Yves Raspaud, berger dans les Pyrénées, exprime son mécontentement face à la réintroduction d’ours, qui menacent ses moutons. Le documentaire *Le Berger et l’Ours* de Max Keegan explore ses défis et les tensions entre agriculteurs et écologistes. Keegan, touché par la vie de Raspaud et d’un jeune aspirant à la police de la faune, présente une vision nuancée de ce conflit, mettant en lumière la relation complexe entre l’homme et la nature dans cette région.
Un Berger aux Opinions Tranchées
Yves Raspaud pourrait bien être le berger le plus grincheux d’Europe. Situé dans une région isolée des Pyrénées françaises, cet homme s’occupe de ses troupeaux tout en communiquant principalement par des grognements, laissant entendre qu’il n’est pas très ravi de la situation actuelle. Dernièrement, il a eu de quoi se plaindre : un ordre émanant de bureaux éloignés a décidé de réintroduire des ours dans sa région. Étonnamment, ces ours, déplacés d’Europe de l’Est, affichent un goût prononcé pour ses précieux moutons.
Le récit de Raspaud et les enjeux soulevés par cette réintroduction sont explorés dans le documentaire *Le Berger et l’Ours*, réalisé par Max Keegan. Ce film, produit par Keegan, Elizabeth Woodward, Jesse Moss et Amanda McBaine, avec la coproduction d’Eleonore Voisard, a connu sa première internationale au Festival International du Documentaire d’Amsterdam, après avoir été présenté pour la première fois en septembre au Camden International Film Festival dans le Maine.
Rencontre avec un Personnage Fascinant
« Nous avons rencontré Yves et nous avons immédiatement été charmés par lui », a partagé Keegan lors d’une séance de questions-réponses à Camden. « Il était rustre et étrangement accueillant, tout en étant un peu intimidant. J’ai pensé : ‘Cela pourrait donner quelque chose de bien.’ »
Keegan, ayant grandi dans la campagne britannique, a reflété sur le changement de paysage qu’il a observé, notant que les Pyrénées de Raspaud ont également souffert d’une dépopulation, avec de nombreux jeunes qui migrent vers les villes. Raspaud, confronté à la solitude de son métier, peine à trouver un successeur. Le réalisateur a entendu parler des tensions entre bergers et écologistes à propos de la réintroduction des ours, ce qui l’a amené à explorer ce sujet fascinant. « J’ai entendu parler de conflits extrêmes, des gens tirant sur la police et brûlant des voitures », se souvient-il.
« C’était un conflit singulier car les deux parties avaient leurs raisons », a-t-il ajouté. « Je pouvais comprendre les agriculteurs qui se sentent incompris et délaissés par ceux qui prennent ces décisions à distance. Mais je comprenais également l’importance de protéger ces animaux symboliques. »
Bien qu’il ait rencontré des défis en raison de la barrière linguistique, Keegan a finalement trouvé un moyen de se connecter avec les villageois. « Au début, mon français était rudimentaire, mais cela a semblé désarmer les habitants, leur permettant de me voir comme quelqu’un d’inoffensif », a-t-il expliqué. En plus d’Yves, il a également été captivé par un jeune homme nommé Cyril Piquet, qui, bien qu’étant le fils d’un agriculteur, se sentait lié aux ours et aspirait à rejoindre la police de la faune.
Le film présente une vision équilibrée des opinions sur la réintroduction des ours, sans chercher à résoudre le débat. Keegan a admis : « Je ne suis pas sûr de ma position politique à ce sujet. J’apprécie vraiment toutes les personnes que j’ai rencontrées dans les Pyrénées et je ne veux pas prendre parti. » Il souhaite éviter de réduire les habitants à de simples stéréotypes, désirant plutôt montrer leur vie en harmonie avec la nature.
Bien qu’Yves ne soit pas favorable à la réintroduction des ours, sa manière de vivre pourrait inspirer de nombreux écologistes. « Il ne quitte jamais la vallée et dit souvent : ‘Je ne mange que ce que je connais.’ Il élève ses animaux avec un profond respect pour l’environnement », a noté Keegan, soulignant la beauté de la transhumance, ce qui démontre l’harmonie entre l’homme et la nature dans cette région des Pyrénées.