Il fut un temps où Legault bénéficiait d’un soutien stratosphérique, mais cette époque est révolue
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Au début de la campagne électorale provinciale au Québec il y a un mois, experts et sondeurs s’entendaient pour dire qu’à moins que « quelque chose d’extraordinaire » ne se produise, la Coalition Avenir Québec (CAQ) de François Legault serait réélue avec une énorme majorité de sièges, peut-être plus de 100 sur les 125 sièges de l’Assemblée nationale. Eh bien, que savez-vous, « quelque chose d’extraordinaire » s’est produit : Legault a mené l’une des pires campagnes jamais vues dans l’histoire moderne de la province.
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Lundi prochain, c’est jour d’élection. Selon le dernier sondage Léger, la CAQ obtiendrait environ 37 % des voix. C’est exactement le pourcentage qu’ils ont obtenu en 2018. Ce sera suffisant pour un second mandat majoritaire, mais peut-être pas le glissement de terrain qui paraissait inévitable avant la campagne.
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Pour des raisons inexplicables, dès le premier jour de la campagne électorale, Legault a accumulé les faux pas, notamment les affirmations controversées sur l’immigration dont il a dû faire machine arrière. Plus important encore, la plupart du temps, le premier ministre semblait en colère et impatient, comme s’il considérait la campagne comme une perte de temps totale. Le langage corporel frustré était évident lors des deux débats télévisés, après quoi les fréquents froncements de sourcils de Legault sont devenus le truc des dessinateurs de journaux.
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Si les sondages sont corrects, six électeurs sur 10 se rangeront du côté de l’un des quatre principaux partis d’opposition. Le fait qu’il y ait autant de partis en lice pour des votes non-CAQ garantit que Legault, même avec moins de 40 % des voix, gouvernera à partir d’une position confortable, face à une opposition dispersée.
Le PQ survit
Les commentateurs prévoyaient également la disparition du Parti québécois (PQ) séparatiste, le parti fondé par René Lévesque. Peu s’attendaient à ce que le jeune chef du PQ, Paul St-Pierre Plamondon (souvent appelé par ses initiales PSPP) ait la meilleure performance de tous les chefs, surtout lors des débats. Le PSPP a mené une campagne compétente et positive ; le contraste avec Legault était saisissant. Grâce à cette performance, il aurait réussi à rapatrier certains électeurs souverainistes qui songeaient à voter CAQ. Crédité de 15 % des intentions de vote, le PQ remportera probablement quelques sièges, de quoi assurer la survie du parti.
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Après avoir récolté 25 % des voix et 31 sièges en 2018, le Parti libéral du Québec a siégé comme opposition officielle lors de la dernière législature. Dirigé par Dominique Anglade, un brillant ingénieur et diplômé d’un MBA issu d’une famille d’immigrants haïtiens, le parti devrait maintenant perdre la plupart des quelques circonscriptions à prédominance française qu’il détient actuellement. Les libéraux conserveront peut-être leur statut d’opposition officielle, mais avec si peu d’appui au sein de la population francophone, ils auront un problème de crédibilité.
Mme Anglade mène une campagne énergique et enthousiaste, mais cela semble insuffisant pour réparer les dommages causés par certaines de ses décisions bien avant le début de la campagne, notamment sa position hésitante face au tristement célèbre projet de loi linguistique de la CAQ, le projet de loi 96.
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Le parti de gauche Québec solidaire est le seul parti qui pourrait retirer le statut d’opposition officielle aux libéraux. Cependant, malgré les formidables talents de son co-chef, l’ancien militant étudiant Gabriel Nadeau-Dubois, le parti n’a pas réussi à augmenter significativement son appui, qui se situe à 16 %. Une promesse de taxer les acheteurs de VUS, au nom de la lutte contre le changement climatique, n’a pas été bien accueillie par de nombreux électeurs.
Le Parti conservateur du Québec, dirigé par l’ancien animateur de radio parlée Eric Duhaime, semble avoir dépassé 15 % des intentions de vote. Reste à savoir si cela suffit pour attribuer aux conservateurs un ou deux sièges à l’Assemblée. De toute façon, les politiciens québécois devront trouver un moyen de canaliser la colère et la frustration ressenties par les nombreux partisans de Duhaime. Comme on le voit dans d’autres pays, ignorer ces sentiments populaires conduit à des scénarios malheureux.
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Continuer quoi ?
Le slogan de la CAQ est « Continuons » (Continuons). Plusieurs se demandent, compte tenu du manque d’enthousiasme évident de Legault : « Continuer à faire quoi ? Le premier ministre n’a pas été en mesure de fournir une réponse convaincante à cette question. Maintenant que le gouvernement s’est penché sur les questions de la langue (loi 96) et des signes religieux (loi 21), la CAQ semble se demander quoi faire ensuite en plus de gérer le plus efficacement possible les opérations quotidiennes de l’État. C’est une des raisons pour lesquelles, même si son parti est choisi pour former à nouveau le gouvernement, la question de la succession de M. Legault sera bientôt soulevée à l’intérieur et à l’extérieur du parti.
Dominique Anglade est une autre dirigeante qui pourrait faire face à des défis de leadership, selon le score de son parti le soir des élections. Les successeurs potentiels se préparent déjà, et si les libéraux s’en tirent mal, les ambitieux se tiendront prêts au départ. Cependant, en menant une solide campagne, Anglade a probablement sauvé son propre siège et ses chances de rester en tant que leader.
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Il fut un temps où le premier ministre Legault bénéficiait d’un soutien stratosphérique. Cela était dû aux compétences exceptionnelles en communication du chef de la CAQ pendant la pandémie. Il est ironique que ce niveau record de soutien ait diminué à des proportions normales en raison de la mauvaise performance des communications de Legault pendant la campagne.
Au bout du compte, malgré cette performance médiocre, une victoire de la CAQ est de loin le scénario le plus probable. La raison a été résumée par un électeur lavallois interviewé par Radio-Canada cette semaine : « M. Legault a géré la pandémie du mieux qu’il a pu; il mérite un remontant.
André Pratte est chercheur principal à l’École supérieure d’affaires publiques et internationales de l’Université d’Ottawa.
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