Quel endroit dans le monde incarne le mieux l’anthropocène, une proposition d’époque géologique marquée par la présence de l’homme sur Terre ? C’est le lac Crawford, situé à moins de 70 km à l’ouest de Toronto, selon des scientifiques qui ont dévoilé mardi le site choisi pour étoffer leur dossier.
L’anthropocène, qu’est-ce que c’est ? Ça sonne comme le titre d’un vieux disque d’Harmonium…
Ce n’est pas une chanson de Serge Fiori, mais plutôt une époque géologique caractérisée par l’impact des activités humaines sur la planète.
Ça me semble assez évident que nous vivons à l’époque des humains. Nous sommes 8 milliards sur la planète ! On n’a pas besoin de scientifiques pour savoir ça !
Ce n’est pas aussi simple que ça. Au fil de l’histoire de notre planète, les évènements importants ont laissé des traces dans le sol. Ces couches géologiques permettent de déterminer les différentes ères, périodes et époques de notre planète. Par exemple, pour conclure que nous sommes entrés dans l’époque des humains, du point de vue géologique, il faut identifier des traces irréversibles des activités humaines.
Il y en a ?
La réponse courte, c’est oui. Par exemple, les deux bombes nucléaires lâchées sur Hiroshima et Nagasaki, au Japon, ont laissé des traces de carbone 14 et de plutonium 239 dans le sol, tout comme les nombreux essais nucléaires menés par plusieurs pays dans la deuxième moitié du XXe siècle.
Dans le fond, c’est comme la météorite qui a mené les dinosaures à l’extinction, c’est ça ?
En effet ! La météorite qui s’est écrasée il y a 66 millions d’années dans le Yucatán, au Mexique, aurait entraîné une extinction massive des espèces sur Terre, dont les dinosaures. Le cratère de Chicxulub, d’environ 180 km de diamètre, a probablement nécessité une explosion d’une puissance inimaginable, plusieurs milliards de fois celle d’une bombe atomique. Cet évènement a marqué la fin de la période du crétacé, dans l’ère du mésozoïque.
Ça m’a l’air aussi compliqué que l’organigramme du réseau de la santé, cette histoire d’ères, de périodes et d’époques. Pouvez-vous juste me dire dans quelle époque nous nous trouvons aujourd’hui ?
Officiellement, nous sommes dans l’holocène, une époque géologique qui a commencé il y a 12 000 ans. Fait à noter, l’holocène représente 0,00026 % sur l’échelle de l’histoire de la Terre, vieille de 4,5 milliards d’années.
Nous ne sommes pas dans l’anthropocène ?
Oui, mais non ! C’est l’Union internationale des sciences géologiques (UISG), par l’entremise de la Commission internationale de stratigraphie, qui détermine les différentes ères géologiques. Officiellement, nous sommes toujours dans l’holocène, mais de plus en plus de scientifiques affirment que depuis 1950, nous sommes entrés dans l’anthropocène.
Je ne suis pas un expert, mais on dirait bien qu’ils ont raison. Je me trompe ?
Encore là, c’est compliqué. On ne change pas si facilement d’époque géologique, explique Michel Lamothe, professeur au département des sciences de la Terre et de l’atmosphère à l’Université du Québec à Montréal (UQAM). « Le calendrier géologique actuel a été établi après 150 ans de travaux », précise-t-il.
Et qu’est-ce qu’un lac en Ontario vient faire dans ce débat ?
L’équipe de scientifiques chargée de piloter la proposition d’anthropocène a choisi cet endroit pour incarner cette nouvelle époque géologique. Une douzaine de propositions avaient été soumises, mais c’est celle du lac Crawford, situé près de Guelph, qui a été retenue. On retrouve dans les sédiments stratifiés au fond de ce plan d’eau de 1 km2 des traces de microplastiques, de cendres de combustion du pétrole et du charbon, et des retombées des explosions de bombes nucléaires. Cette étape conclut une longue recherche pour déterminer l’endroit dans le monde qui témoignerait le mieux de l’impact des activités humaines sur la planète. Ces scientifiques espèrent maintenant pouvoir convaincre l’UISG de la pertinence d’établir une nouvelle époque géologique.
C’est dans la poche, non ? Avec de telles preuves !
Bien qu’il soit un partisan de l’anthropocène, Michel Lamothe n’est pas optimiste quant à l’issue d’une éventuelle décision finale. Plusieurs géologues reconnaissent les preuves accumulées, mais ne sont pas prêts à admettre que nous sommes entrés dans une nouvelle époque. « Beaucoup de géologues sont convaincus que ces traces ne vont pas rester dans le temps », estime-t-il. S’il était sceptique au départ, M. Lamothe croit aujourd’hui que l’humain est devenu un « agent géologique majeur ».
Tout le monde n’est pas d’accord, si je comprends bien.
C’est le cas notamment de Julie Talbot, professeure au département de géographie de l’Université de Montréal. « Je fais partie de ceux qui croient qu’il est hasardeux de définir le début de l’anthropocène à ce moment précis [les années 1950] or even to define the Anthropocene simply as a geological epoch”. According to her, the notion of Anthropocene should remain informal. “It is an extremely perilous mission to reduce to its simplest expression a phenomenon as complex as human influence on the Earth system”, she adds.
In the end, it’s a fine theoretical debate, all that.
This is not the opinion of Michel Lamothe, of UQAM. According to him, this debate “also plays a role because we talk about it”. “It’s a tool to reflect on the impact of man on the planet. »
Learn more
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- 300,000 years
- Homo sapiens appeared on Earth about 300,000 years ago. The oldest fossils of the genus Homoeither Homo habilisdate back 2.8 million years.
Source: Natural History Museum of France
- 0.000001%
- The Anthropocene would represent 0.000001% on the scale of the history of the Earth, 4.5 billion years old.
Source: International Commission on Stratigraphy