L’article examine l’impact énergétique des technologies de lithographie en ultraviolet extrême (EUV) sur la fabrication de semi-conducteurs. Actuellement, ces systèmes consomment une quantité d’énergie comparable à celle de pays entiers, avec une estimation de 54 000 gigawatts par an d’ici 2030. La demande croissante pose des défis pour l’infrastructure électrique. Les fabricants pourraient devoir se tourner vers des énergies durables, notamment nucléaire, pour répondre à la demande, tout en minimisant leur empreinte environnementale.
La lithographie par ultraviolet extrême (EUV) joue un rôle crucial dans le développement de technologies avancées de traitement et de fabrication de semi-conducteurs. Cependant, chaque outil EUV consomme environ 1 400 kilowatts, équivalant à l’énergie nécessaire pour alimenter une petite ville. Cette consommation énergétique massive soulève des préoccupations environnementales importantes. Selon des estimations, la consommation annuelle d’énergie de toutes les usines équipées d’outils EUV pourrait atteindre 54 000 gigawatts (GW) d’ici 2030, surpassant plusieurs pays en termes de consommation énergétique.
Actuellement, les scanners EUV Low-NA utilisent jusqu’à 1 170 kW, tandis que les nouveaux outils High-NA, qui sont en développement, devraient consommer jusqu’à 1 400 kW par unité. Le nombre de ces machines installées dans les usines de fabricants tels qu’Intel, Micron, Samsung, SK hynix et TSMC augmente chaque année. Les prévisions indiquent qu’en 2030, le nombre de fabs dotées de scanners EUV passera de 31 à 59, doublant presque le nombre total d’outils en fonctionnement. Par conséquent, la consommation d’énergie totale des systèmes EUV pourrait grimper à 6 100 GW par an, indiquant l’activation de centaines de machines à ce moment-là.
Pour donner une idée de l’échelle, une consommation énergétique de 6 100 GW par an est comparable à celle du Luxembourg. Pourtant, il est essentiel de considérer que chaque puce avancée nécessite plus de 4 000 étapes de fabrication, et chaque usine comprend des centaines d’outils variés. Environ 11 % de l’électricité utilisée dans une usine provient directement de l’équipement EUV, le reste étant attribué à d’autres machines, systèmes de climatisation, d’installation et de refroidissement. Ainsi, il est estimé que l’ensemble des fabs utilisant des outils EUV pourraient consommer près de 54 000 GW par an.
Pour mettre cela en perspective, cette consommation d’énergie est environ cinq fois supérieure à celle des centres de données de Meta en 2023 et plus élevée que la consommation annuelle de pays comme Singapour, la Grèce ou la Roumanie, atteignant plus de 19 fois l’énergie utilisée par le Strip de Las Vegas chaque année. Toutefois, bien que ce chiffre soit impressionnant, il ne représente qu’une fraction de 0,21 % de la consommation énergétique mondiale de 2021.
Si l’on considère que 59 installations de semi-conducteurs utilisant EUV pouvaient chacune consommer environ 915 GW par an, cette situation est comparable aux besoins énergétiques des centres de données les plus avancés. Avec la presque double augmentation des usines équipées d’outils EUV prévue d’ici 2030, la pression sur les infrastructures électriques sera considérable. Aujourd’hui, des géants du cloud comme AWS, Google, Meta et Microsoft rencontrent déjà des difficultés pour trouver des sites adaptés à leurs centres de données pouvant atteindre l’échelle du mégawatt et du gigawatt, car il faut que les réseaux électriques soient capables de supporter ces charges.
Actuellement, des entreprises comme Intel privilégient l’utilisation d’énergie verte et durable, mais leur capacité de consommation est pour l’instant limitée. Face à l’accroissement de la demande énergétique pour les centres de données d’IA, des acteurs comme AWS, Microsoft et Oracle envisagent d’avoir recours à l’énergie nucléaire pour alimenter leurs infrastructures. Les fabricants de semi-conducteurs pourraient également être contraints d’explorer cette solution dans les années à venir. Il demeure à voir si les réseaux électriques seront prêts à soutenir à la fois les centres de données d’IA, les fabs modernes et d’autres secteurs d’ici six ans.
Pour un avenir durable, l’industrie devra impérativement investir dans des technologies plus efficaces sur le plan énergétique, explorer des sources d’énergie renouvelable et travailler conjointement avec les décideurs politiques afin de surmonter les défis posés par l’infrastructure électrique. En adoptant ces stratégies, il sera possible d’augmenter la capacité des semi-conducteurs tout en réduisant leur impact sur l’environnement.