En 2021-2022, le Canada n’a attiré que 119 milliards de dollars américains de capitaux étrangers. Les sorties de capitaux représentaient plus du double de ce montant
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Le prétendu « effondrement » du secteur des entreprises canadien devient invariablement une préoccupation politique chaque fois qu’une entreprise canadienne de renom est acquise par des étrangers. Un chahut a éclaté lorsqu’en avril 2023, Glencore a tenté de racheter la société minière Teck de la Colombie-Britannique. Conservant ses actifs miniers de métaux, Teck a finalement vendu ses actifs de charbon à Glencore pour 9 milliards de dollars canadiens. Mais il n’y a pas eu beaucoup de rachats majeurs récemment. La politique mise à part, ce n’est pas bon. Lorsque les managers ne craignent pas la concurrence, la productivité en souffre.
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Il y a un demi-siècle, sous le gouvernement de Pierre Trudeau, le ministre libéral Herb Gray présentait un projet de loi dont le but était de filtrer les prises de contrôle étrangères d’entreprises canadiennes. Il a spécifiquement fait valoir que dans bon nombre des « industries à la croissance la plus rapide au Canada, les principales entreprises, celles qui occupent les positions dominantes, sont contrôlées par des non-résidents ». Le résultat fut la création en 1973 de l’Agence d’examen des investissements étrangers (FIRA) pour déterminer si les acquisitions étrangères d’entreprises canadiennes présentaient des « avantages substantiels » pour le Canada.
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En 1985, le gouvernement Mulroney a remplacé la FIRA par Investissement Canada, qui visait à accueillir davantage les investissements étrangers afin de stimuler la croissance économique. Une fraction beaucoup plus petite des rachats serait examinée et le critère d’acceptabilité serait réduit d’un bénéfice « substantiel » à un bénéfice simplement « net ».
La question politique est revenue lorsque plusieurs grandes entreprises sous contrôle canadien ont été acquises au cours des années de boom de 2000 à 2014. Sept rachats valant plusieurs milliards ont eu lieu au cours de ces années. Le plus important était celui de Seagram, vendu en 2000 pour 69 milliards de dollars (en dollars actuels). Les sociétés minières Falconbridge, Inco et Alcan ont toutes été vendues en 2006-2007, tandis que les sociétés pétrolières Nexen et Talisman ont été vendues respectivement en 2012 et 2014. L’angoisse nationaliste a atteint son paroxysme lorsque le bien-aimé Tim Hortons des Canadiens a été acquis par Burger King en 2014. En dollars d’aujourd’hui, ces rachats ont coûté en moyenne 35 milliards de dollars américains chacun.
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L’étau réglementaire s’est toutefois resserré depuis. Après la prise de contrôle de Nexen, le gouvernement Harper a imposé des limites à l’acquisition de sociétés de ressources par des entreprises publiques. En 2023, le gouvernement Trudeau a ajouté des restrictions en matière de sécurité nationale après avoir bloqué les projets de rachat par la Chine de la société minière canadienne TMAC Resources et de l’entreprise de construction AECON. Cela a également nécessité la cession d’une filiale canadienne de communication (CMLink) par China Mobile. Et cette semaine, la société minière Osino Resources a indiqué qu’elle testerait la politique libérale en annonçant une prise de contrôle par la société chinoise Yintai Gold Co. pour 368 millions de dollars.
Comme pour la transaction Osino, la plupart des acquisitions étrangères de cette époque sont de petite taille. Deux des ventes les plus importantes en 2021 ont été celles de Turquoise Hill Resources à Rio Tinto et de Pretium Resources à la société australienne Newcrest Mining. Ils s’élevaient respectivement à 3,8 milliards de dollars et 3,2 milliards de dollars, en dollars de 2024, soit environ un vingtième de la vente de Seagram.
S’il y a un affaiblissement de l’économie canadienne, ce n’est pas à cause du rachat d’entreprises canadiennes par des capitaux étrangers, mais à cause du fait que les capitaux en général se déplacent à l’étranger ou ne viennent pas ici en premier lieu. En 2021-2022, le Canada n’a attiré que 119 milliards de dollars américains de capitaux étrangers. Dans le même temps, les sorties de capitaux ont été plus du double, soit 276 milliards de dollars. Alors que les grandes multinationales canadiennes recherchent de meilleurs profits ailleurs, la vraie question est de savoir pourquoi si peu de grandes entreprises canadiennes sont recherchées par des géants étrangers valant des milliards de dollars.
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Une des raisons évidentes est le protectionnisme. Les lois canadiennes sur les valeurs mobilières ont permis à 100 entreprises de détenir des actions à double catégorie qui permettent à un propriétaire-entrepreneur de conserver une participation majoritaire avec droit de vote dans une entreprise. À moins que l’actionnaire majoritaire ne soit disposé à vendre, une prise de contrôle étrangère est quasiment impossible.
Au-delà de cela, de nombreuses grandes entreprises canadiennes n’ont pas à craindre une fusion, car la réglementation limite la propriété étrangère dans leur secteur. Les banques, les compagnies d’assurance, les transports aériens et maritimes, les mines d’uranium, les communications et les médias sont ainsi protégés. Les sociétés détenues par les gouvernements (par exemple les compagnies d’électricité) ne peuvent pas non plus être acquises. Je calcule que parmi les 20 plus grandes sociétés au Canada dont la capitalisation boursière varie entre 140 et 34 milliards de dollars, sept ne peuvent pas être rachetées par des sociétés étrangères pour cette raison.
Il faut également tenir compte du fait que certaines entreprises, malgré leurs bénéfices sains, sont exclues des cibles d’acquisition pour des raisons ESG. Parmi les 20 plus grandes entreprises canadiennes, six sont des sociétés du secteur des sables bitumineux ou des sociétés énergétiques liées qui sont devenues verboten parmi les investisseurs progressistes (et intimidés par les progressistes).
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En général, les gouvernements rendent également plus difficiles les investissements transfrontaliers (même si, comme nous l’avons vu, cela n’a pas stoppé les flux sortants de ce pays). Selon la CNUCED, 57 rachats ont été examinés par Investissement Canada entre 2020 et 2022. Environ les trois cinquièmes (36) ont été autorisées, le reste étant soit rejeté (six), soit retiré (21). En comparaison, les États-Unis ont examiné 17 fois plus d’acquisitions que le Canada, mais n’en ont rejeté que deux, bien que sept pour cent aient été modifiés et 14 pour cent retirés, laissant près des quatre cinquièmes à approuver.
L’OCDE classe le Canada comme ayant les systèmes les plus restrictifs parmi les pays du G7, principalement en raison de ces restrictions en matière d’équité et de notre processus de sélection. Nos plus grandes entreprises dans les secteurs des ressources, des communications et de la finance, là où les marchés mondiaux sont aujourd’hui les plus actifs, sont largement protégées du contrôle étranger.
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Le rapport de 2008, Compete to Win, rédigé par un comité d’experts présidé par l’ancien PDG de Bell Canada, Red Wilson, concluait que la productivité canadienne souffre de nos restrictions sur les prises de contrôle étrangères et de la faiblesse de notre politique de concurrence. Il est peut-être temps de dépoussiérer ce rapport et de l’examiner à nouveau attentivement.
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