Avec l’accord de libre-échange entre l’UE et le Mercosur, une vaste zone économique est créée, touchant plus de 700 millions de personnes. L’UE espère des bénéfices économiques et une réduction de sa dépendance envers la Chine et les États-Unis. Bien que l’impact macroéconomique soit limité, certains secteurs, comme l’automobile et l’agroalimentaire, pourraient en tirer parti. Cependant, des inquiétudes émergent chez les agriculteurs européens concernant l’importation de produits sensibles, et les écologistes alertent sur les risques environnementaux, notamment la déforestation. Les oppositions, notamment de la France et de l’Italie, compliquent l’approbation finale de l’accord.
Avec l’accord entre l’UE et les pays du Mercosur, une immense zone de libre-échange est désormais en place, touchant plus de 700 millions de personnes. Quels pays et secteurs vont tirer le meilleur parti de ce pacte ? Quelles sont les critiques qui émergent ?
Les attentes de l’UE vis-à-vis de cet accord
L’Union européenne vise principalement des objectifs économiques et géostratégiques à travers cet accord de libre-échange. D’une part, elle souhaite offrir des avantages à l’industrie locale, permettant aux entreprises européennes de vendre leurs produits à des tarifs plus compétitifs dans les pays du Mercosur, tout en facilitant les importations en provenance de cette région d’Amérique du Sud. D’autre part, cet accord a pour but de réduire la dépendance vis-à-vis de la Chine et des États-Unis, tout en renforçant les relations commerciales avec d’autres régions du monde.
Cet accord de libre-échange a été établi entre l’UE et l’alliance des États sud-américains connue sous le nom de Mercosur.
Les attraits de ce pacte pour l’UE
Les quatre nations du Mercosur (Argentine, Brésil, Paraguay et Uruguay) regroupent plus de 260 millions d’habitants. Ensemble, elles constituent la cinquième plus grande zone économique mondiale, avec un produit intérieur brut annuel de 2,2 billions d’euros. L’année dernière, ces pays ont importé des biens de l’UE pour une valeur de 55,7 milliards d’euros, tandis que les exportations de l’UE vers ces pays s’élevaient à 53,7 milliards d’euros. Selon des estimations de l’UE, environ 60 500 entreprises européennes pourraient en tirer profit.
Actuellement, la Chine est le principal partenaire commercial des pays du Sud global, entraînant des implications politiques significatives.
Les effets attendus de l’accord
L’Institut de l’économie allemande (IW) a étudié plusieurs analyses et conclut que l’impact macroéconomique de cet accord devrait être relativement limité. Pour l’UE, le PIB pourrait croître de seulement 0,06 % entre 2024 et 2040, soit environ 11,3 milliards de dollars. Le Brésil serait le plus grand bénéficiaire, avec une augmentation de son PIB de 0,46 %, équivalant à environ 9,3 milliards de dollars. Ces estimations sont basées sur des analyses des modèles de commerce mondial (GTAP), et d’autres études ont abouti à des résultats similaires, selon l’IW.
Les secteurs qui pourraient profiter de l’accord
L’industrie est particulièrement optimiste quant aux opportunités commerciales. Les constructeurs automobiles allemands, par exemple, ont longtemps plaidé pour un accord de libre-échange avec le Mercosur, étant donné qu’ils sont actuellement soumis à des droits de douane de 35 % sur les exportations de véhicules vers cette région. En 2023, seulement 20 700 voitures ont été exportées d’Allemagne vers l’Argentine et le Brésil, selon l’association de l’industrie automobile (VDA). Des droits de douane élevés pèsent également sur les pièces automobiles.
Les producteurs de denrées alimentaires pourraient également récolter de grands bénéfices de cet accord. Les taxes douanières sur des produits comme le chocolat et les confiseries (20 %), le vin (27 %), les spiritueux (20 à 35 %) et les boissons non alcoolisées (20 à 35 %) sont actuellement très élevées.
Les préoccupations des agriculteurs européens
Alerte des agriculteurs européens face à l’accord Mercosur
Les critiques des agriculteurs
Pour répondre aux inquiétudes, l’accord inclut des mécanismes de protection pour certains produits agricoles jugés sensibles. Par exemple, pour la viande de bœuf, les importations devraient être limitées à 99 000 tonnes, avec un taux de douane réduit de 7,5 %.
Cependant, les agriculteurs estiment que cette mesure est insuffisante. Ils soulignent que la quantité permise avec ce taux réduit représenterait près de la moitié des importations actuelles de viande de bœuf dans l’UE. L’institut Thünen a également conclu, dans une évaluation de l’impact sur l’industrie agricole, que la production dans l’UE pourrait légèrement diminuer, avec une baisse maximale d’un pour cent dans tous les secteurs. Le secteur de la viande porcine et de la volaille serait le plus touché.
Les agriculteurs français prévoient de faire entendre leur mécontentement dans la rue pendant trois jours à partir d’aujourd’hui.
Les critiques des écologistes à l’égard de cet accord
Les écologistes s’inquiètent de l’impact potentiel de la vente accrue de produits agricoles sur l’environnement, notamment la déforestation en Amazonie. Greenpeace redoute que les taux de déforestation dans la région du Mercosur ne s’accélèrent de cinq pour cent par an en raison de l’augmentation des quotas d’importation de viande de bœuf au cours des six prochaines années. La réduction des droits de douane sur les pesticides et les plastiques pourrait également aggraver la pollution plastique en Amérique du Sud et mettre en péril la biodiversité.
La réaction de l’UE face aux critiques
L’UE rejette la plupart des accusations, les qualifiant d’infondées, et insiste sur le fait que les bénéfices macroéconomiques sont indéniables. Concernant les pesticides, le ministère fédéral de l’Économie assure que toutes les importations devront respecter les normes légales de l’Union européenne. Cela implique que les limites maximales de résidus en vigueur dans l’UE ne pourront pas être dépassées. En règle générale, seuls les produits conformes aux strictes réglementations européennes seront autorisés à entrer sur le marché européen.
Le ministre fédéral de l’Économie, Habeck, défend des investissements allemands accrus et un accord de libre-échange lors d’une rencontre à New Delhi.
Les oppositions de la France et de l’Italie : quel avenir pour l’accord ?
En réalité, l’accord ne peut pas entrer en vigueur sans l’approbation de tous les États membres, car il contient non seulement des dispositions commerciales, mais aussi des accords sur le dialogue politique et la coopération. Toutefois, la Commission européenne, responsable des négociations, pourrait tenter de dissocier la partie politique de la partie commerciale, permettant ainsi à la partie commerciale de progresser indépendamment