Honte


Lorsqu’elle avait douze ans, Annie Ernaux voit son père menacer de tuer sa mère. Cette expérience dramatique de l’enfance a changé Ernaux d’une manière qu’elle ne pouvait pas pleinement comprendre. Elle s’est donc engagée à analyser pleinement toutes les circonstances de sa vie au moment de l’incident, et les résultats de cet examen constituent le huitième ouvrage publié d’Ernaux, les mémoires La Honte (1997, Paris), traduit en anglais par Honte (1998, New York). Honte a été sélectionné par Éditeurs hebdomadaire comme meilleur livre de 1998.

Dans ce livre, Ernaux ne tente pas de tirer des conclusions. Elle rassemble simplement autant de souvenirs que possible sur sa ville et son école, sa famille élargie et leur statut social dans la communauté, le café et l’épicerie de ses parents, ainsi que sa mère et son père. En parcourant l’actualité et en regardant de vieilles photographies, elle se souvient au plus près des émotions qu’elle a vécues à l’été 1952, lorsque son père leva une faux à la main et menaça sa mère. Ce qu’elle était avant cet incident et ce qu’elle est devenue après sont les forces motrices de cette histoire.

Cependant, les mémoires ne concernent pas seulement l’auteur. Il s’agit également de la petite ville normande dans laquelle elle a grandi et de la structure sociale qui y était en place. Ernaux explore la maladresse de la puberté, l’inflexibilité de l’Église catholique romaine et l’étroitesse d’esprit du sentiment des petites villes qui décrétait que chacun devait s’efforcer d’être comme tout le monde. La honte d’Ernaux, c’est qu’elle se sentait obligée de garder un secret. Elle pensait qu’elle ne devait jamais révéler ce dont elle avait été témoin entre son père et sa mère, de peur d’être ostracisée. Elle ne doit jamais révéler qu’elle ou sa famille était différente d’une manière ou d’une autre.



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