Aaron Wudrick: Le seuil de la Loi sur les mesures d’urgence est maintenant l’incompétence, apparemment

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Si vous cherchiez à lire le week-end, le juge Paul Rouleau a ce qu’il vous faut. La publication vendredi du volumineux rapport final de 2 092 pages de la Commission d’urgence de l’ordre public, rédigé par Rouleau, n’est rien sinon approfondi. Il intègre tout, depuis une analyse de l’histoire du blocus des convois et des frontières du début de 2022, de la couverture médiatique, des décisions opérationnelles de la police et de l’action du gouvernement, couronné par une analyse, des conclusions et des recommandations.

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Les partisans de la décision du gouvernement Trudeau d’invoquer la Loi sur les mesures d’urgence seront grandement encouragés par la conclusion centrale à laquelle arrive Rouleau selon laquelle l’invocation de la loi par le gouvernement était appropriée, et ce sera sans aucun doute le principal argument avancé par la machine de communication du gouvernement dans les semaines à venir. Le débat est terminé; la justification est la nôtre.

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Pour un gouvernement qui a beaucoup d’incendies à éteindre, on ne peut pas vraiment le blâmer. Mais grattez la surface du rapport et les mises en garde commencent à devenir apparentes. En examinant les mesures utilisées en vertu de la loi, Rouleau reconnaît que la commission « n’a pas l’autorité légale pour rendre un jugement formel sur la « légalité » des mesures » — qui relèvent de la compétence d’un tribunal. En conséquence, son choix de la norme préférée de « pertinence » est une « norme à texture plus ouverte qui me permet d’évaluer les mesures de manière globale » et il « n’a pas l’intention ou ne considère pas que mes conclusions sur ce sujet soient en aucun cas contraignantes pour le tribunaux. »

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Pour être juste envers Rouleau, il savait qu’il était pris entre le marteau et l’enclume : ne pas rendre de conclusion et être accusé d’avoir esquivé; ou faire une constatation et être mis au pilori pour avoir outrepassé son mandat. Finalement, il a décidé de partager la différence. Tout en concluant que le gouvernement avait atteint le seuil élevé requis, il a noté qu’il n’était pas « venu à cette conclusion facilement » et qu’il « ne considérait pas que la base factuelle était accablante » tout en admettant qu' »il y a une force significative aux arguments contre l’atteindre. ”

Ce type de couverture sera insatisfaisant pour les personnes des deux côtés du débat. Sur une question d’une telle importance, et ayant reconnu que la question demeure devant la Cour fédérale, on pourrait penser que la ligne de conduite appropriée serait soit d’énoncer sa position avec un degré élevé de confiance, soit de s’abstenir complètement d’en prendre une.

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Une grande partie du raisonnement de Rouleau repose sur la norme bien établie de la « croyance raisonnable » en droit pénal, selon laquelle un jugement parfait n’est pas requis, mais simplement qu’un décideur en possession d’un certain ensemble de faits agit d’une manière qui est considérée comme « raisonnable ». .” Il n’y a pas grand-chose à redire ici en tant que principe général. Mais étonnamment, Rouleau ignore simplement le refus du gouvernement de publier l’avis juridique clé qu’il a reçu suggérant qu’il a atteint le seuil légal pour invoquer la loi. Au lieu de cela, Rouleau souligne le témoignage de plusieurs témoins – dont le premier ministre, le procureur général et le greffier du Conseil privé – acceptant que leur propre interprétation de cet avis inconnu était suffisante.

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Il y a d’autres passages qui font froncer les sourcils. Par exemple, dans son analyse de la question de savoir si le gouvernement a atteint le seuil énoncé à l’article 3 de la loi selon lequel une situation doit en être une qui « ne peut être traitée efficacement par aucune autre loi du Canada », Rouleau conclut que le critère est rempli sur la base du modificateur « effectivement » par opposition au verbe « ne peut pas ». Ce faisant, il abaisse essentiellement le seuil de la loi, donnant une nouvelle base aux futurs gouvernements pour invoquer la loi enracinée non pas dans la nécessité juridique, mais dans l’incompétence administrative ou opérationnelle.

Il va sans dire que Rouleau est parfaitement conscient des pouvoirs extraordinaires que confère la Loi sur les mesures d’urgence. Pourtant, malgré son insistance sur l’importance de maintenir un seuil élevé pour son utilisation, ce n’est pas le seul cas où ses commentaires penchent vers plus, plutôt que moins, de déférence envers le Cabinet. Dans la partie recommandations du rapport, il va même jusqu’à suggérer que la définition de « menaces à la sécurité du Canada » — actuellement incorporée par renvoi dans la Loi sur les mesures d’urgence à partir de la Loi sur le SCRS — soit supprimée. C’est curieux étant donné que Rouleau venait tout juste de conclure que le gouvernement n’était pas contraint d’invoquer la loi de manière appropriée en s’appuyant sur la définition existante. Quel effet son retrait pourrait-il avoir si ce n’est de donner au gouvernement encore plus de latitude qu’il n’en a déjà?

Heureusement pour les Canadiens, le rapport Rouleau ne représente pas le dernier mot sur l’utilisation de la Loi sur les mesures d’urgence par le gouvernement Trudeau. Le tribunal de l’opinion publique peut être hors de contrôle. Mais d’un point de vue juridique, la Cour fédérale – et les deux demandes de révision judiciaire actuellement en cours devant elle – auront probablement encore quelque chose à dire. Dans l’intérêt de la postérité – et pour décourager l’utilisation future de la loi – nous devrions espérer qu’ils parviendront à des conclusions différentes.

Spécial au National Post

Aaron Wudrick est avocat et directeur du programme de politique intérieure à l’Institut Macdonald-Laurier.

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