Les investisseurs dans les sables bitumineux canadiens comprennent les dures conséquences de la production restreinte de pétrole
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Suncor Energy est l’un des plus grands acteurs du secteur canadien de l’énergie. L’an dernier, elle a produit 743 000 barils de pétrole par jour, soit environ 15 % de la production canadienne. Il a affronté les croisés du changement climatique et les opposants aux sables bitumineux pendant des décennies, mais fait maintenant face à un ennemi totalement différent, un investisseur activiste qui veut extraire plus de valeur de l’activité d’extraction. Une campagne lancée par le fonds de couverture Elliott Management ne remet pas en cause les ambitions de Suncor en tant que bonne entreprise citoyen, cela remet en question la rentabilité de l’entreprise par rapport à ses pairs. (Divulgation complète : j’ai été consultant pour Suncor et son prédécesseur, Petro-Canada, de 2001 à 2011.)
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Suncor prend très au sérieux son rôle de chef de file en matière de gérance de l’environnement. C’était l’un des premiers investisseurs dans les énergies renouvelables et mène la charge sur l’hydrogène et les carburants renouvelables, visant à être une entreprise nette zéro d’ici 2050. Cela semble bien, mais Elliott recommande un remaniement du leadership et des affaires comme d’habitude chez Suncor, attribuant le manque de compétitivité financière de l’entreprise à sa « culture d’entreprise lente et trop bureaucratique ».
Malgré sa crédibilité verte – ou peut-être à cause de cela – la valeur des actions de Suncor est à la traîne par rapport à d’autres opérateurs du même secteur, notamment Canadian Natural Resources Inc. (CNRL), Cenovus Energy et Imperial Oil. Comme le souligne Elliott, « le cours de l’action de Suncor est resté pratiquement inchangé depuis le début de 2019, même si les prix du pétrole ont atteint leur plus haut niveau en près d’une décennie ». Pour se concentrer sur son cœur de métier, les sables bitumineux, Suncor a annoncé le mois dernier une réduction de ses actifs, notamment la cession de projets et d’intérêts éoliens et solaires en Norvège et au Royaume-Uni. Cette stratégie « d’optimisation du portefeuille » montre très clairement que Suncor se concentre sur ses joyaux de la couronne, les sables bitumineux, qui ont des décennies de production devant eux.
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La campagne d’Elliott met la pression sur les dirigeants de Suncor pour tirer plus de profits de leurs opérations. CNRL établit la norme de l’industrie en matière d’efficacité opérationnelle et de discipline budgétaire. Bien que membre de l’alliance « Pathway to Net Zero » des exploitants de sables bitumineux, elle n’aspire pas à être le leader de l’industrie en matière de durabilité. Et ses actionnaires semblent à l’aise avec le niveau de conformité de l’entreprise aux réglementations environnementales et aux pratiques de l’industrie. Une question à laquelle la campagne militante dirigée contre Suncor aidera à répondre est la suivante : quelle prime, le cas échéant, les actionnaires sont-ils prêts à payer pour le leadership de Suncor en matière de développement durable ?
Mais une autre grande question, qui doit être placée carrément sur la table du conseil d’administration, est de savoir si la décision de Suncor de concentrer ses investissements dans les sables bitumineux est judicieuse. Les sables bitumineux constituent la troisième plus grande réserve prouvée de pétrole au monde. À une époque où l’Europe se démène pour remplir les hydrocarbures russes sanctionnés et où le président américain Joe Biden est à la recherche de réserves de pétrole pour maintenir les prix mondiaux du pétrole modérés et l’inflation à distance, cela peut sembler un moment étrange pour se demander si parier l’avenir de l’entreprise sur le sables bitumineux est financièrement prudent. Néanmoins, je demande.
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De nombreux défenseurs de l’environnement aimeraient voir les «sables bitumineux» fermés, immédiatement et définitivement. Et Steven Guilbeault, le ministre fédéral de l’Environnement, hésite à approuver l’expansion prévue de la mine Base de Suncor, car elle pourrait entrer en conflit avec les objectifs climatiques du gouvernement. Mais ce n’est pas ma principale préoccupation; des sommes considérables sont investies pour décarboner la production des sables bitumineux. La politique nationale du carbone pourrait éventuellement se résoudre d’elle-même.
Ce qui est plus préoccupant, c’est comment le pompage du pétrole de ces gigantesques réservoirs du nord de l’Alberta peut être limité par les politiciens américains et les initiés politiques, des gens qui voient les réserves comme un atout stratégique à long terme à conserver, comme une couverture de sécurité, jusqu’à ce que nécessaire en cas de crise.
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Ce n’est pas une théorie du complot. Le plan énergétique de George W. Bush, rédigé par le vice-président Dick Cheney au lendemain de la crise du 11 septembre, a clairement identifié les sables bitumineux de l’Alberta comme un « pilier de la sécurité énergétique et économique durable de l’Amérique du Nord ». Et au cours de la dernière décennie, deux présidents américains, Barack Obama et Joe Biden, ont catégoriquement dit «non» à une expansion du pipeline Keystone XL qui aurait fait grimper les exportations de sables bitumineux vers les raffineries américaines.
C’est une réalité géopolitique que l’énergie canadienne est étroitement intégrée à l’infrastructure et aux marchés à l’échelle du continent, et la plupart des barils extraits des sables bitumineux de l’Alberta sont exportés vers les États-Unis. Les investisseurs dans les sables bitumineux canadiens comprennent les dures conséquences d’une production pétrolière restreinte. En avril 2020, Western Canada Select, le nom du pétrole qui s’écoule des sables bitumineux canadiens vers les raffineries aux États-Unis, était évalué à moins de zéro dollar : si les producteurs de sables bitumineux ne pouvaient pas arrêter leur propre production, ils devaient payer de leurs poches pour que les chargeurs transportent le pétrole.
Elliott a raison de mener une campagne militante pour forcer des améliorations dans la discipline fiscale et la prise de décision de Suncor et pour aider tout le monde à mieux comprendre ce que, le cas échéant, les investisseurs premium sont prêts à payer pour un leadership environnemental. Mais la plus grande question qui doit être posée est de savoir s’il est sage de miser la ferme sur les sables bitumineux.
Donna Kennedy-Glans était albertaine‘s ministre adjoint de l’électricité et des énergies renouvelables, 2013-14. Son nouveau livre est Apprendre au dinosaure à danser : aller au-delà du statu quo.