Près de la moitié des Canadiens pensent que l’objectif d’Ottawa de 500 000 immigrants par an est trop élevé, selon un sondage
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Par Herbert Grubel
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Les Canadiens sont de plus en plus préoccupés par l’immigration. Une récente Sondage Léger a constaté que 49 pour cent d’entre nous pensent que le nouvel objectif du gouvernement fédéral de 500 000 immigrants par an est trop élevé, tandis que 75 pour cent craignent que le plan n’entraîne une demande excessive de logements et de services sociaux. De son côté, le ministre de l’Immigration, Sean Fraser, nous dit qu’il n’y a pas lieu de s’inquiéter : les immigrants eux-mêmes fourniront la main-d’œuvre nécessaire à la construction du parc de logements dont ils auront besoin.
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La majorité des Canadiens ont toujours accueilli les immigrants et croient qu’ils profitent à l’économie et à eux-mêmes. Ce qui les inquiète aujourd’hui, c’est la perspective d’une immigration massive qu’ils estiment que le marché du logement ne peut absorber sans des prix beaucoup plus élevés. Ils savent que l’assurance apaisante du ministre n’est pas étayée par l’expérience. L’immigration passée a augmenté la main-d’œuvre, mais n’a pas empêché les coûts élevés du logement. Les réglementations excessives et le contrôle des loyers sont les principales raisons pour lesquelles le logement est si cher, et non une pénurie de main-d’œuvre.
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Non seulement les immigrants ajoutent à la demande de logements, mais ils augmentent également la congestion d’un large éventail de services publics : médecins, hôpitaux, écoles, universités, parcs, maisons de retraite, routes et ponts, ainsi que les services publics qui fournissent l’eau, l’électricité et les égouts. En théorie, l’offre de toutes ces choses pourrait être élargie raisonnablement rapidement. En pratique, l’expansion est lente. Mais les principales raisons à cela ne sont pas une pénurie de main-d’œuvre, mais une planification inadéquate, des ressources financières insuffisantes et, par conséquent, une construction en retard sur la demande.
Toutefois, les arguments en faveur du maintien de l’immigration annuelle à des niveaux traditionnels ou même quelque peu inférieurs ne reposent pas seulement sur l’effet sur les prix des logements et les services publics. L’immigration fait également baisser les salaires des travailleurs à faible revenu, ce qui se traduit par des transferts d’égalisation des revenus plus importants et des impôts plus élevés nécessaires pour les payer. Cela réduit également les incitations des employeurs à adopter des technologies économes en main-d’œuvre, une source importante de croissance de la productivité du travail et des salaires, et permet aux employeurs d’éviter le coût de fonctionnement des programmes d’apprentissage pour former des travailleurs qualifiés.
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Le succès généralisé du Japon dans l’utilisation de robots pour faire face aux pénuries de main-d’œuvre causées par le vieillissement de sa population illustre ce qui pourrait être fait au Canada. En Allemagne, les employeurs gèrent des programmes d’apprentissage pour former des travailleurs qualifiés aux besoins de l’industrie. Dans ce pays, de tels programmes pourraient soulager la pénurie de main-d’œuvre qualifiée tout en profitant aux personnes déjà présentes, plutôt qu’aux nouveaux immigrants amenés spécialement pour occuper des emplois hautement qualifiés actuellement demandés.
Malgré les chiffres de Léger suggérant que de nombreux Canadiens s’inquiètent des fortes augmentations du taux d’immigration, le débat à ce sujet a tendance à être unilatéral. Nous entendons parler des nombreux groupes qui bénéficient de l’immigration de masse : employeurs, avocats et consultants en immigration, promoteurs immobiliers, partis politiques qui réussissent traditionnellement dans les communautés d’immigrants, idéalistes qui veulent que nous « imaginions qu’il n’y a pas de pays », etc.
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De l’autre côté, les chiffres de Léger le suggèrent, il y a une majorité qui n’est pas du tout opposée à l’immigration en principe mais commence à s’informer sur le sujet et peut-être même ne devient politiquement active que lorsque les coûts deviennent si importants qu’ils ne peuvent être ignorés plus longtemps.
Dans Suisse au cours des années 1970, un boom économique a entraîné des pénuries de main-d’œuvre et l’immigration a été libéralisée. Il s’est avéré que la nécessité de produire des infrastructures de logement et des services publics pour ces immigrants a en fait aggravé la pénurie de main-d’œuvre. La majorité silencieuse des citoyens suisses s’est organisée et a profité de l’occasion pour faire changer la politique gouvernementale en exigeant un référendum public qui a finalement mis fin à la politique libérale d’immigration.
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Au Canada, les changements de politiques passent par le Parlement et l’élection des politiciens. Des chiffres comme ceux du sondage Léger pourraient commencer à suggérer aux politiciens qu’ils peuvent augmenter leurs chances électorales en répondant à la majorité qui préférerait une immigration quelque peu réduite mais aussi une réforme fondamentale du système actuellement utilisé pour déterminer le nombre et les caractéristiques des immigrants.
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Une telle réforme mettrait davantage l’accent sur les forces du marché plutôt que sur les politiciens et les bureaucrates pour fixer les niveaux d’immigration. Les immigrants ne seraient admis que s’ils possédaient une offre d’emploi officielle au Canada qui rémunère au moins le salaire moyen des travailleurs de la région où ils seraient employés.
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Dans ce système, l’intérêt personnel des employeurs garantirait que les travailleurs possèdent les compétences et les caractéristiques personnelles requises pour réussir au travail. L’exigence d’un salaire minimum empêcherait des flots d’immigrants de concurrencer les travailleurs à bas salaire du Canada et garantirait que ceux qui viennent ont le revenu nécessaire pour vivre sans avoir besoin de subventions publiques.
Se préoccuper de l’immigration ne suffit pas. Seule l’élection d’hommes politiques engagés dans ce genre de réforme rétablira la paix mentale.
Herbert Grubel, lui-même immigrant au Canada, est professeur émérite d’économie à l’Université Simon Fraser et chercheur principal au Fraser Institute.