Les élections américaines suscitent un vif intérêt à Taïwan, qui dépend fortement des États-Unis pour sa défense face à la menace chinoise. Le gouvernement taïwanais envisage d’importantes commandes d’armements, incluant des destroyers Aegis et des chasseurs F-35, tout en faisant face à des retards de livraison. Les dépenses militaires actuelles sont jugées insuffisantes, et une garantie de sécurité explicite des États-Unis pourrait exacerber les tensions avec la Chine.
Les enjeux des élections américaines pour Taïwan
Les élections américaines captent toujours l’attention à Taïwan. L’île s’appuie quasiment entièrement sur les États-Unis pour ses acquisitions militaires, car d’autres nations hésitent à vendre des armements à Taïwan de peur de froisser la Chine.
Dès juillet, des avertissements ont été émis concernant les conséquences potentielles d’une réélection de Trump. « Taïwan devrait nous rémunérer pour la défense », avait déclaré le candidat à la présidence de l’époque lors d’une interview avec Bloomberg, ajoutant que Taïwan ne contribue pas suffisamment.
Vers un renforcement militaire à Taïwan
Face à une menace existentielle croissante, le gouvernement de Lai Ching-te semble réceptif au message, préparant une commande d’armements significative pour s’aligner avec Trump. Selon le « Financial Times », des sources anonymes taïwanaises et américaines ont révélé que la liste des achats envisagés comprendrait des destroyers Aegis, parmi les navires de guerre les plus avancés de la flotte américaine, ainsi que des chasseurs F-35 de dernière génération et des avions de surveillance. Un expert local estime que l’ensemble du paquet pourrait atteindre une valeur de 15 milliards de dollars.
Il reste à déterminer les détails de cette commande et la capacité des États-Unis à répondre aux besoins de Taïwan. Les efforts de l’île en matière de défense, bien qu’en augmentation, sont jugés insuffisants par des experts tels que Heino Klinck, ancien haut fonctionnaire au Pentagone, qui souligne la nécessité pour Taïwan d’intensifier ses efforts face à une menace existante, comparable à celle d’Israël.
Actuellement, des commandes d’une valeur d’environ 20 milliards de dollars sont en attente, y compris des chasseurs F-16 et des chars de combat Abrams. Cependant, il existe un besoin pressant d’armements légers pour la guerre asymétrique, tels que des missiles portables Stinger ou des lance-roquettes Javelin, alors que l’industrie américaine est déjà à pleine capacité.
Les retards dans les livraisons suscitent des inquiétudes, selon Sheu Jyh-shyang de l’Institute of National Defense and Security Research (INDSR). Ce problème pourrait s’aggraver si Taïwan recherchait des F-35, car la demande est forte en raison des besoins de l’OTAN. Les États-Unis ont jusqu’à présent été réticents à fournir ces avions, craignant qu’ils ne tombent entre les mains de la Chine.
Malgré ces obstacles, Su Tzu-yun de l’INDSR estime que les chances de recevoir ces systèmes d’armement sont meilleures que jamais, en raison de l’évolution du rapport de forces dans la région, notamment avec l’introduction par la Chine de chasseurs modernes comme le J-20 et le J-35.
Les dépenses militaires de Taïwan, représentant environ 2,5 % de son PIB, sont jugées insuffisantes par les experts, surtout face à l’augmentation des menaces. Bien que Trump ait suggéré un budget de défense de 10 %, qui serait irréaliste, Sheu estime qu’une fourchette de 4 à 5 % serait plus appropriée.
La population taïwanaise semble prête à investir davantage dans la défense, à condition que les États-Unis garantissent une sécurité claire, similaire à celle dont bénéficie Israël. L’ambiguïté stratégique sur la volonté des États-Unis d’intervenir en cas d’attaque contre Taïwan demeure un sujet de débat depuis des décennies.
Une garantie de sécurité explicite pourrait provoquer une réaction négative de la Chine, remettant en question ses ambitions de réunification. De plus, un éventuel paquet d’armement serait perçu par Pékin comme une provocation. Cependant, Klinck, ancien fonctionnaire du Pentagone, soutient que l’Occident ne doit pas répéter les erreurs commises en Ukraine, où la dissuasion a été négligée de peur d’escalader les tensions avec la Russie.