Les consommateurs recherchent activement un bouc émissaire auquel ils peuvent s’identifier
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Tout a commencé avec un journaliste prenant une photo simple et triviale d’un paquet hors de prix de cinq poitrines de poulet désossées et sans peau.
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C’était 26,87 $ le kilo, un choc autocollant de classe mondiale. C’est au moins le double de ce que l’on s’attendrait à payer pour des poitrines de poulet. En quelques heures, la photo est devenue le paratonnerre des consommateurs frustrés sur les réseaux sociaux. Loblaw et Galen Weston – président de la société, président et personnalité publique bien connue de la marque – sont devenus l’ennemi public n ° 1. Les attaques ont été instantanées et surtout vicieuses.
En surface, le tumulte collectif contre Loblaw manquait de toute pensée rationnelle. Les poitrines de poulet sur la photo étaient sans peau, désossées et exemptes d’hormones et d’antibiotiques, ce qui en ferait des produits de qualité supérieure. Bien que l’œil non averti ne puisse pas voir le « PC FF » sur l’étiquette, ce qui signifiait « Free From », mais il était là. D’autres détaillants de la région du Grand Toronto vendaient même des produits similaires à des prix similaires.
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De plus, depuis des mois, l’industrie avicole, y compris les producteurs d’œufs, est confrontée à une épidémie de grippe aviaire, touchant près de 300 fermes à travers le pays. Bon nombre d’entre eux se trouvent en Ontario. Près de cinq millions d’oiseaux ont été abattus l’année dernière, empêchant des millions en stock d’atteindre le marché. Les pressions du côté de l’offre sont importantes depuis un certain temps. Ainsi, les prix du poulet, de la dinde et des œufs ont tous été touchés par l’épidémie.
Ce qu’il faut également souligner, c’est que la production de poulet est soumise à la gestion de l’offre au Canada. Avec notre système de quotas, nous produisons essentiellement ce dont nous avons besoin et consommons très peu de produits avicoles importés. La valeur nette moyenne d’un éleveur de volaille et d’œufs au Canada est bien supérieure à 6 millions de dollars, selon Statistique Canada. Les prix à la ferme sont fixés par des conseils qui, à leur tour, sont fortement influencés par les coûts de production. La plupart des années, les prix agricoles augmenteront et le reste de la chaîne d’approvisionnement fera face à l’économie de la chaîne d’approvisionnement. C’est ainsi que fonctionne la gestion de l’offre.
Les prix de la volaille et des œufs ont toujours été plus élevés au Canada qu’ailleurs dans le monde occidental. Néanmoins, la gestion de l’offre a offert aux Canadiens des prix stables. En fait, le poulet est le composant le plus stable du trio de viande, qui comprend également le porc et le bœuf. Mais depuis début 2020, le comptoir de la viande est devenu de plus en plus cher, peu importe la protéine que vous recherchez. Bon nombre de ces facteurs échappent largement au contrôle de Loblaw.
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Pourtant, appelez-le «chickengate» si vous voulez, mais des cris publics instantanés comme celui dont nous avons été témoins avec la photo de poitrines de poulet trop chères se produisent pour une raison. La dernière fois que le taux d’inflation des aliments au Canada a été inférieur au taux d’inflation général de notre pays, c’était en octobre 2021. Alors que tout dans nos vies est devenu plus cher, la situation s’est considérablement aggravée à l’épicerie.
Les consommateurs recherchent activement un bouc émissaire auquel ils peuvent s’identifier. La plupart des consommateurs apprécient à peine le fonctionnement de l’agriculture, de la logistique ou même de la transformation des aliments, mais la plupart d’entre nous sont allés plusieurs fois dans une épicerie dans notre vie. C’est un environnement familier pour la plupart d’entre nous. Les épiceries sont des portails vers un système alimentaire très complexe que nous pouvons à peine voir et comprendre, donc blâmer rapidement les épiciers pour les produits hors de prix est instinctif.
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Comme dans de nombreux pays occidentaux, la hausse des prix des aliments a été politisée au Canada, ce qui a conduit à une enquête parlementaire à Ottawa et à des paiements de soutien inflationnistes à grande échelle dans des provinces comme le Québec et l’Île-du-Prince-Édouard. Ces paiements vont probablement aggraver les choses, mais cela n’a pas d’importance.
Le Canada a l’un des taux d’inflation alimentaire les plus bas du monde occidental. Parmi les pays du G7, seul le Japon a actuellement un taux d’inflation alimentaire plus faible. La hausse des prix alimentaires est un phénomène mondial, point final. Même s’il est peu logique de blâmer un épicier ou même un homme pour nos maux à l’épicerie, les Canadiens ont parfaitement le droit d’être contrariés. Le contexte est primordial, et les consommateurs sont nerveux et remettront en question tout et n’importe quoi et auront toutes les raisons de le faire.
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Le scandale de la fixation du prix du pain, qui a duré 14 ans, la débâcle de la rémunération des héros pendant la pandémie, obligeant presque les consommateurs à utiliser les caisses automatiques, tout cela fait que de nombreux Canadiens se sentent incroyablement vulnérables et sans protection. En décembre, notre Comité parlementaire permanent de l’agriculture et de l’agroalimentaire a appelé les meilleurs épiciers à témoigner à Ottawa dans le cadre d’une enquête sur l’inflation alimentaire. Aucun des PDG ne s’est présenté, y compris Galen Weston lui-même. Tous ont choisi d’envoyer leurs directeurs financiers à la place. Ils auraient dû avoir la décence de se présenter et d’obliger notre Chambre des communes, qui représente le peuple canadien.
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L’incident de la poitrine de poulet montre à quel point les choses sont incroyablement délicates en ce moment. L’industrie alimentaire, et particulièrement les épiciers, font face à une crise de confiance, rien de moins. Les consommateurs sont devenus hypersensibles à toute preuve potentielle suggérant un abus de pouvoir sur le marché et les épiciers devront naviguer dans les mois à venir avec une extrême prudence. Montrer plus d’empathie publique serait un bon début.
En attendant, les consommateurs devraient connaître leurs prix avant même de se présenter à l’épicerie, rester calmes et lire les étiquettes. Si un prix est au-delà de ce qui était prévu, éloignez-vous. Un substitut plus abordable dans le même magasin est probablement à portée de main. Les consommateurs ont plus de pouvoir qu’ils ne le croient.
— Le Dr Sylvain Charlebois est directeur principal du laboratoire d’analyse agroalimentaire et professeur en distribution et politiques alimentaires à l’Université Dalhousie.