L’ambassadeur américain à Berne, Scott Miller, a récemment suscité l’attention en évoquant l’ajout de 275 individus et entités à la liste de sanctions américaines en raison de leur présumée aide à l’effort de guerre russe. Parmi eux figurent deux avocats suisses, ainsi qu’une société anonyme et une fiducie établies en Suisse. Miller a insisté sur la nécessité pour la Suisse de renforcer les mesures contre les contournements de sanctions, en élargissant les obligations de diligence des avocats au cadre de la loi sur le blanchiment d’argent.
Le diplomate américain à Berne, Scott Miller, a encore une fois suscité l’attention cette semaine. Cela fait suite à l’annonce du département du Trésor des États-Unis concernant l’ajout de 275 personnes et entités juridiques sur la liste des sanctions américaines, en raison de leur présumée aide à la machine de guerre russe en contournant les sanctions internationales. Les individues et entités concernés viennent de 17 pays, y compris deux avocats suisses, ainsi qu’une société par actions et un trust établis en Suisse.
Miller a mentionné les deux avocats suisses sanctionnés dans un communiqué de l’ambassade américaine à Berne, signifiant à nouveau à son pays d’accueil que des efforts supplémentaires sont nécessaires pour combattre les contournements de sanctions. La déclaration centrale est que la Suisse doit renforcer sa lutte contre ces contournements, en comblant les lacunes dans la lutte contre le blanchiment d’argent, notamment en soumettant également les avocats à des devoirs de diligence et de déclaration en vertu de la loi sur le blanchiment d’argent. Actuellement, ces obligations ne s’appliquent aux avocats, notaires et autres conseillers que dans le cas où ils agissent comme prestataires de services financiers, tels que la gestion professionnelle de fonds de clients.
Le Conseil fédéral à l’écoute
Le Conseil fédéral à l’écoute
Du point de vue américain, le fait que les États-Unis aient des lacunes dans la lutte contre le blanchiment d’argent comparé à la Suisse est hors de propos : dans le domaine de la politique internationale, les grands imposent leur vision aux petits, et non l’inverse. Politiquement, cette intervention bruyante pourrait s’avérer contre-productive. En réalité, Miller trouve un terrain d’entente avec le Conseil fédéral, qui cherche depuis 2018 à élargir le champ d’application de la loi sur le blanchiment d’argent pour les conseillers. Toutefois, ce projet n’a pas encore trouvé de majorité. Le premier essai a échoué au parlement, principalement à cause de la résistance des avocats qui craignaient pour leur secret professionnel.
Le second essai du Conseil fédéral fait également face à des difficultés. Cette proposition de révision est actuellement en attente au sein de la commission juridique du Conseil des États. En octobre, la commission a décidé de séparer la partie du projet concernée par la « clause de conseil » du reste, moins controversé, et a demandé à l’administration de proposer une version simplifiée.
La proposition initiale comprenait une liste de tâches qui, en cas de participation professionnelle des avocats, notaires et autres conseillers, devraient désormais être soumises aux règles de la loi sur le blanchiment d’argent. Selon le Conseil fédéral, ces activités présentent des risques élevés de blanchiment d’argent. Cette liste est étroitement alignée sur les recommandations de l’organisme de réglementation mondiale (Task Force on Financial Action). Les activités mentionnées incluent : l’achat ou la vente de biens immobiliers ; la création ou la gestion d’une société, d’une fondation ou d’un trust ; l’achat ou la vente d’une société ; la fourniture d’une adresse ou de locaux comme siège social d’une société ; et agir en tant qu’actionnaire fiduciaire au nom de l’actionnaire effectif.
Les sociétés écrans sous le microscope
Les sociétés écrans sous le microscope
Pour la commission du Conseil des États, la liste est jugée trop vaste. Elle souhaite restreindre la loi sur le blanchiment d’argent aux « risques fondamentaux des activités risquées ». Ce que cela englobe fait l’objet de discussions entre l’administration fédérale et les associations concernées. Un exemple cité est celui de la création de sociétés de domiciliation ; des entités juridiques qui n’exercent pas une activité opérationnelle mais détiennent des actifs au nom du bénéficiaire économique – communément appelées « sociétés écrans ». Ces sociétés sont considérées comme présentant des risques de blanchiment d’argent particulièrement élevés. Ce qui apparaîtra sur la version simplifiée de la liste reste à déterminer. Ce dossier ne devrait probablement pas être traité par le Conseil des États avant mars ou juin 2025.
Indépendamment de l’issue de ce débat, les avocats en Suisse ont déjà des obligations en matière de mise en œuvre des sanctions économiques contre la Russie. Le cadre légal est fourni par la loi sur les embargos de 2002, qui n’est pas directement liée aux règles sur le blanchiment d