisent à l’économie de ces deux provinces. Des objectifs d’émissions de carbone irréalistes pour 2030, des politiques unilatérales de taxe sur le carbone, des coûts réglementaires prohibitifs via le projet de loi C-69 – que l’ancien premier ministre Jason Kenney a appelé le «projet de loi contre les pipelines» – l’annulation du pipeline Northern Gateway vers le nord de la Colombie-Britannique, l’interdiction des pétroliers au large de la Colombie-Britannique côte nord, le fiasco de l’expansion de TMX et le manque de plaidoyer fédéral pour Keystone XL ont tous alimenté la colère. L’Alberta se sent particulièrement sous-estimée, compte tenu de son immense transfert de richesse vers le reste du Canada – près de 700 milliards de dollars de plus en impôts fédéraux payés que les dépenses fédérales reçues depuis 1960 (mesurées en dollars de 2022).

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L’Alberta et la Saskatchewan estiment qu’elles ont peu d’influence sur la prise de décision fédérale qui favorise le centre du Canada, riche en votes. Ils voient le gouvernement fédéral actuel se plier en quatre pour ne pas aliéner le Québec — ne pas réparer un système de péréquation qui est clairement injuste pour assurer aucune perte de revenus au Québec, garantir au Québec plus de sièges à la Chambre des communes que sa population ne le mérite, ne pas contester la législation provinciale nuire aux droits des minorités et subventionner des entreprises pour qu’elles opèrent au Québec (y compris Bombardier qui perd de l’argent). Qu’y a-t-il de si surprenant à ce que l’Alberta veuille le même traitement?

Comme l’a soutenu le politologue Donald Savoie, le manque de représentation régionale dans les institutions fédérales, comme un Sénat représentatif des régions, est une préoccupation constante au sein de la Confédération. John A. Macdonald reconnaissait le problème, mais pensait que la représentation régionale serait mieux assurée par le cabinet fédéral. Mais, comme Savoie l’a souligné, le rôle du Cabinet s’est affaibli au fil des ans, le pouvoir étant centralisé au Cabinet du premier ministre, qui monopolise pratiquement le pouvoir aujourd’hui.

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Compte tenu de la faible représentation régionale dans les institutions fédérales, seules les provinces représentent les intérêts régionaux, ce qui contribue à expliquer pourquoi les relations fédérales-régionales ont été si importantes dans notre politique nationale. Parfois, les pouvoirs de dépenses et de taxation ont été dévolus aux provinces – le Canada étant actuellement l’une des fédérations les plus décentralisées au monde. À certains moments, il y a eu une collaboration créative entre les gouvernements fédéral et provinciaux — comme dans le cas des accords de perception fiscale, qui ont mené à un régime fiscal national relativement harmonisé (surtout par rapport aux États-Unis).

Si nous voulons un pays plus unifié, nous avons besoin de plus de coopération de ce genre entre les gouvernements fédéral et provinciaux et moins de conflits et d’unilatéralisme fédéral qui ont conduit à la colère qui a généré les réponses législatives de l’Alberta et de la Saskatchewan. Sinon, nous verrons plus de lois sur la souveraineté provinciale à l’avenir, peu importe à quel point elles s’inscrivent maladroitement dans notre régime constitutionnel.

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