L’indice DAX a franchi le seuil des 20 000 points, suscitant une excitation sur le parquet de Francfort, malgré des signaux alarmants de l’économie allemande. Cette hausse est attribuée à des entreprises générant des revenus à l’international, notamment dans les secteurs technologiques et de l’intelligence artificielle. Toutefois, des inquiétudes persistent quant à la durabilité de cette montée face à une conjoncture économique morose et aux risques de corrections sur le marché.
Sur le parquet de Francfort, l’atmosphère est électrisante : le DAX a enfin franchi le seuil symbolique des 20 000 points. Mais comment expliquer cette montée face aux signaux alarmants qui émanent de l’économie ?
Lors de la matinée où le DAX a atteint les 20 000 points, une véritable effervescence a éclaté sur le parquet de Francfort, les traders s’affairant à immortaliser cet instant avec leurs smartphones. ‘L’excitation est palpable’, témoigne la journaliste financière Sabrina Marggraf. ‘Tout le monde souhaite capturer ce moment marquant.’ L’indice a même atteint un pic historique de 20 038 points une demi-heure plus tard.
L’indice boursier phare allemand a suscité un intérêt croissant ces dernières semaines, affichant une performance impressionnante cette année : une augmentation significative de 20 % ou 3200 points est anticipée pour 2024. Il a fallu une décennie pour que le DAX passe de 10 000 à 20 000 points.
Cependant, cette dynamique soulève des questions. L’économie allemande semble stagnante, avec une baisse de la production industrielle, des carnets de commandes vides et un flot constant de faillites et de suppressions d’emplois. Comment cette situation peut-elle coexister avec une telle montée du DAX ? La réalité est-elle si sombre ?
Un DAX déconnecté de la conjoncture économique
En effet, la réponse est affirmative. Mais ‘le DAX ne reflète pas la réalité économique allemande’, souligne Marggraf. ‘Nombre d’entreprises du DAX génèrent leurs revenus à l’étranger, profitant ainsi de la croissance mondiale.’
David Wehner, gestionnaire de fonds, aborde également dans une interview le décalage entre le DAX et l’économie allemande. ‘Jusqu’au début des années 2000, il existait une corrélation entre la capitalisation boursière mondiale et le PIB. Les marchés boursiers reflétaient alors l’activité économique.’ Avec l’afflux massif de liquidités durant la crise financière, cette dynamique a changé. ‘Aujourd’hui, les marchés boursiers représentent environ 200 % du PIB mondial, se dissociant complètement de l’économie réelle.’
Cette dernière poussée au-delà des 20 000 points, selon l’expert en marchés financiers Robert Halver, est en grande partie attribuable à un rattrapage par rapport aux marchés américains. Les investisseurs parient sur une amélioration potentielle de l’économie allemande : ‘Il y a des espoirs de voir émerger un nouveau gouvernement plus favorable à l’économie.’ De plus, des spéculations sur une éventuelle baisse des taux d’intérêt circulent, en raison de la morosité actuelle de l’économie. On espère également une ‘accélération de l’économie mondiale’, avec en toile de fond la promesse de réindustrialisation aux États-Unis.
‘De nombreuses entreprises allemandes en bénéficieront’, affirme Halver. Les droits de douane américains, que le futur président menace, pourraient inciter plusieurs entreprises à produire davantage sur le sol américain ou à s’y implanter pour éviter les répercussions des droits de douane imposés.
Les acteurs clés de la montée du DAX
Il est important de noter que toutes les sociétés du DAX ne profitent pas de cette ascension de la même manière. ‘En analysant de près, on constate que ce sont principalement les entreprises liées à l’intelligence artificielle et aux avancées technologiques qui ont contribué à ces hausses’, précise Marggraf. Parmi les leaders, on retrouve SAP et Deutsche Telekom : SAP a enregistré une hausse de plus de 65 % depuis le début de l’année, tandis que Deutsche Telekom a vu son action grimper de plus de 40 %.
La montée du DAX est soutenue par des entreprises allemandes performantes, comme l’indique également Ulrich Kater, économiste en chef à Deka Bank. ‘Ces sociétés évoluent dans des secteurs tels que la technologie, l’électronique, la consommation et la finance, profitant d’une forte croissance au niveau mondial tout en étant peu affectées par la conjoncture économique allemande en déclin.’
Les titres du secteur automobile ont, sans surprise, été touchés. Cependant, selon Halver, cela pourrait rapidement évoluer. ‘Ce qui est fermé en Allemagne peut être rouvert en Amérique.’ Si l’Allemagne doit se tourner vers les États-Unis pour ses approvisionnements, cela pourrait affecter sa position économique. Sur le marché boursier, seuls importent ‘les chiffres, les bénéfices et les structures de coûts.’
Quant à la stratégie des investisseurs, il n’est pas acquis que le DAX poursuive son ascension ininterrompue d’ici la fin de l’année. ‘Après un pic historique, des prises de bénéfices sont souvent observées’, avertit Christian Henke du courtier IG. Plusieurs facteurs de risque continuent de peser sur le marché, et après avoir atteint un nouveau sommet, le DAX a rapidement chuté sous la barre des 20 000 points.