Une adaptation moderne des « Souffrances du jeune Werther » explore les tourments d’un jeune homme, héritier d’une riche famille à Montréal, dont le cœur est pris par une femme déjà fiancée. Sous la direction de Jose Avelino Gilles Corbett Lourenco, ce film présente un Werther immature face à un rival mature, tout en naviguant à travers des crises émotionnelles et des moments de comédie. La réalisation soignée et le ton contemporain offrent une nouvelle perspective sur ce classique littéraire.
Une Nouvelle Vision de Werther
Indéniablement, l’un des personnages les plus controversés de la littérature est le protagoniste de « Les Souffrances du jeune Werther » de Johann Wolfgang Goethe — un martyr de l’amour non partagé qui choisit tragiquement de mettre fin à ses jours. L’auteur s’est rapidement éloigné de cette œuvre précoce, malgré la renommée qu’elle lui a apportée. Cette distance était sans doute en grande partie due à l’inspiration qu’elle a fournie pour le mouvement romantique ultérieur, un courant qu’il méprisait, et qui a engendré des cas réels de désespoir parmi des lecteurs qui se prenaient pour aussi dramatiquement démunis que son héros.
Peu de gens, en dehors des chercheurs, se rappellent aujourd’hui de l’énorme impact culturel que ce livre a eu il y a plus de deux siècles. Cependant, il n’est pas nécessaire d’être un expert en histoire littéraire pour apprécier le nouveau film « Jeune Werther » — bien que cette connaissance puisse enrichir l’expérience. « Inspiré par le roman tragique de 1774 », comme le souligne le texte d’ouverture, le premier long métrage de Jose Avelino Gilles Corbett Lourenco propose une adaptation audacieuse et intelligente. Dans cette version moderne, notre héros affronte une nouvelle fois les douleurs d’un amour impossible, mais apprend finalement ce que son prédécesseur ne pouvait saisir : la vie continue, même lorsque l’on ne reçoit pas ce que l’on désire, et insister pour cela n’est rien d’autre qu’un acte d’égoïsme. Lionsgate a présenté cette comédie canadienne pétillante dans les salles de cinéma américaines, ainsi que sur les plateformes numériques et VOD.
Une Histoire d’Amour Contemporaine
Notre Werther du XXIe siècle (interprété par Douglas Booth) est introduit sous un tilleul, se lamentant : « Je suis probablement en train de mourir… à cause d’un amour insensé. » En se remémorant les événements qui l’ont conduit ici, on découvre qu’il est l’héritier d’une famille aisée de Westmount à Montréal. Il s’est rendu à Toronto avec son meilleur ami hypocondriaque, Paul (Jaouhar Ben Ayed), pour un bref séjour, prévu pour récupérer un héritage familial. Werther envisageait ensuite de « partir en Europe pour des aventures d’expatrié » et de « rassembler des matériaux pour ses mémoires », se considérant comme son propre meilleur sujet.
Cependant, cette obsession de soi est rapidement redirigée grâce à une rencontre inattendue avec Charlotte (Alison Pill), une résidente locale. Avec une audace qui frôle l’impertinence, Werther interrompt une conversation entre Charlotte et sa sœur cadette, Sissy (Iris Apatow) et leur amie Melanie (Amrit Kaur). Son charme suffisant lui vaut une invitation à la fête d’anniversaire de Charlotte, bien que ce soit par l’intermédiaire de Sissy, qui est déjà amoureuse. Charlotte, une femme quelque peu désabusée, a consacré la plupart de sa vie à élever ses six enfants après la perte de leurs parents, et n’est guère encline à accueillir un étranger arrogant à sa célébration. Néanmoins, la beauté et l’humour de Werther parviennent à lui faire passer un moment agréable lors de cette soirée qu’il a presque animée à lui seul.
À la fin de la soirée, l’attirance entre eux est palpable, mais Charlotte révèle qu’elle est déjà fiancée. Werther refuse de se laisser abattre par cette nouvelle, même en prenant conscience que son fiancé, Albert (Patrick J. Adams), est un homme séduisant, accompli et moralement irréprochable. Il s’érige alors en leur nouveau meilleur ami commun, cherchant à se rapprocher de Charlotte tout en présentant Albert comme un adversaire ennuyeux.
Cependant, la limitation de Werther réside dans son immaturité et son penchant pour les caprices. Albert, en revanche, incarne la maturité — ce qui peut sembler moins divertissant lors d’une sortie, mais représente le choix le plus sensé pour quelqu’un comme Charlotte. Le scénario de Lourenco s’éloigne progressivement de l’œuvre de Goethe, orchestrant une crise où Werther, dans un moment de semi-repentance, tente de rendre un « service » à Albert qui tourne à la catastrophe. Cela déclenche une série d’événements dramatiques, conduisant finalement notre protagoniste à une prise de conscience de ses erreurs.
Pauvre en vulgarité pour une comédie classée R, « Jeune Werther » mise plutôt sur l’esprit et le style qui, parfois, ne sont pas aussi brillants qu’ils le croient. Le dialogue vif, à la manière des premiers films de Diablo Cody, peut flirter avec la prétention. Plusieurs montages trop mignons tentent de vendre l’idée que Werther est l’incarnation de la joie de vivre (en réalité, il peut apparaître épuisant) ou que les deux protagonistes sont faits l’un pour l’autre (en vérité, ils semblent mal assortis, comme un caniche espiègle et un cheval de trait dévoué).
Cependant, le film est soigneusement conçu et exécuté, son rythme rapide et son emballage astucieux parviennent à transmettre la plupart des émotions désirées, malgré un manque de rires francs. La cinématographie en scope de Nick Haight, le design de production de Ciana Vernon et la bande originale parfois ironique d’Owen Pallett contribuent à créer un univers où un état d’esprit moderne décontracté se mêle à des éléments anachroniques.