Un élargissement bien intentionné des politiques pourrait nuire gravement à l’économie canadienne
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Par Aaron Wudrick
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Le gouvernement Trudeau a officiellement lancé une consultation sur l’avenir de la politique de la concurrence au Canada. Il fait suite à des modifications à la Loi sur la concurrence qui ont été incluses dans le projet de loi budgétaire du printemps du gouvernement, mais qui ont été peu débattues par les parlementaires et n’ont reçu presque aucune attention dans la presse. C’est malheureux, étant donné que les révisions représentent des changements majeurs dans le droit canadien de la concurrence.
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La consultation est censée déterminer si une modification du droit de la concurrence est nécessaire pour faire face à un marché numérique en évolution. Mais il demande aux Canadiens d’envisager une vision entièrement nouvelle de la politique de la concurrence : une loi sur la concurrence moins ciblée qui est un outil polyvalent pour répondre à des défis sociaux plus larges. Comme c’est souvent le cas, un élargissement bien intentionné des politiques pourrait gravement nuire à l’économie canadienne.
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Le droit canadien actuel de la concurrence a des objectifs clairs, énoncés dans la Loi, de « maintenir et d’encourager la concurrence au Canada afin de promouvoir l’efficacité[…]de l’économie canadienne » et de « fournir aux consommateurs des prix et des choix de produits concurrentiels ». Cela indique clairement dans un anglais sans ambiguïté que la loi a deux objectifs : l’efficacité du marché et l’amélioration du bien-être des consommateurs.
Lors de l’évaluation des changements récents apportés à la politique canadienne de la concurrence et de l’examen des futurs changements potentiels, il est important d’évaluer dans quelle mesure ils s’harmonisent avec les objectifs visés. Modifier la loi de manière trop radicale pourrait saper les objectifs qu’elle visait en premier lieu.
Bien que de nombreux observateurs semblent supposer qu’un marché numérique en évolution mérite des révisions substantielles du droit de la concurrence, ce point de vue n’est pas universellement partagé. Un Institut Macdonald-Laurier 2021 rapport a conclu que la consultation devrait se concentrer sur des réformes progressives, et non globales, en particulier compte tenu des changements confus et aléatoires introduits au printemps dernier.
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Peut-être le plus controversé, les modifications apportées à la Loi augmentent la sévérité des sanctions administratives pécuniaires (SAP) pour les entreprises qui abusent de leur position commerciale dominante. Avant le 23 juin, la SAP maximale était de 10 millions de dollars pour une première contravention et de 15 millions de dollars pour les infractions subséquentes. Désormais, les entreprises sont passibles de ces sanctions ou peuvent tripler le bénéfice qu’elles tirent de la contravention. Si cet avantage ne peut être raisonnablement déterminé, il pourrait représenter jusqu’à 3 % de leurs revenus mondiaux annuels bruts, un coup financier considérable.
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La nouvelle structure AMP est truffée de problèmes. Premièrement, le libellé est vague. Que signifient trois pour cent du « revenu mondial annuel » ? Si XYZ Canada (une filiale de XYZ Global) abuse de sa position dominante sur le marché, est-elle responsable de trois pour cent des revenus mondiaux de XYZ Global ou seulement de XYZ Canada ? Cette distinction est importante, surtout lorsqu’il s’agit de millions, voire de milliards de dollars.
Une SAP est une amende appliquée sans procédure pénale régulière, ce qui peut soulever des questions sur la constitutionnalité d’amendes aussi importantes, car elles ne sont pas destinées à être un recours punitif – leur objectif est la dissuasion. En pratique, des SAP plus élevées dissuaderont les investissements nationaux et étrangers au Canada, décourageant les entreprises de s’établir ici. Couplé aux formalités administratives et aux fardeaux réglementaires auxquels les entreprises sont déjà confrontées au Canada, cela pourrait être une recette pour un désastre, d’autant plus que nous vacillons au bord d’une récession.
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Enfin, il y a la nouvelle définition déroutante de la loi sur le comportement anticoncurrentiel : une conduite qui « est destinée à avoir un effet négatif d’éviction, d’exclusion ou de discipline sur un concurrent, ou à avoir un effet négatif sur la concurrence ». Mais les effets négatifs sur les concurrents ne nuisent pas nécessairement à la concurrence. En effet, est-ce vraiment de la concurrence s’il n’y a pas d’effets négatifs sur les concurrents ? Les effets négatifs pourraient bien être le résultat naturel d’un processus concurrentiel légitime et sain. Confondre le préjudice à la concurrence avec le préjudice aux concurrents montre comment ces nouveaux changements éloignent la loi de son objectif initial de protection de la concurrence sur le marché.
La Loi sur la concurrence a largement servi le Canada parce qu’elle a été déployée, non pas comme un couteau suisse à tout faire, mais comme un instrument chirurgical destiné à un usage précis. Aussi bien intentionnée soit-elle, l’enrôlement de la politique de la concurrence dans la lutte contre d’autres maux de la société risque de la rendre inefficace dans ce pour quoi elle a été conçue : servir les meilleurs intérêts des consommateurs canadiens.
Aaron Wudrick est directeur du programme de politique intérieure à l’Institut Macdonald-Laurier.